Nous en avons traversé des époques et des étapes. Avec des mensonges, des manipulations, des vérités que personne ne voulait ou ne pouvait voir. Nous continuerons à passer des étapes de confusion créées et exploitées par certains d’entre nous-mêmes pour leur propre, seul et unique confort.
J’espère que nous arriverons un jour à l’étape d’une majorité de Maliens qui a du self estime et du recul. Des citoyens et une élite qui se rendent compte que défier la France en soi ne sera pas notre solution. Rejeter toutes solutions qui ont même l’odeur de la France revient à nier une partie de nous-mêmes après un siècle de relation quelque soient les douleurs et les frustrations créées par cette relation. La clé de notre solution est dans sa maîtrise (relation), pas dans sa destruction, son rejet. Si nous arrivions à être moins complexés, nous maîtriserions mieux notre destin lié à la France.
C’est nous qui nous mettons en position d’infériorité en élevant au-dessus de nous-mêmes le «Nansara» (le Blanc). Les indiens se sont émancipés du Royaume Uni, mais ils n’ont pas eu à aller se trouver un autre «Maître». Ils ont fait en sorte que les règles avec le royaume britannique en ce qui les concerne soient dictées par eux. Les Russes et les Arabes n’ont pas plus de respect pour le Noir que les Français. Notre tâche est donc de nous construire ce respect et non de passer d’une dépendance à une autre.
Défier la France, chasser les Français du Mali ne peut être un projet en soi. Alors quel est le plan ? Quelle est la vision ? Quelle est la solution globale visée pour un pays aussi vaste et devenu complexe socialement ? Chasser la France, nous en remettre à des fonds arabos-musulmans et russes qui vont venir nous exploiter à leur tour ? Il serait une grande étape de changement que le haut niveau de naïveté baisse dans notre Mali. Personne ne viendra gratuitement travailler à notre place pour construire le Mali. Il y aura toujours un prix fort à payer.
Alors la lutte la plus importante dans ce pays est certainement celle qui consiste à réapprendre le sens du travail et de la vraie dignité et de l’honnêteté. Pour cela, il faut des dirigeants qui ne mentent pas et ne trichent pas eux-mêmes. Dire que tout est de la faute de ceux qui étaient au pouvoir avant, pendant que rien n’a changé en terme de détournement de fonds, arroser certains d’argent pour se créer son clan… C’est une honte dans ce pays qui est désormais en train d’être enfoui sous terre par ses propres enfants.
Quelle honte pour le Mali que nous en soyons encore là à vouloir confier notre destin aux Russes croyant naïvement que le Mali pourrait être dignement un pays souverain en dépendant de toute façon d’une autre civilisation: Nous ne voulons plus la France ! Une tendance soutenue par ceux qui préfèrent l’argent et l’assistanat des pays arabes et/ou de la Russie. Quel manque de culture, d’intellect fort, de vision, d’ambition. Alors c’est ainsi que devrait finir le pays de la Charte de Kurukan Fuga, Charte du Mandé, qui est l’une des premières constitutions du monde !
Hier fut un 22 septembre bien triste pour moi, car les têtes changent en rajoutant des charges d’anciens présidents et d’anciens Premiers ministres sur le dos de ce pauvre pays, mais le fond du problème reste le même. La première étape de la solution au Mali est le bon exemple de patriotisme et de civisme. Nous n’en sommes malheureusement pas encore là. Autant alors se convaincre que nous aurons des échecs, et encore des échecs sous différentes formes.
Rokia Traoré
Source : Le Matin