À défaut de rentrer par la porte très officielle de la souveraineté de l’État sur toute l’étendue du territoire national, le Gouvernement sera prochainement présent à Kidal par la fenêtre de la loi sur l’installation des autorités intérimaires (en attendant le retour de l’administration après la mise en œuvre des dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali).
Voilà qui devrait couvrir de honte et faire taire à jamais ceux qui, en perte de vitesse et voulant redorer leur blason, se sont lancés dans une campagne démentielle visant à faire avaler la couleuvre : l’accord consacre la partition du pays. Le projet de loi, inspiré de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, approuvé par les élus de la nation, beaucoup légitimes que ceux qui fuient la sanction des urnes, prévoit en effet que les membres des autorités transitoires « seront désignés par le Gouvernement, la Coordination et la Plateforme au sein d’un vivier comprenant les autorités traditionnelles, la société civile, les conseillers sortants et les agents des services déconcentrés du ressort de la collectivité territoriale concernée… ».
Les autorités intérimaires
Les nouvelles équipes dirigeantes, qui prendront bientôt la relève des conseils communaux actuels, dont les mandats sont échus et qui ont connu des prorogations, seront composées de représentants divers, dont ceux de l’État (en tant qu’exécutif). Ce qui revient à dire que les autorités intérimaires de Kidal, comme des autres localités du Nord du reste, devraient compter en leur sein des représentants du Gouvernement.
Ce qu’il est important de souligner est que ces représentants de l’État seront à Kidal sans que l’on ait besoin de tirer un seul coup de feu et verser une seule goutte de sang d’un Malien. Aussi, faut-il noter qu’ils y seront sans qu’il ne soit nécessaire de déposer préalablement une demande écrite auprès de la Coordination des mouvements armés (CMA) qui n’en donneraient certainement pas une suite favorable. Il sera encore moins question de solliciter la MINUSMA pour leur sécurisation. Tout cela, parce que la CMA tout comme la Plateforme ont signé l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger et dont la loi sur l’installation des autorités intérimaires n’est que l’émanation. Peut-on raisonnablement soutenir ici que ledit Accord scelle la partition du Mali ?
Il faut rappeler que le retour de l’administration est régi par l’Accord pour la paix qui y met des préalables.
Les patrouilles mixtes
D’un autre côté, il y a le Mécanisme opérationnel de coordination (MOC), institué sous l’égide de la Commission technique de sécurité, et des patrouilles mixtes. Selon les dispositions de l’Accord, dans le cadre des mesures sécuritaires intérimaires, ‘’le MOC est chargé de planifier et de conduire les patrouilles mixtes incluant des éléments des forces armées et de sécurité Maliennes et des éléments de la Coordination et de la Plateforme avec, si nécessaire, et si possible, l’appui de la MINUSMA et des forces internationales en présence (modalités et calendrier de patrouille par zone à définir par le MOC). La première patrouille mixte devra avoir lieu au plus tard le 60e jour suivant la signature de l’accord’’.
Sur le point concernant l’organisation de patrouilles mixtes, nonobstant le dépassement du délai initial de 60 jours après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, il est indéniable qu’il y a eu des avancées spectaculaires. Et pour cause, dans le communiqué qui a sanctionné les travaux de la 7e session ordinaire du Comité de Suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, les 9 et 10 mars derniers., dans la capitale, on pouvait lire : ‘’en conséquence, les Parties sont instamment invitées à finaliser leurs discussions en cours sur les questions prioritaires retenues, notamment la mise en place dans les plus brefs délais des autorités intérimaires dans les régions du Nord ainsi que l’opérationnalisation des patrouilles mixtes du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC). Ces mesures devront être effectives avant la prochaine session du CSA’’.
Avant la tenue de cette ‘’prochaine session’’, l’État qui avait déjà mis dans la cagnotte du Mécanisme opération de coordination, pour son fonctionnement, 5 milliards FCFA, vient de lui remettre 42 véhicules pick-up d’une valeur de plus de 2 milliards FCFA qui proviennent des 5 milliards. Ces véhicules permettront d’assurer les patrouilles mixtes dans les régions du Nord. Cette opération, apprend-on, concernera 600 éléments repartis entre les parties signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation : 200 pour les FAMA, 200 pour la Plateforme et le même nombre pour la CMA. Après avoir réceptionné les engins, le Coordonnateur du Mécanisme opérationnel de coordination, le colonel Rhissa Ag Sidi Mohamed, s’est dit prêt à engager les missions une fois les effectifs disponibles. Autant dire qu’il ne reste plus que les éléments des Mouvements armés (CMA et Plateforme) qui manquent à l’appel pour l’opérationnalisation des patrouilles mixtes, le cas des FAMAs ne posant naturellement aucun problème.
Avec des soldats de l’armée régulière et des combattants de Mouvements armés qui patrouillent ensemble, dans le même but, à savoir combattre les terroristes, peut-on raisonnablement soutenir qu’il y a partition du territoire ?
Par Bertin DAKOUO
Source: info-matin