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Le Mali d’Ibk : Un pays paralysé par les scandales

Jamais au Mali un régime n’a connu autant de soubresauts sur fond de dossiers accablants que sous Ibrahim Boubacar Kéïta. De l’arrivée au pouvoir du président IBK, en septembre 2013, à nos jours, le Mali tourne au rythme de scandales financiers qui paralysent le fonctionnement de l’Administration, asphyxient l’économie et ternissent l’image du pays. Achat d’avion de commandement, contrat d’armement, accusation de connexion avec un parrain de la mafia, sanctions des bailleurs de fonds notamment le Fmi, infestation du pouvoir par la famille, rénovation de résidence privée, surfacturations, tout y passe. Chronique d’une série d’affaires sales.

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« Le Mali est la traîne », diront certains. Pour d’autres, « le pays va aussi mal, sinon plus mal qu’aux premières heures du 22 mars 2012 ». Un troisième groupe d’observateurs de la vie nationale prouvera facilement que le pouvoir d’achat du Malien, voire la situation d’ensemble du pays, étaient meilleurs sous la transition de Dioncounda Traoré que maintenant.

Ces jugements alarmants, qui reflètent ce que les Maliens pensent réellement du pouvoir d’IBK, sont d’autant plus inquiétants qu’ils prouvent que le Mali n’a pas fait le moindre pas en avant depuis les événements du 22 mars. Au contraire, en un peu plus d’un an de gestion, les indicateurs de croissance du pays ont considérablement régressé sur tous les plans. Mais surtout, la République est éclaboussée par des scandales aussi graves et humiliants que l’affaire Tomi Michel, celles de l’avion présidentiel et du contrat d’armement et, tout récemment, la découverte des surfacturations, une honte nationale. D’autres dossiers liés aux nominations controversées et aux dépenses de prestige du locataire de Koulouba viennent, eux aussi, meubler un salon présidentiel bourré de pièces à scandale.

 

 Tomi, mon ami !

Le président Ibrahim Boubacar Kéïta le reconnait, Michel Tomi est son ami et frère. Michel Tomi est un richissime corse et sulfureux homme d’affaires qui traîne un lourd passé étant condamné en 1976 dans une affaire de détournement de fonds dans un casino en France. La fortune de l’homme qui a implanté le PMU en Afrique et qui détient un casino à Bamako, fait l’objet d’enquêtes judiciaires.

 

 

Cette affaire a été révélée par le quotidien français Le Monde dans sa parution du 28 mars, justement au même moment où les scandales d’armement et d’avion faisaient rage au Mali. Simple coïncidence ou acte délibéré ? Toujours est-il que le nom du président IBK est cité dans le dossier, créant l’émoi dans les milieux politiques, diplomatiques et administratifs maliens, et bien sûr au sein même de la population malienne.

 

Plus précisément, Le Monde révèle que deux juges et des dizaines d’enquêteurs sont aux trousses de l’homme d’affaires corse Michel Tomi, à la tête d’un empire industriel en Afrique, qui serait le dernier « parrain des parrains » français. Le journal poursuit que « l’’affaire risque même de provoquer de forts remous dans les milieux diplomatiques, avec la mise en cause pour corruption du président malien, Ibrahim Boubacar Keita, dit IBK ».

 

 

Selon les informations du Monde, depuis le 25 juillet 2013, date de l’ouverture d’une information judiciaire par le parquet de Paris pour « blanchiment aggravé en bande organisée », « abus de biens sociaux » et « faux en écriture privée », les juges Serge Tournaire et Hervé Robert enquêtent en toute discrétion sur Michel Tomi, son groupe industriel Kabi, mais également sur ses réseaux politiques. L’homme est soupçonné de blanchir en France une partie de l’argent gagné en Afrique. Et de financer des présidents africains parmi lesquels IBK, les présidents gabonais, Ali Bongo, tchadien, Idriss Déby Itno et camerounais, Paul Biya.

 

 

Plus tard, d’autres révélations jailliront que certains des voyages et séjours d’IBK, notamment à l’hôtel Royal Monceau (le prix négocié d’une suite présidentielle au Royal Monceau est de 12 millions de FCFA, la nuitée) et dans une clinique marseillaise auraient été pris en charge par Michel Tomi et ses hommes, à qui des passeports diplomatiques maliens auraient même été délivrés. Le corse aurait été aperçu à Bamako pendant la campagne présidentielle, à l’investiture du président IBK et depuis.

Aujourd’hui encore, le peuple malien attend que le président s’explique à propos de ses liens avec son ami, le « parrain des parrains ». Mais rien!

 

Le marché le plus controversé de l’histoire…Et l’avion…

L’affaire Tomi a laissé coi plus d’un Malien. Parce que personne ne voyait IBK, le chantre de la lutte contre la corruption et musulman pieux, mêler à une affaire maffieuse. L’opinion était donc divisée, donnant un peu de répit au président. Mais pas pour longtemps. Puisqu’au même moment, était révélée aux Maliens et au monde entier la nature d’un marché de gré à gré de 69 milliards de FCFA attribué par Ibrahim Boubacar Kéïta, en violation des règles des marchés publics, à un proche de la famille présidentielle, Sidi Mohamed Kagnassy, directeur général de la société Guo-Star Sarl et promu aussitôt après conseiller spécial du président.

 

Avec l’avenant, le marché a finalement porté sur 108 milliards de FCFA. Le fait que le marché soit attribué de gré à gré est un piétinement flagrant des principes élémentaires de passation de marché public. Pire, dans le même contrat, les Maliens apprendront que  le ministre des Finances a couvert ce marché par  une garantie de 100 milliards de francs CFA. En clair, l’Etat a payé la caution de l’adjudicataire à sa place. Ce qui a provoqué l’ire du FMI qui a retiré en son temps le dossier du Mali à 48 heures de son Conseil d’administration statutaire sur l’appui budgétaire.

 

Justement, les bailleurs de fonds avaient aussi l’Etat dans le collimateur à cause de l’affaire dite de l’achat d’un nouvel avion présidentiel. En effet, hors de toute inscription budgétaire,  20 milliards de francs CFA ont été sortis des caisses de l’Etat pour acquérir un Boeing 737 non encore immatriculé au nom du Mali, alors même que le pays dispose d’un avion présidentiel (Boeing 727) en bon état et dont l’assurance contractée auprès de l’assureur londonien, Allianz, avait été renouvelée jusqu’en 2015.  Pour les Maliens et les bailleurs de fonds, c’est moins l’achat proprement dit de l’avion qui pose problème, que le contexte (la crise qui secoue le pays) et les conditions douteuses de son acquisition pour le confort personnel du président et celui de sa famille.

 

Il n’en fallait pas plus pour irriter d’avantage les bailleurs de fonds, fondamentalement le Fmi qui a saisi les autorités maliennes pour en savoir plus sur la provenance des ressources qui ont été injectées dans le contrat d’armement et l’achat de l’avion présidentiel. Le Fmi a suspendu son aide budgétaire au Mali, imité en cela par la Banque mondiale et l’Union européenne.

 

Le Bureau du Vérificateur général est commis par le Fmi pour auditer ces affaires, ainsi que la section des comptes de la Cour suprême par le gouvernement malien. Les rapports de ces deux structures de contrôle sont accablants : des surfacturations comprises entre 29 milliards et 38 milliards sont décelées, plaçant à nouveau sous les projecteurs le Mali, en quête de redorer son blason.

 

Face aux preuves palpables de surfacturation, les autorités font amende honorable devant le Fmi, qui accepte de lever ses sanctions, mais à la condition sine qanun que le président IBK sévisse : publier les audits pour le peuple malien et le Fmi lui-même, sanctionner les agents indélicats, faire tomber des têtes au sommet. Quel affront pour un Etat SOUVERAIN que de devoir se plier face à des injonctions d’institutions, aussi financières soient-elles !

 

Nous ne ferons pas l’injure à nos lecteurs en encombrant leurs esprits avec des dossiers comme le poids de la famille présidentielle dans la gestion du pouvoir ; les coûts de la rénovation de la résidentielle privée et du palais de Koulouba ; l’imitation de la signature du président par des conseillers ; le remue-ménage au cabinet présidentiel etc. Autant d’actes et/ou de pratiquent qui paralysent actuellement le Mali.

 

 

Sékou Tamboura

SOURCE: L’Aube  du   20 oct 2014.
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