Dans la commune rurale de Baguinéda, les occupants des 227 hectares de la localité de Kognini ne dorment plus que d’un œil. Et pour cause ? Pas moins de 6000 habitations sont sous la menace pressante de déguerpissement d’une Agence immobilière, Prestige SARL. Cette menace de démolition est manigancée par Prestige SARL grâce à la complicité d’un ressortissant, Bougary TRAORE, un enseignant à la retraite. Comment cet enseignant est parvenu à endormir tout un village debout ?
Sur cette affaire, qui défraie la chronique dans la commune de Baguinéda et environ, depuis un certain temps, nous avons échangé avec le chef du village de Kognini, Fama TRAORE ; ses conseillers et les responsables de l’Association pour le développement du village de Kognini. C’était le samedi 7 octobre, à Kognini, un village de la commune rurale de Baguinéda qui fait frontière avec Niamana et situé au flanc de la colline.
Selon les explications des conseillers du chef du village, toute cette affaire est partie d’un projet bidon de transfert du village de Kognini, concocté par Bougary TRAORE, un ressortissant du village à la retraite. Dans ledit projet où il s’est royalement servi, pour noyer certains villageois, dont le chef du village, dans un premier temps, Bougary TRAORE, enseignant à la retraite de son état, présente dans une fausse lettre adressée à plusieurs ministres des réalisations colossales de 80 milliards de FCFA. Un projet qui sera réalisé avec ses partenaires américains ‘’Kingddown Train Foundation’’ en partenariat avec l’agence immobilière Salam SARL.
Le projet se présente comme suit : 2 usines de traitement des ordures ménagères et industriels avec les systèmes de turbine à vapeur ; la production d’électricité et d’eau potable capable de desservir une ville d’une population de plus de 800 000 habitants. La construction de ces usines coûte 15 600 000 FCFA. Toujours dans son projet, il note que le système d’aménagement du nouveau village de Kognini prévoit la viabilisation complète : eau, électricité, voiries, voies…
Aussi, est-il prévu la construction d’un lycée avec toutes les commodités dont le coût total est de 1 7 00 000, deux groupes scolaires dont la réalisation reviendrait à 421 5000 000 ; la construction d’un hôpital secondaire dont les dossiers ont été remis à l’OPIB pour approbation.
De même, pour la promotion immobilière, souligne-t-il, le partenaire prévoit la création de trois cités. La première avec des logements sociaux à partir des matériaux locaux améliorés tels le banco stabilisé, une deuxième avec des logements moyens standing et la troisième avec des logements grands standings destinés aux cadres supérieurs qui préfèrent la résidence en campagne. Les devis estimatifs de ce programme immobilier sont en cours de préparation. Le coût moyen sera supérieur à 20 milliards de FCFA. Chacune de ces cités sera dotée d’un centre commercial, d’espaces de loisirs et d’équipements sportifs.
C’est avec ce vrai faux projet que l’enseignant à la retraite, Bougary TRAORE, a pu mener en bateau tout un village. Pour mettre en exécution son fameux projet, il a entrepris des tractations pour faire déguerpir les occupants de l’espace qui devraient abriter le nouveau site du village de Kognini.
Un premier procès a été intenté contre les occupants en 2010. Ceux-là mêmes qui ont acheté leurs terrains d’habitation avec les mêmes villageois avec des plans de morcèlement et des documents administratifs en bonne et due forme. Le tribunal a donné raison aux occupants en déclarant qu’ils ne peuvent être déguerpis.
Après avoir perdu le jugement, le chef du village de Kognini a décidé de laisser l’affaire pour ne pas causer d’injustice aux occupants du site qui ont acheté les terrains avec les habitants de son village, selon ses explications. Mieux encore, le chef du village, lors d’une assemblée générale, a demandé pardon aux occupants du site pour avoir été induit en erreur par M. TRAORE. Aussi, a-t-il envoyé des lettres aux autorités concernées par l’affaire pour informer que son village renonce à son transfèrement vers un nouveau site, nous a-t-on expliqué.
Mais c’était sans compter sur la détermination du nommé Bougary TRAORE, qui ne voulait céder aucune parcelle de son nouveau eldorado même au détriment des populations. Selon nos interlocuteurs, le paradoxe est que Bougary TRAORE a personnellement vendu plusieurs lots sur ledit espace.
Selon le conseiller du chef du village, Faniéri TRAORE, pour la mise en œuvre de son plan machiavélique, Bougary TRAORE a fait une procuration avec la signature de 56 personnes qui seraient d’accord qu’une agence immobilière fait déguerpir les occupants. Selon lui, dans le document en question, figurent plusieurs noms fictifs et des noms de plusieurs personnes décédées ou proches du chef du village qui ne partagent pas sa position.
Soulignons que dans cette affaire, le ministre Mohamed Aly BATHILY a été reçu dans le village de Kognini. Après avoir écouté les différentes versions, Me BATHILY a soutenu que le président de la République se donne comme objectif de mettre fin à l’accaparement des terres au Mali. Selon les conseillers du chef du village, les propos du ministre BATHILY les avaient beaucoup soulagés.
Mais à leur grande surprise, ils ont appris, à travers leur huissier, que l’agence immobilière Prestige SARL, n’a pas renoncé au projet, et a même sommé les occupants de déguerpir, affirmant qu’elle agisse avec l’accord du ministre Mohamed Ali BATHILY. C’est pourquoi les autorités coutumières du village de Kognini ont jugé nécessaire que le ministre BATHILY se désolidarise en affirmant clairement sa position dans cette affaire qui devient de plus en plus délicate. Selon les témoignages sur place, l’agence immobilière Prestige SARL a déjà distribué des notes de demeure et d’arrêt des travaux aux occupants de l’espace.
Le président de l’Association pour le développement du village de Kognini, Yacouba COULIBALY, a déclaré que les occupants sont dépassés par cette situation qu’ils jugent inadmissible. Selon lui, si rien n’est fait dans l’immédiat, la situation risque de dégénérer, si bien que les occupants, régulièrement menacés par des forces de sécurité sans mandat, ne comptent pas céder d’un iota de leurs parcelles.
Soulignons que sur cet espace de 227 ha, dont plus de 6 000 maisons, il y a plusieurs maisons déjà construites et habitées et d’autres en plein chantier.
Affaire à suivre !
PAR MODIBO KONE
Source: info-matin