De 1968 à nos jours, le Mali n’a jusqu’à présent pas retrouvé son élan de développement amorcé par le président, Modibo Kéita, en 1960. La politique actuelle : faire du nouveau avec de l’ancien, à travers le changement des tenues militaires en vestes et boubous blancs et celui de bureau en bureau ont permis de tuer les signaux de notre développement.
Arrachée à la somme de luttes farouches des intellectuels de l’époque dont Mamadou Konaté, Modibo Keita, Fily Dabo Sissoko, Hamadoun Dicko et autres, l’indépendance du Mali a connu une existence très éphémère. Pendant huit ans, avec un régime purement socialiste, le Mali a connu un développement économique et industriel jamais égalé. Il a connu son plus grand épanouissement culturel et social. Le Mali accéda à l’Indépendance dans tous les sens, une indépendance économique avec la monnaie malienne et politique par sa souveraineté nationale et internationale.
Malgré ce progrès, le Mali gisait en même temps sous une dictature inédite avec l’émergence d’un parti unique et la concentration des pouvoirs entre les mains du seul gouvernement. Cela entraîna un coup d’Etat militaire dirigé par un certain jeune Moussa Traoré. C’était en novembre 1968. Ce putsch militaire mit fin au régime socialiste et une IIème République vit le jour.
De 1968 à 1991, pendant vingt-trois ans, le Mali va connaître les grandes raisons de son retard à la course mondiale du développement. Avec quatorze présidents dont les quatorze membres du Comité militaire de libération nationale (CMLN) et un super-président, le général Moussa Traoré, le Mali va perdre le peu de développement qu’il avait acquis, sous Modibo Keita. Toutes les usines, entreprises étatiques et industries créées par le régime socialiste, vont être liquidées. Economiquement le pays va sombrer très profondément.
Vestes et boubous blancs à la place des tenues militaires !
Pendant ces vingt-trois ans, sur le plan politique, une dictature farouche va terroriser les Maliens. Le pouvoir sera concentré entre les mains des putschistes. Après on assistera à la naissance d’un parti unique dont les échos vont éveiller le désir vaillant de la démocratie chez tous les Maliens et Maliennes. Un sursaut populaire va renverser le pouvoir militaire pour instaurer un régime démocratique. Et le 26 mars 1991 marqua la fin du régime militaire du général Moussa Traoré et sa bande de quatorze. La IIIème République vient de naître. Un départ démocratique boitillant est entamée…
Fauchée dès le départ, la IIIème République, qui aurait dû être bâtie sans ceux qui ont participé à la gestion catastrophique du pays sous Moussa (1968-1991), va recruter les mêmes personnes. Un nouveau départ avec les mêmes personnes se promet. Un vote démocratique va amener Alpha Oumar Konaré au pouvoir. Les agents de Moussa Traoré ont juste eu besoin de changer de costume, passant de la tenue militaire à la veste et au boubou blanc, pour venir récupérer les fauteuils de gouvernance.
Le bonheur tant promis demeurera un rêve inaccessible. La IIIème République va connaître plusieurs mandats présidentiels. Les deux premiers mandats du président Alpha Oumar Konaré de 1992 à 2002, ont permis au Mali de s’offrir des institutions démocratiques. Même si au fond cela reste nuageux jusqu’à nos jours, la séparation des pouvoirs commence à se faire sentir. Ce premier régime démocratique a pu donner aux Maliens des institutions démocratiques et une atmosphère politique décentralisée. Malgré de grands efforts, les institutions et la décentralisation n’ont existé que dans la forme, au fond, la gestion demeurait toute autre.
Un népotisme, un favoritisme et une négligence exagérés !
D’autres élections vont amener un ancien chef militaire à la tête du pays, le général Amadou Toumani Touré, le même qui a piloté la période transitionnelle avant le régime démocratique 1991-1992. Était-ce un jeu de ‘’donnant-donnant’’ ? Une question que beaucoup de Maliens se sont posés à l’époque. ATT fît deux mandats de 2002 à 2012. Pendant cette période, même si au sommet de l’Etat des coups nocturnes faisaient des frustrés par-ci et par-là, la vie du citoyen lambda a connu une grande stabilité. Des grands sentiers ont été entamés, le développement était en cours. Des infrastructures ont vu le jour. Le Mali était réellement en marche d’un coté. D’un autre, un népotisme, un favoritisme et une négligence exagérés, étaient décriés. Mais le Mali était en marche sur beaucoup de plans.
Malheureusement, une autre réalité va rattraper le grand Mali, celle des régions du nord, longtemps délaissées et oubliées par les deux dernières Républiques. Le printemps arabe en Libye va donner naissance à une rébellion séparatiste concernant les trois régions du nord connues par leur sous-développement commun. Cette rébellion va prendre toutes les couleurs, entre séparatisme, djihadisme et terrorisme. Le Mali vivra une tragédie énorme avec une crise multidimensionnelle de rébellions, d’attaques djihadistes, et d’un coup d’Etat militaire. Un autre grand recul va intervenirdans l’histoire du Mali.
Grâce au sang-froid malien et aux efforts surhumains de tous et surtout des communautés et organisations sous-régionales et internationales, le Mali a pu se stabiliser. Une année seulement après cette crise à plusieurs dimensions, le Mali est retourné à une existence constitutionnelle et démocratique, par un vote qui a porté Ibrahim Boubacar Keita à la présidence de la République du Mali en septembre 2013.
Après son élection, IBK, pendant son premier quinquennat (2013-2018), va tenter de remettre le Mali sur les rails. Il va trouver une issue à la crise politique par l’Accord de Paix issu du processus d’Alger. Cet Accord va mettre à genou la rébellion séparatiste, mais celle du djihadisme ne connaitra aucun repli. L’Accord de Paix n’arrive pas à être appliqué en intégralité pendant ce premier mandat.
Un second mandat très contesté par l’opposition, lui est accordé le 4 septembre 2018 avec comme principal défi la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la réconciliation afin de redonner un autre départ égalitaire à tout le Mali.
Mettre fin à la politique du « Qui est fou ? » !
De nos jours, le Mali vit sous une véritable tutelle, une assistance totale sur tous les plans. La signature des coopérations militaires avec certains pays et les différentes injonctions des communautés internationales à l’Etat malien dans les cas tels que la mise en œuvre de l’Accord de paix, l’autorisation des manifestations politiques récentes de l’opposition et l’ouverture des poursuites judiciaires contre des présumés coupables d’exaction dans le rang des forces de l’ordre au centre du pays pousse à se poser cette question : faudrait-il réellement parler d’indépendance ? Non !
D’autre part, entre Maliens, ne devrons-nous pas accepter d’enterrer les haches de guerre, de former un gouvernement d’union nationale, d’entamer des assises inclusives avec des hommes et des femmes aptes, de faire un bilan du passé, de détecter les défis et de dégager les perspectives pour un réel développement du Mali ?
N’est-il pas temps, de mettre fin à cette politique du « Qui est fou ? » selon laquelle« l’autre a volé, je vole aussi »(la politique de l’autruche (un oiseau) et non de l’Autiche (un pays) consiste à refuser de reconnaître les défis, les dangers et de faire croire que tout va bien même si tout va mal), pour mettre en avant l’avenir du Mali ? Quelque soit le temps que cela prendra, la vérité rattrapera toujours. Il est temps de travailler pour une vraie indépendance politique, économique et culturelle, avant que l’histoire ne nous rattrape de nouveau. Nous n’avons que le Mali en commun.
L’Accord de Paix issu du processus d’Alger ne serait-il pas, ce rempart pour un autre Mali développé, indépendant et égalitaire ?
Vive le Mali !
La Rédaction