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Les ratés de la cérémonie d’investiture de Laji Burama

La cérémonie d’investiture, il y a de cela quelques jours, du Président élu Ibrahim Boubacar Keïta dans la grande salle du Centre International de Conférences de Bamako (CICB), a révélé plusieurs carences du protocole de la présidence de la république et du Grand Chancelier des Ordres Nationaux du Mali.president ibrahim boubacar keita ibk discours investiture cour supreme main levee je jure

En effet, tout avait été fait pour rendre la cérémonie solennelle : sièges recouverts de tissu blanc, murs arborant les couleurs nationales, vert, or et rouge, tapis rouge, places assises étiquetées, etc. Malheureusement ceci n’a pas suffi car avant le début de la cérémonie on voyait des notables, des étrangers (toubabs) cartes d’invitation en main, sans guide à la recherche d’une place assise introuvable. Il y a eu des invités qui sont restés là, debout durant toute la durée de la cérémonie. Quelle idée d’inviter des personnalités si on ne peut leur assurer une place assise ?

En plus de cette impression de place foraine qui se dégageait de la salle, la cérémonie elle-même fut pour nous une succession de bourdes qui sont peut-être anodines pour certains, mais qui à nos yeux ont une grande importance, relevons-en quelques unes :

 

D’abord le port de la bande tricolore en bandoulière. Il me semble que notre président a été investi comme président de la Guinée Conakry et non comme celui du Mali. En effet, le Grand Chancelier des ordres nationaux du Mali a fait arborer à notre président, le drapeau de la Guinée : rouge, jaune et vert et non vert, jaune et rouge ! Etait-ce par ignorance ou, étant donné la solennité de l’évènement, notre Colonel était si ému jusqu’à en perdre les pédales? Dans les deux cas, c’est impardonnable. Le Grand Chancelier ne sait-il pas que dans la tradition française- et même mondiale- que nous avons adoptée, que le cou de l’homme représente le mât du drapeau lorsqu’on le porte en bandoulière ? Le Grand Chancelier n’a-t-il pas remarqué comment, un autre colonel, son prédécesseur feu  Kokê DEMBELE (paix à son âme) s’était pris avec les Présidents Alpha Oumar KONARE, Amadou Toumani TOURE, Dioncounda TRAORE et aussi, comment le Président par intérim lui-même a décoré les différents présidents Yayi BONI, Blaise COMPAORE, François HOLLANDE et tout récemment Alassane Dramane OUATTARA ? Ne voit-il pas comment les Présidents de la Cour Constitutionnelle et de la Cour Suprême et leurs conseillers arborent leur étendard quand ils le portent en diagonale ? Il est vrai qu’à sa décharge, les honorables députés de l’Assemblée Nationale et la plupart des maires et conseillers municipaux ont la même pratique que lui. Ceci est un détail mais un détail significatif qui montre le manque de sérieux de notre protocole. La symbolique du drapeau est si importante à nos yeux que dès la maternelle, on devrait apprendre aux enfants comment tenir ou arborer le fanion national. Elle est si importante à nos yeux qu’on ne devrait pas permettre son port à la manière alambiquée. Gageons que le nouveau Président que l’on dit pointilleux sur le protocole mettra fin à cette pratique désordonnée du port du drapeau national ;

 

La 2ème bourde à notre avis a eu lieu au cours du déroulement de la cérémonie.             En effet,  immédiatement après la décoration du Président élu, l’hymne national devrait être exécuté. Malheureusement là aussi, le Grand Chancelier qui devrait  donner l’ordre d’exécution à la fanfare de la garde républicaine n’a même pas daigné regarder là-haut en direction de celle-ci. Le patron de la fanfare était dans tous ses états ; il a fallu qu’un homme avisé prévînt le colonel du couac : on leva le Président de sa place assise, on le fit revenir et on exécuta l’hymne !

 

3ème bourde : dans son discours d’investiture, le Président a eu des mots très aimables à l’endroit du Général Moussa TRAORE, El hadj Moussa TRAORE, le Président Moussa TRAORE et son « grand frère » le Président par intérim Dioncounda TRAORE. Mais aucun mot pour le père de la nation, le Président Modibo KEÏTA et les Présidents Alpha Oumar KONARE et  Amadou Toumani TOURE. Après la cérémonie, nous nous posions la question de savoir si la présence et la glorification du Général Moussa Traoré relevait du désir de réconciliation nationale. Nous pouvons aujourd’hui, répondre par l’affirmative après la nomination comme Premier ministre de son premier gouvernement  l’aîné des fils de l’une des victimes de la dictature du Général, mais aussi par la composition de son gouvernement où la tendance principale est de voir figurer presque toutes les sensibilités régionales et ethniques. Sauf que ses grands cousins du centre du pays, ceux des plateaux et des plaines sont absents de cette liste de 34 membres !

 

Nonobstant son ardent désir de vouloir marquer le début de son mandat par un geste fort de réconciliation nationale – ce qui est un acte louable – le Président n’était pas dans son rôle en  magnifiant «  le  général républicain » et  surtout en ignorant les hommes qui ont eu à gérer ce pays avant et après lui. Nous pensons que là, Laji Burama a commis un impair qu’il songera certainement à redresser au cours de la grand-messe du 19 septembre 2013.

 

Enfin, bien que le Président a dans son discours promis une enquête sur les causes des inondations à Bamako, nous aurions souhaité une minute de silence ou une fatiha pour nos 35 (ou plus)  victimes des inondations et l’annonce de mesures idoines pour leur relogement car c’est bientôt la rentrée des classes. Ce qui aurait quelque peu réparé la maladresse «du grand-frère» qui n’a pas jugé utile de décréter ne serait-ce qu’une journée de deuil national à la mémoire de nos disparus.

Maintenant que l’une des phases des manifestations de l’investiture de Laji Burama est achevée, et que le 1er gouvernement a été formé, nous attendons la 2ème phase où presque tous les grands dirigeants de ce monde auraient été conviés, notamment le GCB (Grand Chef Blanc), le libérateur. Ce sera une grand-messe quelle qu’en soit le coût – tant pis pour les finances publiques, l’honneur du Mali n’a pas de prix – qui marquera l’an 1 de la refondation du Mali, version IBK ! Nous avons bon espoir que ce ne sera pas comme l’autre jour, dans la grande salle du CICB. Là, cette fois-ci, tout le monde aura de la place puisque ce sera au Grand Stade du 26 mars. Je me demande si le Général que l’on a magnifié au cours de la 1ère phase et qui est sans doute invité  sera de la partie. Et pour cause !

 

Le mandat – pour ne pas dire le règne – du Président Ibrahim Boubacar Keïta a commencé par plusieurs couacs, est-ce un signe d’imprécation ? Nous espérons que non car, notons tout de même  qu’il a aussi commencé sous la pluie or la pluie, pour la plupart des peuples du Sahel n’est-elle pas annonciatrice de bonheur ?

 

Hamidou ONGOÏBA,

Professeur à la retraite B.P E 1045 Bamako

Source: Le Prétoire

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