Les médias américains gratuits en ligne subissent en ce moment une vague de suppression de postes. Vice, Buzzfeed ou le Huffington Post, la presse gratuite en ligne va mal alors que Facebook souffle sur sa quinzième bougie.
La vidéo est signée du New York Times et elle pas mal circulé. Elle prétend fêter à sa manière les quinze ans de Facebook en énumérant tous les vices du réseau social, depuis la vente de données personnelles avec le scandale Cambridge Analytica jusqu’à la diffusion de contenus haineux en passant par le piratage d’œuvres ou la circulation de fake news. Mais le reproche que peuvent faire les médias à Facebook, et peut-être plus encore qu’à Google, c’est d’avoir une telle connaissance de ses utilisateurs que ses publicités ciblées ringardisent les campagnes publicitaires dans les médias en ligne.
Longtemps, ces médias ont cru que la plateforme avait besoin d’eux pour se développer, mais la réalité est assez cruelle : Facebook n’a jamais été aussi prospère, l’entreprise a même engrangé 17 milliards de dollars sur le seul dernier trimestre, et pourtant jamais elle n’a été aussi critiquée dans les médias : non seulement depuis l’affaire Cambridge Analytica sur l’utilisation politique de ses données, mais aussi sur l’influence que la plateforme a eue sur la propagation de haine lors des massacres de Rohingyas, en Birmanie.
Face à elle, de gros éditeurs de contenus qui se targuaient d’être des natifs du numérique et de mettre l’accent sur la vidéo ont tous annoncé cette année des plans sociaux. Buzzfeed supprime 220 emplois, soit 15% de ses effectifs. Vice, qui était dirigé jusqu’au printemps par son fondateur, le très tendance Shane Smith, doit aussi renoncer à 250 postes, 10% de ses emplois, en raison notamment des difficultés de sa chaîne Viceland. Quant au Huffington Post, d’Ariana Huffington, il fait les frais de la suppression de 800 emplois dans la division média de son propriétaire, le groupe Verizon, et il doit lui aussi se séparer de 10% de ses journalistes. Tous ces médias ont un point commun : ils sont dépendants de la publicité pour vivre.
Alors bien sûr, cela rejoint le triste décompte des effectifs journalistiques. En dix ans, selon le Guardian, le nombre d’employés des rédactions dans les journaux américains a fondu de 45% pour atteindre 39 000. Ces dernières semaines, 2 200 emplois ont été perdus et pour beaucoup d’entre eux dans les médias numériques où l’on avait embauché des bataillons de recrues dans la vidéo. Finalement, les médias qui apparaissent le plus en forme – le New York Times et le Washington Post notamment – sont ceux qui ont investi en masse en recrutant des journalistes d’une part et des développeurs d’autre part pour transformer les lecteurs en abonnés payants numériques. Le New York Times, ainsi, a presque triplé ses abonnements numériques pour les porter à 4,3 millions.
RFI