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A la loupe : Marrant Mara

2014, avant son enterrement, aura été marqué par au moins deux faits majeurs  inédits : des malversations au sommet, qui coûteront plus de 29 milliards de F Cfa au trésor public, et deux préavis de grève générale de la plus grande centrale syndicale du pays, qui auraient pu causer un manque à gagner de plusieurs dizaines de milliards pour l’Etat. Et au lieu de répondre aux questions sur la mauvaise gouvernance institutionnalisée et le malaise social généralisé, le Premier ministre et son président tentent la diversion et le dilatoire.

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Dans une sortie devant Transparency international, Moussa Mara annonce l’ouverture d’un procès, en novembre, contre la corruption. Classé 127ème pays (sur 177) le plus corrompu de la planète Terre, le Mali avait décrété 2014 année de la lutte contre la corruption. C’était en guise de cadeau de bonne année, avant que le peuple ne découvre avec stupeur que 2014 aura surtout été l’année de la corruption. Pour cette fin d’année (et de règne aussi), le Premier ministre dit traduire devant la justice les auteurs d’actes de corruption. Qui seraient à la barre ? On peut facilement imaginer que c’est le menu fretin qui aura le plus à souffrir de cette soudaine soif de justice. Des petits fonctionnaires, donc, et leurs complices vont écoper pour des vétilles alors que les auteurs de la grande corruption seraient assurés de l’impunité. Or, ceux que visent justement Transparency international et le peuple volé, ce sont ceux-là mêmes qui ont fait passer à la trappe des dizaines de milliards. Voire des centaines car les montants avancés par le FMI et le Vérificateur général pourraient n’être que la face visible d’un gros iceberg enfoncé à plus de 20 000 lieues sous une mer opaque et fangeuse à transparence zéro.

Diversion et dilatoire

Ces personnes, suffisamment haut placées pour voler l’argent public ou percevoir des dividendes dans des marchés douteux, échapperont à la justice. Sauf celles qui, en plus d’être impliquées dans des transactions douteuses, ont commis  le « crime » de se brouiller avec les maitres du pays. Elles porteront le chapeau pour ne pas confirmer l’impression d’une justice sélective. Se laisseront-elles faire, dévoileront-elles tous les stratagèmes de ces savants montages financiers, diront-elles où sont passés les fonds publics qui ont servi de garantie à des fournisseurs douteux?

La deuxième opération de diversion et de dilatoire du gouvernement du marrant Mara, c’est le contrôle physique des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales, des conventionnaires et contractuels des services publics. Si cette opération se passait sans concussion ni corruption en cette année de corruption institutionnalisée, elle permettrait assurément d’enterrer définitivement des morts qui continuent d’émarger au budget de l’Etat, de guérir les faux grands malades qui perçoivent de l’argent public pour financer des entreprises privées, de démasquer des radiés ou des retraités par anticipation qui touchent régulièrement des salaires. La régularisation de la situation pourrait permettre à l’Etat de recouvrer beaucoup de manque à gagner. Mais il se trouve que le gouvernement, par cette opération, avait voulu saboter l’action de l’Untm (un préavis de grève de trois jours). La ténacité et la pugnacité de Yacouba Katilé et de ses camarades, ainsi que leur détermination à ne pas se laisser corrompre comme cela se faisait auparavant, ont eu raison de la ruse gouvernementale. Les négociations sont terminées avec un bon coup à l’actif du bureau syndical, et le gouvernement doit désormais s’apprêter à affronter l’autre centrale syndicale et les magistrats.

Une faillite personnelle

La deuxième raison de cette opération du gouvernement du marrant Mara, c’est que l’Etat n’aurait plus les moyens de payer tous les travailleurs à la fois. L’opération par vagues successives serait donc un moyen de payer, à chaque fois, quelques fonctionnaires en fonction des disponibilités fournies par la perception des recettes douanières et fiscales. Ce paiement à compte-gouttes va durer jusqu’au rétablissement des bonnes relations avec le FMI et les autres PTF. Tout cela n’aurait rien de marrant si le même Mara n’avait pas déclaré, dans ces colonnes, que le gouvernement avait les moyens de faire face au paiement des salaires, jusqu’à la fin de l’année, même sans l’apport du FMI. Le triste constat est qu’à cause de la mauvaise gestion du pays et de la cupidité de certains responsables, les caisses de l’Etat sont vides. La dette intérieure est colossale, les fonctionnaires ne sont pas assurés de percevoir leur salaire du mois d’octobre, les membres des cabinets ministériels (et même les ministres) sont sans salaires depuis plus de 6 mois. Le gouvernement peut-il remplir son contrat de performance dans ces conditions ?

Non. Présenté au début comme étant un brillant technocrate qui pouvait faire sortir le pays de l’ornière en tandem avec l’inusable politique IBK, l’expert-comptable s’est révélé un piètre gestionnaire du personnel et des biens de l’Etat. Une faillite personnelle. Qu’il en tire les conséquences.

Cheick Tandina

 

SOURCE: Le Prétoire  du   30 oct 2014.
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