Les relations entre Bamako et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mai [MINUSMA] sont actuellement tendues, la junte au pouvoir n’appréciant pas les enquêtes que souhaite mener l’ONU sur les exactions que les forces armées maliennes [FAMa] et leurs partenaires russes [du groupe paramilitaire Wagner] sont soupçonnées d’avoir commises. Et cela n’ira probablement pas en s’arrangeant dans les semaines à venir…
En effet, lors du renouvellement du mandat de la MINUSMA par le Conseil de sécurité, le 30 juin dernier, la junte a fait savoir qu’elle refuserait d’octroyer aux enquêteurs de l’ONU la liberté de circuler sans autorisation préalable… Une façon de les empêcher de se rendre dans certaines zones « sensibles »… et de documenter certaines accusations contre les FAMa et leurs alliés, comme vient de le faire le groupe d’experts des Nations unies pour le Mali. Selon un rapport dont l’AFP a fait état le 7 août, ils ont confirmé l’implication de militaires maliens et celle d’un « groupe de soldats blancs » dans la mort de 33 civils, dont 29 Mauritaniens, dans la région de Ségou, près de la frontière avec la Mauritanie.
Quoi qu’il en soit, le mois dernier, les autorités maliennes de transition ont expulsé Olivier Salgado, le porte-parole de la MINUSMA, après l’avoir accusé de colporter de « fausses informations » au sujet de l’arrestation de 49 soldats ivoiriens à Bamako, ceux-ci ayant été considérés comme étant des « mercenaires ». Puis elles ont décidé de suspendre les rotations des contingents militaires et policiers de la mission de l’ONU et d’exiger des « forces étrangères » de quitter une base située dans l’aéroport de Bamako.
Déjà confrontée au « vide sécuritaire » causé par le retrait de la force française Barkhane, la MINUSMA a alors qualifié cette situation d’ »extrêmement préoccupante », les retards dans la relève des Casques bleus étant susceptibles d’avoir des conséquences « en termes d’efficacité opérationnelle ».
Cela étant, afin d’assurer la sécurité de la base de Gao, que les militaires français sont sur le point de quitter, l’Allemagne avait obtenu de Bamako l’autorisation d’y déployer un détachement de la Bundeswehr. Et la ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht, a même dit avoir reçu, de la part de son homologue malien, le colonel Sadio Camara, que cette rotation aurait bien lieu.
Seulement, Mme Lambrecht a dû finalement déchanter… « Les actes de Camara parlent une autre langue que ses mots », a-t-elle en effet dénoncé, ce 12 août, dans un communiqué. En effet, les autorités maliennes ont refusé d’autoriser le vol qui devait emmener les militaires allemands au Mali. D’où la décision prise par Berlin.
« Le gouvernement malien a encore une fois refusé d’autoriser un vol prévu aujourd’hui. [En conséquence], nous suspendons jusqu’à nouvel ordre nos opérations de reconnaissance et les vols de transport par hélicoptère [CH-53] » car « il n’est plus possible de soutenir la MINUSMA sur le plan opérationnel », a annoncé le ministère allemand de la Défense.
Sans l’arrivée de ces militaires allemands, appelés à remplacer leurs homologues français à Gao, la « sécurité sur place n’est plus assurée. Les forces restantes doivent être dédiées à la sécurisation et ne pourront plus assurer leurs missions habituelles », a expliqué, plus tard, un porte-parole.
Pour rappel, les militaires allemands de la MINUSMA ont par ailleurs connu quelques incidents avec les FAMa. En novembre dernier, une de leurs patrouilles avaient été la cible de tirs provenant d’une position tenue par des soldats maliens alors qu’elle revenait à Gao.