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La force militaire Takouba, dernière invention française

Le Premier ministre Edouard Philippe a ouvert, ce lundi 18 novembre, le sixième Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique, aux côtés du président sénégalais Macky Sall, en présence du ministre des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et de la ministre des armées Florence Parly.

La situation sécuritaire dégradée, notamment au Mali et au Burkina Faso, dominent les travaux.

Face à la dégradation de la situation au Mali, le ministère français des Armées vient d’inventer une nouvelle force militaire, baptisée Takouba, qui s’ajoutera aux six déjà présentes sur le terrain.

Ce sera donc la septième… Outre les Forces armées maliennes (FAMa), on compte en effet l’opération française Barkhane (4 500 hommes), l’opération Sabre spécifique au Commandement des opérations spéciales (quelques centaines), les casques bleus de la Minusma (15 000 hommes), l’EUTM-Mali, une mission européenne de formation de l’armée malienne (600 hommes) et la Force conjointe du G5-Sahel (de l’ordre de 5 000 hommes) formées par les cinq armées de la région.

Manifestement, cela ne suffit pas pour gagner la guerre contre les « ​Groupes armés terroristes ​​» (GAT). S’ils ne sont que quelques centaines, ils bénéficient d’un terrain local favorable, fait de misère, de trafics et de tensions communautaires. Emmanuel Macron cherche en vain une solution et il entend « ​​repréciser ​» bientôt le rôle de la force française Barkhane. Succédant à « ​Serval ​», les militaires français ont perdu 31 des leurs au Mali depuis janvier 2013 et le coût de l’opération s’élève à environ 700 millions par an, soit 2 millions par jour.

Tractations. ​

De passage sur la base française de Gao, le 5 novembre, la ministre des armées Florence Parly a annoncé la création d’une nouvelle « ​unité ​» européenne pour renforcer les capacités militaires maliennes. Elle prendra le nom de « ​Takouba ​», en référence à une arme traditionnelle dans cette région d’Afrique.

« ​Ce sabre armera les forces armées maliennes sur le chemin de l’autonomie et de la résilience ​», a promis la ministre. Sabre comme l’opération spéciale française au Sahel… Selon Florence Parly, il s’agira d’« ​une unité de forces spéciales européenne ​» qui « ​transmettront leur savoir-faire d’exception aux militaires maliens ​».

La ministre avait déjà évoqué cette initiative en juin, lors d’une visite au 4e régiment d’hélicoptères des forces spéciales à Pau.

« ​Takouba ​» sera lancé « ​dès 2020 ​», ajoutait la ministre. Sauf que rien n’est prêt et encore moins décidé. « ​Nous sommes très en amont, mais c’est bien emmanché ​», indiquent des sources militaires, qui parlent « ​d’accroître l’offre de service européenne ​».

Avec qui ? Pour l’instant, on n’en sait rien.

« ​Nous en sommes aux pourparlers et aux tractations ​», ajoute la même source. Une dizaine de pays européens ont été approchés, mais seule la petite Estonie semble avoir donné un accord ferme.

Les Estoniens ont déjà dépêché une centaine d’hommes au sein de Barkhane, essentiellement pour des missions de protection.

Parmi les pays cités, on compte la Finlande, l’Autriche, le Danemark, la République Tchèque, le Portugal, l’Espagne ou la Suède. « ​Certains sont intéressés et d’autres se sont déjà retirés », note une source proche du dossier. Les récentes déclarations du président Macron sur la « ​mort cérébrale de l’Otan ​», qui ont consterné plusieurs capitales, ne facilitent pas les choses.

La grande inconnue est évidemment la participation éventuelle de l’Allemagne.

La ministre de la Défense, Annegret Kramp-Karrenbauer, en difficulté politique, semble très allante sur les engagements extérieurs de son pays, mais le pouvoir de décision ne lui appartient pas. La possibilité d’une participation britannique est évoquée – la Royal Air Force mettant déjà trois hélicoptères lourds Chinook à disposition de Barkhane pour des missions logistiques.

Problème de langue.

Takouba sera placé « au sein de [l’opération française] Barkhane » sous la forme d’une CJSOTF, une « Combined Joint Special Operations Task Force », comme disent désormais les militaires français.

Vu de Paris, la participation française devrait surtout concerner l’état-major de Takouba. Cette mission devrait ressembler à ce que l’Otan – dont la France – avait mis en place en Afghanistan sous le nom d’OMLT (Operational Mentoring Liaison Team), des détachements occidentaux insérés dans les forces afghanes. « Il s’agit de former, de “mentorer”, d’accompagner l’armée malienne au combat ​», indique une source militaire.

Il devrait s’agir de plusieurs petites unités d’un volume de quelques dizaines d’hommes à chaque fois, capables d’assurer leur sécurité et leur logistique, au sein de l’armée malienne.

Le problème de la langue reste entier et les « ​Takouba ​» auront besoin d’interprètes.

Pas simple pour aller au combat. Au plus tôt, Takouba devrait être « ​pleinement opérationnel ​» à l’automne 2020. Car, après l’annonce de la ministre Florence Parly, tout ou presque reste à construire.

 

L’opinion

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