Les membres du conseil de discipline de la Magistrature se sont exprimés sur le cas des deux magistrats opposés à la « donne ou politique » du jour. Et le président de la transition malienne, colonel Assimi Goïta a fini par approuver et appuyer les décisions prises par l’instance disciplinaire. Comme effet, devrons-nous retenir, le magistrat syndicaliste Cheick Mohamed Chérif Koné et son homologue Dramane Diarra restent désormais radiés de la corporation.
Par deux décrets différents, l’homme fort du palais présidentiel a validé, la semaine dernière, la radiation pure et simple de Cheick Mohamed Chérif Koné, magistrat syndicaliste de son état, et de Dramane Diarra, magistrat du pays. Par décret N°2023-0578/PT-RM du 03 octobre 2023, le président de la transition, chef de l’Etat précise avoir décrété : « Article 1er : Monsieur Cheick Mohamed Chérif Koné, N°Mle 779-85 G, Magistrat de grade exceptionnel, est révoqué de la Magistrature sans suppression de droit à pension ». « Article2 : le présent décret sera enregistré et publié au Journal officiel ». Aussi, enchaîne-t-on dans le décret N°2023-0579/PT-RM du 03 octobre 2023, le président de la transition, chef de l’Etat informe avoir décidé ceci dans l’article 1er : « Monsieur Dramane Diarra, N°Mle 0111-278C, Magistrat de premier grade, est révoqué de la Magistrature sans suppression de droit à pension ». « Le présent décret sera enregistré et publié au Journal officiel ». Ces deux décrets viennent ainsi valider la radiation des deux magistrats de la fonction de juge au Mali. Rappelons que le procureur général de la Cour Suprême du Mali, non moins président du conseil de discipline avait adressé, le 4 septembre dernier, une convocation au magistrat Dramane Diarra. « Conformément à la loi organique du 7 octobre 2003, fixant l’organisation, la composition, les attributions et le fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature, j’ai l’honneur de vous(Dramane Diarra) convier à comparaître devant la formation disciplinaire du conseil supérieur de la Magistrature, dans le cadre de la procédure disciplinaire vous concernant, en sa session devant se tenir le mardi 19 septembre 2023 et jours suivant, s’il y a lieu, à la Cour Suprême du Mali, à partir de 10 heures », tels sont les messages adressés par le président du conseil au magistrat Dramane Diarra. Rappelons également qu’il y a eu, courant cette même période transitoire, de dissension entre les deux magistrats et l’actuel ministre de la Justice et des Droits de l’homme, Mamoudou Kassogué. Cheick Mohamed Chérif Koné et Dramane Diarra s’étaient opposés au ministre et à d’autres magistrats du pays. Les deux ont, via les différentes sorties médiatiques, d’ailleurs craché « leurs quatre vérités » à qui voulait l’entendre au sujet de la justice sous l’ère de la transition malienne.
Cheick Mohamed Chérif reste contre sa radiation
En réaction à la décision du conseil supérieur de la Magistrature, Cheick Mohamed Chérif Koné n’a pas tardé à désapprouver la sanction à lui infliger. Dans un communiqué publié le 28 août dernier, il évoquait l’absence d’un Conseil supérieur de la Magistrature régulièrement constitué conformément aux dispositions de l’article 136 de la nouvelle constitution « imposée par les autorités de la transition ». En l’état actuel, réagissait le magistrat radié, « il n’y a plus de conseil supérieur de la magistrature pouvant être convoqué et se réunir, à fortiori délibérer ». Le regroupement constitué pour les besoins de la cause est, pour lui, disqualifié depuis la promulgation de la nouvelle constitution. Un document qui, confiait-il, a fondamentalement remis en cause la composition du présent Conseil. Par conséquent, signalait le radier, toute composition du Conseil supérieur de la Magistrature, autre que celle prévue par l’article 137 prévu en la matière, est « simplement disqualifiée ». « Nous ne nous laisserons pas faire. Nous tiendrons les autorités de la transition au respect de la constitution qu’elles-mêmes ont imposée au peuple dans un contexte de déchirement social profond », a rétorqué M. Koné. Une posture attestant clairement que le magistrat reste vent debout contre la décision du conseil de discipline. « Le Président de la transition et le ministre de la Justice et des Droits de l’homme ne peuvent pas nous exclure des fonctions du siège et du parquet et prétendre vouloir nous traduire devant un Conseil de discipline pour des faits relevant exclusivement de nos activités associatives et syndicales, légales et régulières, dont la liberté d’exercice est garantie par la constitution », rapportait le syndicaliste Koné, non moins coordinateur général du regroupement politique dénommé Appel du 20 février pour sauver le Mali. Avec la validation de ces radiations par le président de la transition, la question se pose à savoir si les deux pourront avoir gain de cause dans leur combat. Quelle justice à saisir pour leur réintégration ? Vont-ils abandonner la lutte ou l’espoir est-il encore permis ?
Mamadou Diarra
Source : LE PAYS