Le président de l’Office Central de Lutte contre l’Enrichissement illicite (OCLEI) a présenté, le samedi dernier, le rapport annuel d’activités de son organisation de la période allant du 1er juin 2017 au 31 décembre 2018. L’occasion saisie par Moumouni Guindo pour informer les hommes de médias de la traduction en justice, par son organisation, de trois fonctionnaires pour un enrichissement illicite de plus 4 milliards de nos francs.
Trois fonctionnaires épinglés pour corruption de plus 4 milliards FCFA
Le président de l’OCLEI a profité de cette conférence pour informer les journalistes d’un de leurs grands acquis : la traduction, en justice, de trois fonctionnaires pour plus de quatre milliards de FCFA. Tous les trois fonctionnaires, deux inspecteurs des finances et un inspecteur des services de sécurités sociales, ont, chacun, plus d’une quinzaine de maisons d’habitation et plusieurs parcelles dans les quartiers chics de Bamako et d’autres grandes villes du Mali.
Le premier dossier est celui d’un inspecteur des services de sécurité sociale. Les biens de ce dernier, selon Moumouni Guindo, sont identifiés à 17 maisons d’habitation, 03 maisons d’habitation et une parcelle déjà vendues, 4 véhicules particuliers. En tout cas, la valeur des biens identifiés de cet inspecteur est estimée à 969 millions de FCFA selon l’expertise. Or, la même expertise fait croire que le montant des revenus légitimes de ce dernier, de la période 2014 à 2019, est estimé à 63,3 millions. Donc les 906, 03 millions de francs CFA ne sont pas justifiés.
Les deux autres fonctionnaires sont des Inspecteurs de Finances et tous les deux sont milliardaires. L’un dispose, selon l’expertise, de 20 bâtiments, dont 17 maisons d’habitation et 02 écoles; une ferme agricole, 46 parcelles non bâties, 2 maisons d’habitation et 2 parcelles non identifiées et un bâtiment commercial qu’il a déjà vendu. En six ans, il s’est tapé 1,562 milliards FCFA comme valeur présumée de ses biens. Or, précise l’expertise, le total de ses revenus légitimes sur les six ans, est estimé à 29, 47 millions de F CFA. Pis, selon le président de l’OCLEI, « Cette personne utilise ses enfants mineurs et ses proches parents comme prête-nom en mettant l’essentiel des biens à leur nom ».
Le second, quant à lui, dispose selon l’expertise, de 18 maisons d’habitation, dont une résidence R+3 avec piscine, ayant coûté plus de 400 millions de F CFA ; 3 maisons d’habitation vendues pendant l’enquête ; 10 parcelles non encore identifiées ; 18 parcelles non bâties ; 5 voitures. La valeur présumée de ses biens est estimée à 1 milliard 751 millions de F CFA alors que le total de ses revenus légitimes est 27 millions de F CFA, selon l’expertise. Donc il lui faut justifier 1 milliard 720 millions de nos francs.
Selon le président de l’OCLEI, une fois que la justice confirme les faits qui sont reprochés à ces fonctionnaires, leurs biens seront saisis et seront mis dans la caisse de l’État.
Les acquis de l’OCLEI
Commencé avec beaucoup de difficultés, l’OCLEI, dirigé la par le magistrat Moumouni Guindo, a fourni un résultat remarquable. Selon son rapport du 1er juin 2017 au 31 décembre 2018 présenté à la presse par son président, cette institution chargée de la prévention et de la répression de l’enrichissement illicite a donné ses acquis. Le dépôt de la déclaration de biens par 998 fonctionnaires sur les 1479 assujettis ; la mise en place, en lien avec la Cour suprême, d’un dispositif sécurisé pour la gestion et l’exploitation des déclarations de biens ; la réalisation d’une étude sur l’éthologie de l’enrichissement illicite ; l’élection du président de l’OCLEI, Moumouni Guindo, comme vice-président du Réseau des institutions nationales de lutte contre la corruption en Afrique de l’Ouest…sont entre autres, quelques acquis de l’organisation en 18 mois.
Des perspectives
Dans son ambition de combattre la corruption sur toutes ses formes, le président de l’OCLEI se fixe les perspectives suivantes : la mise en place d’un centre d’appel à travers le numéro vert 80 00 22 22 pour permettre aux citoyens de dénoncer les faits d’enrichissement illicite et de corruption ; la mise en fonctionnement du système de sécurisation des déclarations de biens de la Cour suprême à l’OCLEI ; contre de l’exactitude , de l’exhaustivité et de la sincérité des biens en fonction des capacités disponibles ; l’intensification sur auto-saisine , sur dénonciation …
Comme difficultés, Moumouni Guindo a évoqué le manque de personnel, surtout des enquêteurs, l’insuffisance des moyens. Aussi, a-t-il profité de cette conférence pour déplorer le fait que certains fonctionnaires de l’État échappent à la déclaration de biens. Il estime que tout le monde, députés, ministres, cadres de banques, agents des douanes…personne ne devrait échapper à cette mesure. « Si nous voulons réussir la lutte contre la corruption et la délinquance financière, il est important que nous mettions de côté les immunités et les privilèges de juridiction », a-t-il déclaré.
Boureima Guindo
Source : LE PAYS