Dans le but de permettre aux femmes d’échanger entre elles sur leurs préoccupations et leurs besoins afin de faire un plaidoyer auprès des décideurs pour leurs prises en compte, les femmes de la Commune urbaine de Bandiagara, en collaboration avec le Programme d’Appui à la décentralisation et à la réforme de l’Etat (PADRE/GIZ) ont initié une journée plénière des femmes. Cette instance constitue un rappel de l’ensemble des actions menées au cours de l’année en faveur du développement économique, intellectuel, culturel des femmes en vue d’une plus grande représentativité de ces dernières dans les instances de décision. Cette journée plénière, dont l’un des chemins aboutissants est la formation et la sensibilisation, a eu lieu le 29 Novembre 2017. Elle a été présidée par le Préfet du cercle de Bandiagara, Siriman Kanouté. L’évènement a regroupé beaucoup de femmes et beaucoup d’instances et était plein de sens, vu le thème : « Lutte contre l’analphabétisme, non à la déperdition scolaire des filles ».
Le taux de représentativité des femmes dans les instances de décision (postes de responsabilités nominatifs et électifs) peut-elle s’améliorer à hauteur des 30% si des actes concrets allant dans le sens de l’éducation et de la sensibilisation en vue d’une autonomisation des femmes ne sont pas mis sur le fonds baptismaux ?
Cette journée qui consacre la femme dans la commune urbaine de Bandiagara a été riche en activités et a montré combien la femme est capable de changer et de faire changer la société.
Dans son allocution, le 1er Adjoint au Maire de la Commune urbaine de Bandiagara, Youssouf Tembely n’a pas manqué d’évoquer les défis et les enjeux de la plénière des femmes : « Cette journée dont le thème porte sur l’analphabétisme et la déperdition scolaire a été voulue en vue d’offrir à la plénière des femmes de Bandiagara, un espace pour présenter le bilan des activités qu’elle a réalisé, mais aussi et surtout, pour partager leurs préoccupations avec l’ensemble des acteurs impliqués dans le processus de développement de la commune », dit-il. Concernant la représentativité des femmes dans les postes de responsabilités au niveau communal, le Maire est sans équivoque : « Je peux affirmer, sans risque de me tromper que les femmes sont très faiblement représentés dans les instances de décision. Pour preuve, le nombre de femmes conseillères dans la commune urbaine de Bandiagara est passé d’une conseillère en 1999 à 5, à l’issu des dernières élections communales. Ce faible taux de participation nous interpelle tous si l’on est conscient que les femmes doivent être pleinement représentées dans les instances de prise de décision », a-t-il fait savoir avant d’interpeller tout le monde sur la nécessité de collaborer ensemble pour inverser cette courbe.
« Le choix du thème qui porte sur la lutte contre l’analphabétisme des femmes et la déperdition scolaire des filles n’est pas fortuit car nous avons réalisé que tous les problèmes auxquels les femmes sont confrontées en général sont d’une manière ou d’une autre liés à l’analphabétisme et dans une moindre mesure à la déperdition scolaire », dixit Tandou Tembély, porte-parole de la plénière des femmes et 3ème adjointe au Maire. Elle ajoute : « A cette dimension s’ajoute les situations de tabous et d’interdits qui retiennent même les femmes intellectuelles à briguer certains postes de responsabilités ». Elle a aussi mis l’accent sur l’absence des jeunes filles dans les classes pendant les heures de cours ; un constat fait lors des visites des femmes dans les structures scolaires de la commune.
Concernant le bilan des activités majeures réalisées par la plénière des femmes de 2015 à nos jours, il est positif, mais beaucoup reste encore à faire. Ainsi, Madame Tandou Tembély, avec une humeur de grand jour rappelle les différentes activités menées : « Ainsi, pour permettre à la plénière de mener à bien ses activités, le PADRE/GIZ a réfléchi et a mis en place un programme de renforcement des capacités technique des femmes sur les concepts du budget communal, du compte administratif, du PDESC, des rôles et représentativités des agents et élus communaux, la participation des femmes aux élections, et tout récemment sur le suivi-contrôle des infrastructures publiques des collectivités territoriales, etc. », indique-t-elle. Ces activités de renforcement des capacités, selon elle, étaient une réponse aux besoins de formation que les femmes ont exprimée à l’endroit du PADRE/GIZ.
« Les initiatives pour améliorer les conditions de vie des femmes de Bandiagara se résument en premier lieu à la conception de quatre projets de développement pour les femmes. Ainsi, la plénière des femmes de Bandiagara aura eu le mérite d’avoir à son actif des projets banquables. En deuxième lieu, le bilan de la plénière des femmes de Bandiagara, c’est aussi, les activités que nous avons mené pour mettre en application les acquis des formations que nous avons reçu ». C’est dans cette perspective que les membres de la plénière des femmes ont effectué une série de visites pour suivre et contrôler le fonctionnement et l’état de certains équipement collectifs : les écoles publiques et le Centre de santé de la commune. « Ces visites nous ont permis de comprendre l’existence de certains problèmes tels que : l’absence de sage-femme et la vétusté de la table d’accouchement du Cscom », dixit la porte-parole des femmes. Au niveau des écoles, il y a aussi un manque criard de tables bancs, de salles de classes ; l’absentéisme des jeunes filles et aussi un problème de fonctionnalité de certains comités de gestion.
Mais avec la plénière, les problèmes ont commencé à trouver leurs solutions, a rassuré Madame Tandou Tembély. Aussi, elle a souligné la participation de la plénière des femmes aux activités majeurs de la commune : les débats publics sur le projet de budget, la restitution du compte administratif, les réunions du Conseil Communal, etc. « Ces activités ont contribué à renforcer le niveau de participation des citoyens dans la gestion de la commune. Cela s’est traduit par une augmentation significative du nombre de femmes participantes aux rencontres concernant la vie de la commune », a affirmé Mme Tandou Tembély. La porte-parole des femmes a aussi fait savoir certaines doléances des femmes. Ce sont entre autres : la reconnaissance de la plénière des femmes comme une organisation d’utilité publique ; l’invitation des femmes de la plénières aux différentes rencontres concernant le genre et la prévision d’une ligne budgétaire d’appui à la mise en œuvre des activités de la plénière.
Quant à Yaya Eléya Coulibaly, représentant du PADRE/GIZ et de la Coopération Allemande, il s’est réjoui de la réussite de cette activité de prise de conscience des femmes. « Le travail accompli est bien à la hauteur », s’exclame-t-il avant de poursuivre : « Avec un taux d’abandon d’école des filles de 60%, les femmes continueraient toujours à jouer un rôle de second plan dans la société. C’est la raison pour laquelle et dans le but de réaliser l’objectif fixé par le gouvernement du Mali concernant l’élévation du taux de représentativité des femmes dans les instances de prise de décision que nous avons mis en œuvre, ce projet qui contribuera à les préparer intellectuellement et à les former pour qu’elles puissent se développer, diriger et développer leur commune », dixit Yaya Coulibaly, visiblement satisfait du travail abattu.
« Après les visites dans les différentes structures, il fallait exiger que les enfants partent à l’école. Vous avez dit aussi que les tables d’accouchement du CSCOM ne sont pas bonnes alors que dans la région de Mopti, les femmes de Bandiagara sont les dernières en matière de consultation prénatale. Et les enfants ne sont pas vaccinés à leur naissance. Voici quelques gros problèmes qu’il faut aussi ajouter dans le plan d’action 2018 de la plénière des femmes », s’indigna Siriman Kanouté, Préfet du cercle de Bandiagara. Il ajoute : « Vous devez sensibiliser les autres femmes sur la nécessité des vaccinations de routine ; sur la nécessité que nos enfants aient des actes de naissance, car, rare sont des femmes qui retirent les actes de naissances de leurs enfants ; il faut chercher les cartes NINA pour vous-mêmes et pour vos enfants, etc. Voici ce que je vous propose comme programme pour 2018 », dira, par la suite Siriman Kanouté. Il a aussi ajouté que la loi sur le genre est une réalité au Mali. « Accepter d’étudier, vous irez de l’avant », lance-t-il.
Ainsi, les femmes de Bandiagara ont pris conscience de leur rôle dans le processus de développement communautaire. Cette action salutaire de la Coopération Allemande, à travers le PADRE/GIZ doit recouvrer l’ensemble des communes du Mali pour la réussite de l’autonomisation et du développement des femmes et du développement avec les femmes.
A noter aussi que la cérémonie a pris fin par un Sketch sur l’éducation des filles, un jeu questions-réponses, animé par Oumar Guindo, le maitre de cérémonie et une remise d’attestations aux femmes qui se sont illustrées au sein de la commune de Bandiagara par leur acte de bravoure au cours de l’année passée.
Vivement la prochaine journée plénière des femmes de Bandiagara !
Alfousseini Togo et Moussa Mariko,
Envoyés spéciaux à Bandiagara
Source: Le Canard de la Venise