Le Premier ministre libyen Ali Zeidan a qualifié vendredi son enlèvement la veille par des ex-rebelles de « tentative de coup d’Etat », accusant des acteurs politiques de vouloir « pousser le pays vers le chaos ».
M. Zeidan prononçait un discours à la nation quelques heures après un attentat à la voiture piégée contre le consulat du Suède à Benghazi, dans l’est du pays.
Autant d’actes qui illustrent, une fois de plus, les énormes problèmes de sécurité auxquels sont confrontées les autorités de transition, deux ans après la chute et la mort du colonel Mouammar Kadhafi.
Le Premier ministre a été enlevé jeudi dans un hôtel de la capitale –où il réside pour des raisons de sécurité– puis détenu durant plusieurs heures par des ex-rebelles dont les motivations demeurent inconnues.
« Je ne pense pas que plus de 100 véhicules armés puissent boucler un quartier à la circulation, sans qu’un ordre ait été donné (…) Ceci est une tentative de coup d’Etat contre la légitimité », a déclaré M. Zeidan.
« Ils ont réveillé tous les résidents de l’hôtel, ont terrorisé le personnel », a-t-il dit.
« Ils sont entrés de force dans ma chambre, ils ont tout pris », a ajouté le Premier ministre, assurant que les auteurs de son enlèvement seraient poursuivis en justice.
Il a dénoncé « un acte criminel et terroriste », accusant, sans le nommer, « un parti politique » d’être derrière son enlèvement.
Il a précisé que ce parti avait tenté cette semaine d’obtenir le quorum nécessaire au Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique du pays, pour le destituer. « Mais ils ont échoué », a-t-il dit.
« Comme ils ne sont pas parvenus à faire tomber le gouvernement démocratiquement, ils ont eu recours à la force », a-t-il déploré.
Il a encore accusé ses détracteurs au CGN d’entraver le travail du gouvernement en bloquant par exemple le budget et d’empêcher la construction d’une armée, dans le but de « pousser le pays vers le chaos ».
M. Zeidan, présenté comme un libéral, fait probablement référence au Parti pour la justice et la construction (PJC), branche politique des Frères musulmans libyens et d’autres petits blocs pro-islamistes au CGN.
Il accuse les islamistes de chercher à l’évincer à tout prix, tandis que le PJC, qui détient cinq portefeuilles ministériels, lui reproche notamment d’avoir échoué dans le dossier de la sécurité et menace de retirer ses ministres.
Attentat devant le consulat de Suède à Benghazi
Ces divisions risquent d’aggraver encore un peu plus la crise économique, politique et surtout sécuritaire dans le pays.
Dernière violence en date, le consulat de Suède à Benghazi, l’une des rares représentations diplomatiques encore ouvertes dans cette ville, a été l’objet d’un attentat vendredi.
Le colonel Abdallah Zaidi a fait état d’un attentat à la voiture piégée qui a « provoqué d’importants dégâts matériels au bâtiment et au voisinage mais sans faire de victime ».
La multiplication des attaques visant des diplomates, dont celle qui a coûté la vie à l’ambassadeur américain Chris Stevens le 11 septembre 2012, a déjà poussé la plupart d’entre eux à quitter Benghazi, bastion de la révolution libyenne de 2011.
Ces attentats, souvent attribués à des islamistes extrémistes, n’ont jamais été revendiqués.
Cet attaque intervient quelques jours après la capture à Tripoli d’un responsable d’Al-Qaïda, Abou Anas al-Libi, par un commando américain, une opération qui a embarrassé les autorités libyennes et qui a provoqué la colère de groupes d’ex-rebelles et de partis politiques.
Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi, les autorités de transition peinent à rétablir l’ordre dans le pays, face à la multiplication de milices armées.
Ces groupes armés, formés par des ex-rebelles ayant combattu l’ancien régime en 2011, comblent le vide en matière de sécurité laissé par un État en déliquescence.
Les autorités n’ont jusqu’à présent pas été en mesure de contrôler ces milices, qui n’hésitent pas à s’attaquer aux institutions de l’Etat dès que leurs intérêts sont en jeu.
Le gouvernement fait face en particulier à une chute sans précédent de la production d’hydrocarbures, en raison du blocage effectué par des gardes sur les installations pétrolières de plusieurs terminaux.