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Le Mali à la croisée des chemins : L’Union ou le chaos

Le Dr. Hamed Sow fait partie des rares leaders qui font l’unanimité au Mali sur leur compétence. Nanti d’un diplôme de l’Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN) de Saclay (France) et d’un Doctorat en Économie de la Production de la célèbre Université de Paris IX – Dauphine, Dr. Hamed Sow a connu une riche carrière professionnelle. D’abord au niveau international pour avoir fait ses débuts dans de grands cabinets de conseil en France. Ensuite, il fut expert détaché auprès de la Commission européenne à Bruxelles et assistant technique principal du ” Projet Énergie II ” de la Banque Mondiale au Niger. Il finira sa carrière internationale comme directeur général du CDE à Bruxelles, une institution commune du Groupe des 77 pays ACP et des 25 membres de l’UE. Rentré au Mali, il fut ministre des Mines, de l’énergie et de l’eau. A sa sortie du Gouvernement, il devint aussitôt Pdg du Groupe Arama/Amic-Invest, une société d’intermédiation financière basée à Dubaï. En mai 2011, Dr. Hamed Sow fut nommé Conseiller spécial du président de la République du Mali, en charge des infrastructures, des équipements et de l’investissement et cela jusqu’en mai 2012, date à laquelle il lança son mouvement politique, le Rassemblement Travailliste pour le Développement (RTD). Aujourd’hui, l’économiste malien dirige une FinTech, dont le siège continental est à Lomé, qui diffuse des moyens de paiement très innovants et adaptés aux besoins des populations africaines. Fidèle à sa doctrine “ne parler qu’en connaissance de causes et lorsque cela est utile”, l’homme s’était enfermé dans un silence total depuis la dernière élection présidentielle. C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que nous publions la tribune de ce grand connaisseur de l’économie mondiale, de la finance internationale, mais aussi et surtout de tout ce qui concerne le Mali. Elle sera suivie d’une grande interview dans les prochains jours.

ous pensons que le diagnostic est quasi-unanimement partagé par tous les Maliens et par tous les observateurs : notre pays est aujourd’hui confronté à une crise qui scie les fondements mêmes de son existence. Une crise multidimensionnelle : sécuritaire, socioéconomique et sociétale.

Nous sommes à un tournant déterminant de la vie de notre nation. Il pourrait se mouvoir dans un des scénarios ci-dessous.

(i) Le régime reste inaudible au désarroi et la colère de plus en plus grandissante de la majorité de la population. Il ne pourrait pas tenir plus de 3 ans. L’entêtement à se maintenir dans l’impopularité engendre la dérive autoritaire, qui elle-même crée les conditions de la révolte populaire.

(ii) Le soulèvement populaire aussi est très risqué. Du fait de la misère de nos populations, de la désespérance de nos jeunes, le risque d’un pillage généralisé est quasi-certain. Les hordes de révoltés déferleront dans les villas, les magasins, les services… La révolte populaire ne serait pas que politique, mais beaucoup plus alimentaire. Dieu seul sait, comment cela pourrait se terminer.

(iii) Par un Coup d’Etat ? Que Dieu nous en préserve ! Il ne pourrait qu’être sanglant, compte-tenu du contrôle par le régime des hauts commandements des forces de défense et de sécurité, décriés eux-mêmes par une partie de leurs troupes. Une armée en guerre qui se tire dessus ouvre un boulevard aux forces ennemies. Dans le meilleur des scénarios, cela nous ramènerait à la case-départ de 2012.

De cette analyse rapide, il apparaît qu’il n’y a pas d’alternative souhaitable à l’Union du plus grand nombre des responsables politiques, des décideurs économiques et des leaders d’opinions pour agir ensemble pour la sauvegarde du pays. Le temps n’est plus aux diagnostics sans cesse répétés, aux grands discours de plus en plus inaudibles, aux critiques incessantes, mais sans suite réelle. Le temps n’est pas non plus dans nos petits calculs personnels ou des groupes espèrent profiter du système. Celui-ci n’a pas d’avenir dans la continuité. Il faut un sursaut, une unité d’action de toutes les bonnes volontés. Beaucoup d’entre-nous disent qu’“il faut faire quelque chose pour éviter le pire au pays”. Mais quoi et comment ?

A travers le Dialogue National Inclusif ? Si l’intention est louable, le format bien conçu, les facilitateurs et le secrétaire du comité de pilotage bien choisis, j’ai bien peur qu’il soit fort probable que ce Dialogue soit mort-né. Du fait principalement de l’absence du principal groupe de l’opposition politique (FSP) et de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) qui n’ont toujours pas confirmé leur participation. De surcroit, les principes préalables portant sur l’acceptation du caractère laïque et l’intégrité territoriale du pays, la contribution à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale de 2015 (Processus d’Alger), la réforme constitutionnelle, indispensable à la mise en œuvre de l’Accord sont loin d’être partagés par certains acteurs majeurs de la scène politique. Un exemple simple : l’opposition n’est pas d’accord sur l’Accord dit d’Alger dans ses dispositifs actuels. Par ailleurs, il a fallu une simple allusion du président de la République à la possible révision de quelques articles de l’Accord pour que la CMA suspende sa participation au Comité de suivi de la mise en place dudit Accord. L’Algérie, “parrain” de l’Accord vient de reporter la tenue du Comité de suivi. Rien n’indique que les nouvelles autorités algériennes, issues de l’élection contestée ou de la révolution, s’investissent dans la résolution de nos problèmes. Enfin, la durée du Dialogue aussi semble poser problème : de trois à dix-huit mois. Le temps ne joue pas en faveur du Mali du fait de tous les périls actuels. L’hérédité sociale de ce pays fait que nous avons l’habitude de ces “grands massala” pour paraphraser le président de la République, à l’issue desquels de belles résolutions sont prises et remises aux plus hautes autorités. Et le jour du lendemain, des semaines, des mois… après en définitive rien ou pas grand-chose.

La seule solution réelle réside dans le dialogue, la définition d’une feuille de route claire, la mise en place d’un gouvernement crédible, le choix des responsables civils et militaires compétents et engagés … entre et par le président de la République et le chef de l’Opposition. D’abord comment arriver à ce dialogue direct des deux leaders devant porter sur une vision partagée sur la situation réelle du pays, sur des d’objectifs concrets de sortie de crise et sur une feuille de route pour les 3 prochaines années ?

D’abord, il convient de préciser qu’il ne s’agit pas de dire au président de la République ce qu’il doit faire. Nous savons qu’il n’aime pas ça, surtout venant d’un jeune frère “rebelle”, opposant et très critique. Nous tenons cette posture de nos grands frères (dont IBK, lui-même) de l’AESMF (Association des Etudiants et Stagiaires Maliens de France) et de la FEANF (Fédération des Etudiants d’Afrique Noire Francophone) qui nous ont appris à ne rien mettre au-dessus de l’intérêt de nos pays. Dogo, aucun des sacrifices ne serait de trop pour le Mali” se plaisait à nous répéter le Koro. Alors, qu’il souffre d’accepter que nous puissions lui dire la vérité lorsque ça ne va pas au pays dont il a aujourd’hui la destinée entre les mains. Ne sont pas forcément de bons jeunes frères (ou de bons fils) ceux qui l’abreuvent de mensonges, qui lui camouflent certaines réalités, qui l’isolent en empêchant tout contact avec tous ceux qui ne sont pas de leur clan.

Pour revenir sur l’Union, la plus grande responsabilité revient au 1er des Maliens. En tant que Chef de la Famille Mali, il lui revient de s’élever contre les mauvais esprits en lui-même et autour de lui. Lorsqu’il y a le feu dans la maison, le chef de famille ne cherche pas à faire de distinction entre ses fils préférés et les autres. Il crie : les enfants, levez-vous et éteignez le feu. Il n’a pas le temps d’attendre la fin du “massala”. Qu’il appelle son jeune frère Soumaïla Cissé, comme il l’avait fait en février et mars de cette année pour discuter et s’entendre sur une vaste Union opérationnelle pour sauver le Mali. Le cas contraire, que Soumi, comme il l’avait fait avec brio en août 2013 en allant féliciter IBK avant même la proclamation des résultats, aille voir son grand frère et lui dire : “Je suis à votre service pour l’intérêt supérieur de ce pays que nous aimons tous”.

IBK président, Soumaïla Cissé Premier ministre, le ticket gagnant

Pas de caméra, ni de griot. Voyez-vous en secret, discutez entre vous et vous trouverez un accord parce que ce qui vous unit est beaucoup plus fort que le peu qui vous sépare, s’agissant de la sauvegarde de notre pays. Ceci est d’autant plus facile qu’il n’y a pas d’animosité entre vous. Vos pères ont été des amis, nous apprenait le Président en 2013. Le respect et la courtoisie ont toujours guidé vos rapports.

De surcroît, il y a une complémentarité entre vos profils : le grand frère est un Politique et le jeune frère est un Technocrate, chacun restant dans son rôle, ce duo complémentaire est sûrement gagnant.

Une Union n’est durable que si elle part sur des bases claires. Celle que nous proposons repose sur une alliance avec IBK comme président de la République, chef de l’Etat et Soumaïla Cissé, Premier ministre, chef du Gouvernement. Les objectifs globaux pour le redressement national font déjà l’objet de larges consensus. Ils portent principalement sur (i) la constitution d’un gouvernement crédible, (ii) le choix d’hommes et de femmes compétents pour diriger les directions des services administratifs et des sociétés mixtes, si possible sur la base d’appels à candidature ouverts aux Maliens de l’intérieur et de la diaspora, (iii) la recomposition par le président de la République de la haute hiérarchie des forces de défense et de sécurité, (iv) la dotation effective de l’armée nationale d’importants moyens humains et matériels, accompagnée par le renforcement des programmes d’entrainement et de remotivation de nos combattants, (vi) la contribution au renforcement du G5 Sahel, la réévaluation et au besoin l’adaptation de nos partenariats avec les forces étrangères dans la lutte contre le terrorisme, (v) le recadrage du Dialogue National Inclusif avec des objectifs clairs, simplifiés et atteignables rapidement dans le temps, (vi) la relecture et  l’adaptation de certains articles de l’Accord dit d’Alger, notamment sur la décentralisation et la composition des nouvelles forces de défense et de sécurité, (vii) la révision de la Constitution nationale en vue de la mise en œuvre de l’Accord (revu) de Paix et de Reconstruction, (viii) le redéploiement des forces de défense et de sécurité nationale, ainsi que l’administration malienne dans la région de Kidal, dans les meilleurs délais, (ix) le renforcement de la lutte contre la corruption et la réduction de certaines dépenses non productives de l’Etat, (x) l’élaboration et la mise en œuvre d’un ambitieux programme de stabilisation et de relance de l’économie nationale, en mettant un accent particulier sur la formation professionnelle des jeunes sans emploi.

Tous, ou tout-au moins une grande partie de ces objectifs peuvent être atteints avec un Exécutif fort, engagé et soutenu par les populations. Lorsqu’un Pouvoir est fort, sérieux et soutenu, tout le monde le respecte. Nos frères signataires de l’Accord seront enclins à mieux travailler avec un Gouvernement d’Union nationale dont ils pourraient être une partie intégrante. Nos partenaires de lutte contre le djihadisme auront plus de considération pour un Exécutif crédible et plus enclins à intégrer ses points de vue. Pour parachever l’Union, le président de la République, dans sa magnanimité, en toute connaissance de cause et au bon moment, pourrait amnistier le Général Aya Sanogo et tous ses codétenus, mettre certains à la retraite et réintégrer d’autres dans l’armée, selon l’analyse des dossiers de chacun d’entre eux.  Le Mali reconcilié avec tous ses fils est gagnant de tout point de vue.

Raison par laquelle, nous en appelons aussi à nos trois plus grands leaders religieux, Mohamed Oueld Cheichne Haïdara (dit Bouye, le Cherif de Nioro), l’Iman Mahmoud Dicko (Guide fondateur de la Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants : CMAS) et le Guide Cherif Ousmane Madani Haïdara (du mouvement religieux Ançar Dine) – NB : l’ordre de citation n’a aucune importance – de se retrouver entre eux et de peser sur les deux leaders politiques pour arriver à l’Union sacrée. Et qu’ils en soient les garants.

Nous en appelons à nos anciens chefs d’Etat vivants, le Général Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaté, Amadou Toumani Touré, d’œuvrer à la réussite de l’Union sacrée. C’est en cela que Soumaïla Cissé était allé les voir au début de l’année. Ils sont tous les trois écoutés et respectés par les deux leaders. Nous en appelons à tous les décideurs politiques et économiques d’amplifier cet appel au sursaut national.

Nous en appelons à tous les lanceurs d’alerte, tous les animateurs de réseaux sociaux, tous les artistes (et l’icône de la musique malienne, Salif Keïta en tête), tous les communicants pour soutenir cette initiative. La critique est nécessaire en ce sens qu’elle sert à éclairer, mais en soit, elle ne bâtit pas un pays.  Le verbe peut permettre une prise de conscience, mais il doit être suivi d’actions positives.

Nous en appelons aux populations pour soutenir l’Union salutaire. C’est de l’action de tous que nous pourrions sauver notre pays et assurer un futur pour nos enfants dans un ensemble uni et viable.

Dr Ahmed Sow

Source: Aujourdhui-Mali

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