Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a menacé samedi de quitter le gouvernement si Paris renonce à un rapport de force avec l’Algérie pour qu’elle accepte d’accueillir ses ressortissants en situation irrégulière en France.
“Tant que j’ai la conviction d’être utile et que les moyens me sont donnés, je serai mobilisé”, fait valoir M. Retailleau dans une interview au Parisien diffusée en ligne samedi. “Mais, prévient-il, si on me demandait de céder sur ce sujet majeur pour la sécurité des Français, évidemment que je le refuserais.” “Je ne suis pas là pour une place mais pour remplir une mission, celle de protéger les Français”, ajoute le ministre.
M. Retailleau était questionné sur le dossier algérien et “la riposte graduée” qu’il appelle de ses voeux si Alger n’acceptait pas de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière en France. Vendredi, le gouvernement a établi une première liste d’une soixantaine de ressortissants algériens qu’il souhaite expulser.
Le refus de l’Algérie d’accepter ses ressortissants sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), dont l’auteur d’un attentat qui a fait un mort à Mulhouse le 22 février, a fini d’envenimer des relations déjà très dégradées entre les deux pays depuis la reconnaissance en juillet dernier par le président Emmanuel Macron de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
M. Retailleau, qui multiplie les déclarations virulentes contre Alger, notamment depuis l’incarcération mi-novembre de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, prône l’instauration d’un rapport de force, passant par une riposte graduée. “Au bout de la riposte, il y aura une remise en cause des accords de 1968″, affirme le ministre. “Je serai intransigeant et j’attends que cette riposte graduée soit appliquée”, dit-il.
L’accord de 1968 donne un statut particulier aux Algériens en France, l’ancienne puissance coloniale, en matière de circulation, de séjour et d’emploi. Fin février, le Premier ministre François Bayrou a menacé de dénoncer cet accord si, dans un délai de six semaines, l’Algérie ne reprenait pas ses ressortissants en situation irrégulière. De son côté, M. Macron a joué la carte de l’apaisement en se disant “favorable, non pas à dénoncer, mais à renégocier” cet accord.
Retailleau “a déjà cédé” selon le RN, sa démission serait “une bonne nouvelle” pour LFI
Les oppositions ont dit souhaiter le départ de Bruno Retailleau du gouvernement: le ministre de l’Intérieur n’a “rien à (y) faire” car il “a déjà cédé” sur le dossier algérien selon le RN, LFI considérant dimanche qu’une démission serait “une bonne nouvelle pour la France”.
Pour des raisons différentes, le Rassemblement national et La France insoumise ont tous deux appelé M. Retailleau à mettre en œuvre sa menace de démission, émise dans une interview au Parisien. “Si on me demandait de céder sur ce sujet majeur pour la sécurité des Français, évidemment que je le refuserais”, avait expliqué le ministre de l’Intérieur au sujet de “la riposte graduée” qu’il appelle de ses vœux si Alger n’accepte pas de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière en France.
Riposte qui inclurait, “au bout”, une “remise en cause des accords de 1968″, qui donnent un statut particulier aux Algériens en France en matière de circulation, de séjour et d’emploi. “Il a déjà cédé, il s’est déjà soumis, il a déjà reculé et aujourd’hui il nous dit que parce que ça devient énorme, il va peut être partir”, a raillé sur BFMTV le vice-président du RN Sébastien Chenu. “Il n’a rien à faire dans un gouvernement dans lequel il est sous la tutelle (du) bloc central”, a-t-il ajouté, exhortant le locataire de Beauvau “d’arrêter de faire croire aux Français qu’il aura des résultats”.
Interrogé un peu plus tôt sur CNews et Europe 1, le coordinateur des Insoumis Manuel Bompard a lui assuré qu’une démission de M. Retailleau “serait une bonne nouvelle pour la France”. Il a jugé que le rapport de force instauré par le ministre vis-à-vis de l’Algérie était “la plus mauvaise méthode si on veut obtenir des choses”.
Pour sa part, le Premier ministre François Bayrou a exclu toute “différence” d’appréciation entre son ministre, le président de la République et lui-même sur ce dossier. Emmanuel Macron “a exactement les mêmes indignations (…) sur le fait que, entre pays liés par un traité d’amitié et de +super-coopération+ en raison de l’histoire, il n’est pas possible d’avoir un refus de reprendre des ressortissants”. “Et donc il faut de la fermeté”, a-t-il martelé sur France Inter. Vendredi, le gouvernement a établi une première liste d’une soixantaine de ressortissants algériens qu’il souhaite expulser. Celle-ci a été “passée hier” (samedi) au gouvernement algérien, a précisé M. Bayrou.
Source : https://www.7sur7.be/