Des imams maliens réclament leur droit à l’action politique, d’être considérés comme des acteurs politiques à part entière, susceptibles de peser de leur poids pour changer la nature de l’Etat malien. Ils tirent conclusions du refus de la commission de finalisation du projet de constitution, de supprimer la nature laïque de l’Etat, pour instaurer un «Etat multiconfessionnel».
Si le processus en cours pour que le projet constitutionnel devienne la constitution de la République du Mali ne zappe pas le Conseil national de la Transition (CNT), des amendements seraient encore possibles au niveau de cet organe qui fait office de parlement. Faisant l’économie sur la pertinence d’un tel changement, en ouvrant la brèche, c’est inviter d’autres confessions à faire des propositions dont rien ne garantirait l’objectivité.
Le milieu politique ne s’est pas tu sur ses réserves sur ce projet de constitution, dont certains ont demandé le retrait pur et simple, autrement dit, le destiner au même sort que les projets de révision abandonnés par les présidents Alpha Oumar Konaré en 2001, Amadou Toumani Touré en 2011 et Ibrahim Boubacar Kéita en 2017, tous retirés sous la pression des contestateurs. Va-t-on jamais échapper au syndrome de la case départ au Mali?
L’actuel projet de constitution ne ferait pas suffisamment référence, allusion, allégeance au «mouvement démocratique» dont l’action a conduit à la «révolution du 26 mars 1991». Rien que pour ce «crime de lèse-démocratie», certains acteurs politiques ont pris leur distance du projet de nouvelle constitution. Cependant, aucune analyse sérieuse ne donnerait un bilan élogieux des trente années de règne de la démocratie au Mali, et ce n’est nullement la démocratie qui est en cause, ni le multipartisme, mais certains acteurs politiques qui ont trahi le peuple; ils ont détourné à leur profit pour de sordides intérêts personnels, l’idéal démocratique qui a conduit les jeunes, les femmes sur les remparts, mus par des problèmes sociaux auxquels ils étaient confrontés, jusqu’au sacrifice suprême. La lutte héroïque des élèves et étudiants, des associations et organisations démocratiques, s’est muée en cauchemar, car où en sommes-nous aujourd’hui? C’est la faillite totale de l’Etat, de l’éducation, de la famille, de l’économie du Mali. Sur le plan économique, c’est l’économie criminelle, qui a le vent en poupe.
Si aucune œuvre humaine n’est parfaite, la Commission de finalisation du projet de constitution de la République a réalisé une œuvre d’émancipation et de dissipation de certaines craintes, en officialisant les langues nationales pour reléguer au rang de ‘’langue de travail’’ le français. Mais c’est également cela, le motif de rejet de certains. Allez savoir pourquoi! Des craintes ont été exprimées, quant au choix d’une langue nationale, comme langue officielle. Ce piège ne s’est pas refermé et c’est heureux. Reste au pouvoir de transition de réussir à mettre tous les Maliens d’accord autour de ce projet en faisant des concessions nécessaires, en gardant à l’esprit qu’aucune œuvre n’est parfaite et qu’aucune œuvre ne mettra jamais tout le monde d’accord.
Daou
Source: Le Républicain