Il y a comme un vent de déroute sécuritaire qui souffle sur le pays. Chaque jour apporte son lot de morts, ses blessés et surtout ses violences aveugles.
Faute de commandement politique avisé, notre Armée s’enlise et paie le prix fort au quotidien. On a l’impression qu’elle évolue dans un environnement sans visibilité, dans le noir total. Analyse.
Dans un rapport faisant l’état de la violence au Mali sur les trois derniers mois, les Nations-Unies dénombrent 52 soldats maliens et 13 casques bleus tués, elles y mentionnent également 72 soldats et 32 casques bleus blessés. A ce rapport des Nations unies, il convient d’ajouter le bilan de 1300 personnes tuées, fournit par le PARENA (Parti pour la Renaissance Nationale) pour se faire une idée complète de la situation sécuritaire dans notre pays.
Depuis une semaine, le Mali est devenu un pays de départ du terrorisme vers certains de nos voisins. La semaine dernière, l’attaque contre le camp de réfugiés maliens au Niger dont les auteurs sont partis de notre pays et sont y revenus ; l’attaque du poste de police d’Intagom au Burkina Faso par des assaillants qui se sont retirés au Mali, viennent attirer de nouveau l’attention du monde sur l’inefficacité du dispositif sécuritaire face à la folie meurtrière qui nous est imposée.
C’est peu dire que cette situation agace et révolte, le monde diplomatique qui suit l’évolution désespérément dangereuse de cette violence.
En vérité, au regard de la prolifération des mouvements armés ces trois derniers mois et leur propension aux règlements de compte communautaires, rien n’indique qu’un éventuel retour de l’Administration à Kidal soit la fin de nos problèmes d’insécurité.
Dans un contexte où la militarisation des esprits fait se replier sur elles-mêmes toutes les communautés touareg en se constituant en groupes armés, il faut plus qu’une présence symbolique de l’Administration pour mettre fin à la violence récurrente.
La proclamation du Mouvement pour le Salut de l’Azawad(MSA) ; la création, puis la dissolution refusée de l’instable Coalition du peuple pour l’Azawad (CPA) étaient un mauvais signal pour la paix entre les communautés et surtout pour l’accord d’Alger.
Un « Congrès pour la Justice dans l’Azawad » est crée, il se réclame de la communauté Kel Ansar, ses alliés, en prenant acte de leur exclusion, l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Il est dirigé par l’insignifiant Hama Ag Mahamoud, celui-là même qui avait été pré-positionné dès octobre 2011 à Nouakchott pour devenir le premier président de l’improbable république de l’Azawad.
Sous l’influence de l’aile militaire du MNLA, Hama Ag Mahamoud a été proprement viré de ce mouvement par Nina wallet Intalou en juin 2012. Depuis il rumine sa revanche. Pour sûr la création de ce fantomatique « Congrès pour la Justice dans l’Azawad » est un autre signal de l’implication plus affirmée d’un Etat étranger dans la manipulation communautaire dans notre pays.
Un Etat périphérique au service de la famille
Pour compléter ce tableau, sous la houlette de l’association Temedt la zone de Gossi tient son Forum le 29 au 30 septembre 2016, elle réclame sa région avant peut-être de prendre les armes demain pour « promouvoir et protéger les droits humains. »
Tous ces mouvements viennent s’ajouter aux groupes déjà existant. Il ne fait aucun doute que derrière tous ces sigles se cachent les intérêts communautaires, personnels et des calculs politiques. L’impasse dans laquelle se trouve le processus de paix, favorise tous les jeux d’ombre autour de ces groupes armés.
La fragmentation actuelle de la rébellion était prévisible, mais elle n’était pas désirable, l’amateurisme et l’attentisme du Pouvoir IBK y ont contribué.
Le tragique est que face à la désintégration de toutes les composantes de la rébellion, l’Etat sous IBK n’assure que le service minimum, il reste un Etat périphérique au seul service de la « famille d’abord », des intérêts de clan.
Seule l’incompétence du pouvoir IBK explique le sort que subi le Mali. L’ambassadeur des Etats-Unis s’énerve et son sort de son devoir de réserve en tançant le Gouvernement.
Face à l’incompétence avérée à ses yeux du pouvoir malien, le Président François Hollande qui a un bilan de son intervention dans notre pays à présenter aux français dans quelques mois, veut faire le boulot à notre place.
Les militaires français conduiront les patrouilles mixtes pour le « retour de l’Administration » dans les régions du nord. L’échec du proconsul n’en sera que plus patent.
Mais plutôt que d‘en prendre conscience, le régime dans sa déroute sécuritaire est dans une fuite en avant. Il n a que la désinformation pour toute réponse.
Les sottisiers des titres commandités dans une certaine presse cherchent à cacher la mise au ban de la communauté internationale d’un régime incapable auquel le Conseil de Sécurité appelle à ses responsabilités premières dans la restauration de la sécurité à chacune de ses sessions.
A grand renfort de titres-chocs, le régime s’emploie à présenter notre pays comme le nouveau centre des ballets diplomatiques des grandes puissances. Ces titres mettent en exergue ce qui dans toute nation qui se respecte paraitrait pour une offense.
Peut-on prendre la visite de l’équivalent d’un Secrétaire Général de nos ministères dans notre pays pour un succès diplomatique ?
Ainsi dans la lutte contre le terrorisme, la Russie serait prête à aider militairement le Mali, Cette aide se traduirait par la fourniture d’armes et la formation des militaires.
A qui fait-on croire que sans l’aval du gouvernement français qui porte à bout de bras le régime IBK depuis trois ans, le Mali pourrait s’engager à acheter des armes nécessaires à la Russie pour la défense de notre pays ?
De même, peut-on faire croire que notre gouvernance est prise au sérieux quand l’Allemagne qui a parrainé l’adhésion du Mali aux Nations-Unies, construit au Niger une base militaire en « appui » à la Mission militaire onusienne qui évolue au Mali, dans laquelle mission son pays dispose de 650 soldats.
En vérité, la visite dans le Sahel de la chancelière Angela Merkel était destinée au Niger, les convenances diplomatiques l’ont amenée au Mali.
Tout le reste n’est que désinformation et cache-sexe d’une diplomatie en panne. Entre le ridicule, l’impasse et la confusion, le pouvoir IBK reste-t-il dans l’incapacité de dégager un horizon de paix, fait de sécurité pour le peuple malien. Il s’initie désormais à la désinformation comme mode de gouvernance.
Souleymane Koné
Ancien Ambassadeur
Source: L’Aube