La crise politique déclenchée par le mouvement de contestation M5-RFP a atteint son point culminant avec les tueries découlant des actions de désobéissance civile entamée le 10 juillet. Fort en symbole, les nouveaux « convertis au judaïsme militant malien », n’ont rien oublié dans l’imitation du prophète Moïse. L’estrade de la Place de l’indépendance pour le mont Sinaï, la voix de Madame Sy Kadiatou Sow à défaut du Seigneur pour éviter le blasphème, pour énoncer le Décalogue… rien n’a été oublié pour rapprocher l’action du M5-RFP de cette phase charnière du récit talmudique de la vie de Moïse. L’imitation se limite là ! Tout le reste a dérapé. On est tellement sorti de la voie classique de la résistance pacifique d’un peuple qu’on est amené à focaliser le débat sur le décompte des morts… découlant de la violence dont les responsabilités restent à situer car évidemment partagées.
Au débat « En toute franchise » organisé par l’ORTM le 24 juillet, Maitre Mountaga Tall pousse l’aplomb de dire que le M5-RFP n’est pas responsable des dérapages constatés lors de l’occupation par leurs militants des bâtiments publics. A l’entendre, on doit le plaindre et pour l’inconscience dans le propos et pour le machiavélisme de l’esprit. L’avocat qu’il est se refuse à la rigueur de l’article 1382 du code civil très clair sur la responsabilité civile selon lequel (article) on est responsable des actes commis à autrui par sa faute et celle des personnes sous sa responsabilité. Il n’a échappé à personne que c’est le M5-RFP qui a appelé les maliens déplacés massivement à la Place de l’indépendance à aller occuper les institutions et l’ORTM. Et pourtant la demande qu’ils aient faite au niveau du Gouvernorat, indiquait uniquement un rassemblement à un lieu fixe. Il découle de cet appel inconséquent que tout acte posé dans son sillage, est par effet logique imputable sans aucune nuance aux auteurs dudit appel. Que le M5-RFP assume ses actes et leurs conséquences, c’est ça la responsabilité. Dans un langage trivial d’une autre époque, on disait qui casse, paye. Sinon on ne les comprendra pas.
Quand toujours le même avocat et membre influent du M5-RFP se permet de dire que ceux qui ont cassé ne sont pas leurs militants, et en même temps il clame que c’est le peuple qui demande la démission du président, on voudrait lui demander alors quelle est la différence entre le peuple grand « P » qu’il revendique à cor et à cri et ces innombrables jeunes gens qui ont répondu à leur mot d’ordre? Le comble du ridicule! A défaut d’être cohérent il faudrait au moins éviter d’être cynique. C’est maintenant que le M5-RFP veut faire la différence entre ceux de leurs militants qui cassent et le peuple ; j’ai envie d’en rire. C’est ce peuple que vous revendiquez qui a bel et bien appliqué à la lettre les consignes d’occupation des lieux publics dont ont découlé à regret les sacs et autres types de violences. Alors il faut assumer !
Pourquoi le M5-RFP s’arc-boute sur la responsabilité des morts en omettant les actes de provocation qui ont conduit à l’embrasement. Les militants violents qui renforcent les rangs du mouvement n’ont jamais été dénoncés par lui et pis, ils sont la partie tranchante du couteau M5-RFP que le mouvement présente comme épouvantail. Si après ces saccages qui ont jeté l’opprobre sur le mouvement, M5-RFP vient à vouloir convaincre que ce ne sont pas ses militants, on est alors partagé entre l’incrédulité et le malaise. Incrédulité face au mensonge insupportable et malaise de la manipulation de jeunes gens sur lesquels on jette toute la responsabilité à la première faute. À la limite il faudrait tirer la leçon du lâchage d’une partie des militants par les responsables. Ceux-ci (les militants lâchés), doivent savoir à qui ils ont affaire. Vos leaders sont prêts à vous envoyer à la boucherie mais ne sont pas assez courageux pour vous défendre en cas de pépin.
Nul ne peut ni doit applaudir les morts. Que leurs âmes reposent en paix ! Que l’âme de toutes les victimes maliennes et étrangères au Mali repose en paix. Il y va du bon sens de l’humanité.
La désobéissance civile n’est pas une notion inventée au Mali et ne peut pas avoir une application dérogatoire au Mali. Quand on en vient à la décréter il y a lieu d’assumer tout ce qui s’y déroule sans sélectionner les actes positifs et rejeter sur d’autres les mauvais actes. Aucun malien n’était dupe quant au risque de dérapage que comportait cet appel à la désobéissance civile avec le mot d’ordre de blocage des institutions, des routes et de l’activité économique. Pourquoi ce jour où tous les voyants étaient au rouge, l’imam Dicko a brillé par son absence sachant pertinemment que sa présence pouvait à tout moment éviter des consignes de dérapage ? Ne l’a-t-il pas fait le 19 juillet ? Il dit ce jour qu’on pouvait être fort sans être violent, qu’on pouvait parvenir à ses fins sans casser, sans violenter. Ce jour, il a acquis les galons du leader. Oui, on ne casse pas le pays qu’on veut construire et diriger. L’histoire est plein de révolutions populaires qui ont tourné des pages sans les déchirer.
Le 10 juillet il a fait le choix de l’absence pour ne pas gêner l’intention du jour qui était la violence, la provocation, la bêtise. On a compris le jeu et ce n’est pas sincère. Pourquoi se dire pacifique quand on lance une foule de milliers de jeunes qu’on ne contrôle pas sur les institutions. Qui pourra croire désormais à la sincérité du mouvement quand il continue à se proclamer pacifique et en même temps encourager les jeunes à bloquer par la façon violente qu’on sait les villes et villages? Les stations d’essence, les maisons d’habitation privées, les voitures personnelles ne sont pas des biens publics… à occuper, casser ou détruire. S’en prendre à elles, revient à du brigandage, du banditisme urbain et du pillage … toute chose que la loi défend… cette même loi que M5-RFP prend pour argument à toute sa démarche. Il est très facile de jeter l’anathème sur l’autre l’accusant de la violence quand on a soi-même suscité cette violence. Dire que les militants n’ont rien endommagé à l’ORTM est une fourberie. Des milliers de personnes dans des locaux exigus, pourquoi y faire ? Les travailleurs en ont bavé… leurs biens endommagés, M5 peut-il dégager sa responsabilité dans cette présence massive, source de tout ce qui a suivi ?
Le M5-RFP n’invente rien en matière de désobéissance civile. Par l’Ahimsa (action de résistance pacifique indienne), le Mahatma Ghandi a fait plier la couronne britannique encaissant sa violence sans y répondre à aucun moment. Martin Luther King n’avait ni les moyens du KKK ni la masse populaire des racistes d’Alabama, mais la loi sur le vote des noirs a été bien acquise par la désobéissance civile dont le point d’orgue reste pour l’humanité son mémorable discours de Washington « I have a dream ». Que de provocation du Ku Klux Klan, que d’humiliation dans les bus dont Rosa Park porte le symbole… !mais ils ont résisté et vaincu. C’est ça la désobéissance pacifique et civile et non pas l’attitude qui confine à la lâcheté. L’attitude qui pousse à agir et à clamer plus tard n’être pas responsabilité des conséquences de ses actes.
Dans la lutte politique, aucun subterfuge n’est de trop pour arriver à ses fins mais il importe de tout assumer si on veut défendre avec argument sa crédibilité.
La Rédaction.
Source : Mali Kanou Avec INFO-MATIN