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La malédiction du franc CFA

Quand les peuples africains auront compris les méfaits du Franc CFA, ils descendront dans la rue pour exiger leur propre monnaie, disait Pr Agbohou, éminent économiste ivoirien. Selon lui, c’est cette lutte que mène Kémi Séba, l’activiste franco-béninois, expulsé,  du Sénégal, pour avoir brûlé, symboliquement, un billet de 5.000 CFA, lors d’un meeting, organisé à Dakar.

« Aucun pays ne peut se développer sans l’industrie. Or, le Franc CFA empêche les pays de la zone Franc de s’industrialiser, afin d’exporter leurs ressources agricoles et minières vers la France », rassure Pr Agbohou. C’était à la faveur d’une de ses nombreuses  conférences, organisées à travers le monde pour sensibiliser les Africains sur les méfaits du dernier vestige de la colonisation française en Afrique francophone : le Franc CFA.

L’exemple du Maroc, 6e économie d’Afrique

Des ex-colonies françaises, comme le Maroc, la Tunisie, le Cambodge, le Laos, le Vietnam… ont,  très tôt,  compris  que « le Franc CFA est plus un frein qu’un levier pour le développement », comme dit Pr Kako Nubukpo, ancien ministre togolais, lors d’un Forum Citoyen organisé au Gabon.
Excepté la Côte-d’Ivoire, la balance commerciale de tous les pays membres de l’UEMOA (Union Economique et  Monétaire Ouest-Africaine) est déficitaire. Il en est de même pour les pays d’Afrique Centrale ayant en partage le Franc CFA.
Un seul exemple : le Maroc. Membre de la zone, en 1959, avant de battre sa propre monnaie, le Dirham, le Maroc se classe,  aujourd’hui, à  la 6e puissance économique du continent africain.
Les autres pays, qui ont quitté la zone Franc, ne s’en portent pas mal non plus.
Créées et pilotées, à cet effet, par la France, «  les banques centrales africaines ne peuvent pas se dédouaner de tout ce qui passe en Afrique », ajoute Pr Kako Nubukpo. En clair, elles sont complices de la spoliation, dont nos pays font l’objet.

Franc CFA : un bénéfice  de 400 milliards de dollars par an  pour la France

Mesurant les risques qu’elle encourt, la France acceptera, difficilement, de laisser sauter la « dernière chaîne de la chaîne de la colonisation », qui maintient les ex-colonies françaises dans la servitude. La raison avait été donnée, pour la première fois, par Nicolas Sarkozy, ex-locataire de l’Elysée.
« La France quitterait la 7e pour la 23e puissance économique de l’Europe, si les pays africains francophones abandonnent  le Franc CFA », avertissait-il. C’était au cours d’une interview. Et Angela Merkel, la Chancelière allemande d’enfoncer le clou : « La France vole, chaque année,  à l’Afrique l’équivalent de 400 milliards de dollars, à travers le compte d’opération ». Un compte dans lequel, nos pays versent la moitié, ou presque, de leurs avoirs extérieurs pour, dit-on, garantir ce que la France appelle la « convertibilité » de son Franc CFA, qu’elle continue de « prêter » à nos pays. En somme, une escroquerie, qui ne dit pas son nom.
Logé au Trésor français, ce compte d’opération  contient des centaines de milliards d’euros, utilisés par la France pour s’assurer sa confortable 7e puissance économique en Europe ; au lieu d’aider les pays africains francophones à sortir du sous-développement dans lequel ils sont enfermés depuis plus de 50 ans. A juste raison, d’ailleurs.
Pour l’heure, seul Idriss Déby Itno, le président tchadien, a eu le courage de dénoncer cette « monnaie coloniale », qui hypothèque le développement de l’Afrique.  Craignant pour leur « trône », ses autres homologues africais  sont restés muets sur le sujet. Comme des cimetières. Aucun d’eux n’a osé lui emboiter le pas. Au risque, craignent-ils, d’essuyer les foudres de la France.
Convaincus que la solution ne viendra, peut-être jamais de leurs Chefs d’Etats, considérés à tort ou à raison comme les valets de la France, la jeunesse africaine se lance dans le combat. Afin de restituer aux pays africains francophones leur souveraineté, toute leur souveraineté. La contestation du Franc CFA embrase le continent africain.
Lasses de se faire spolier, par la France, les populations africaines maintiennent la pression sur leur Chef d’Etat pour battre leur propre monnaie. Immédiatement.

 8 secondes pour sortir du Franc CFA et 3 jours  pour battre  monnaie

Pour Pr Agbohou, c’est cette lutte que mène Kémi Séba,  l’activiste franco-béninois, expulsé, récemment, du Sénégal pour avoir brûlé, symboliquement, un billet de 5.000 CFA, au cours d’un meeting, à Dakar, pour dénoncer les « méfaits de cette monnaie ».
Pourtant, rassure Pr Agbohou, il faut 8 secondes pour sortir du Franc CFA et 3 jours pour battre monnaie. Les mécanismes sont connus. Ils sont à la portée des Chefs d’Etats africains, qui le désirent.
Quant à la « stabilité » de la nouvelle monnaie africaine, dont se gargarisent les « défenseurs  du Franc CFA », Pr Agbohou indique « qu’elle ne veut rien dire ».
Reste la volonté politique pour sortir du Franc CFA. Elle fait, cruellement, défaut auprès de nos Chefs d’Etats. Qui préfèrent éviter le sujet. Mais pas pour longtemps.
Connaissant les stratégies, utilisées jusque-là par la France pour faire échec à l’abandon du Franc CFA, les populations africaines sont, désormais, prêtes à tout pour retrouver leur souveraineté monétaire, retardée depuis 50 ans par l’ex-colonisateur. Avec la complicité de ses « Préfets »  maintenus, à dessein, à la tête de nos pays.

Oumar Babi

Source: Le Canard Déchaîné

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