«Tuuuh», crache un motocycliste dans la file indienne, juste devant nous. 100 mètres après, le jeune homme répète le même geste. Une autre dame cure ses dents dans un véhicule de transport commun (Sotrama) et projette aussi de la salive à travers la glace de custode (fenêtre du véhicule) sans se soucier des autres usagers. Effet de jeûne, explique-t-on, à tort ou à raison ? On est vraiment un jour de Ramadan. La circulation est très dense en Commune I sur les voies qui mènent à Djélibougou. Automobilistes et motocyclistes tentent de se frayer un chemin fluide pour arriver rapidement à destination. Tout le monde semble avoir les mêmes horaires.
Le décor est sobre. Gargotes et autres petits restaurants ont fermé leurs portes juste pour le mois de Ramadan. Des jeunes filles drapées de Djellaba assortie de foulard se trouvent de part et d’autre de la voie. Le carême a ses exigences. C’est un mois béni qui consacre le jeûne : une privation de nourritures et d’eau pendant la journée pour accomplir un pilier important de la religion. Le jeûne est donc une obligation pour tout fidèle musulman, sain d’esprit et de corps.
Mais tout le monde s’accorde à reconnaître que le jeûne doit se faire dans des conditions requises pour être agréé par Allah, Clément et Miséricordieux. Mais il y a des débats d’écoles sur le fait d’avaler sa salive. Certains estiment que la pratique (avaler sa salive) est un facteur d’annulation du jeûne. Ils se mettent à cracher excessivement et partout sans discernement aucune. Les crachats visibles un peu partout sont annonciateurs du Ramadan. Les gens crachent n’importent comment en oubliant aussi que le carême rime avec la propreté. Cet acte perpétré par certains fidèles n’est pas hygiénique et répond encore moins à un quelconque critère religieux. Ces projections de salive peuvent être à l’origine de la trans mision de certaines maladies. Autrement dit, les crachats peuvent être des agents pathogènes parce que pouvant contenir des microbes, bactéries et autres.
Selon les spécialistes, la salive est un mélange d’eau, de protéines, d’électrolytes et de sels minéraux. Elle est issue des glandes salivaires principales (parotides, sublinguales et sous-maxillaires) et des glandes annexes sous la muqueuse. Le débit salivaire d’un adulte est d’environ 1 litre par jour mais il faut savoir qu’on salive plus debout ou couché. On le fait moins étant assis et plus en hiver qu’en été mais globalement très peu la nuit.
La salive a un rôle physiologique essentiel pour le corps humain et comporte aussi un risque pour la santé puisqu’elle peut véhiculer des agents pathogènes responsables de diverses maladies. A titre d’illustration, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, Pr samba Ousmane Sow, disait, il y a une semaine à la faveur de la célébration de la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose, que les gouttelettes de salive peuvent transmettre le bacille de Koch (agent pathogène de la maladie). Il est même recommandé de couvrir sa bouche avec le bras avant de tousser afin d’éviter une éventuelle contamination.
L’imam Sadou Coulibaly ironise. «Certains crachent fréquemment pendant le Ramadan parce qu’ils cherchent à éviter ce qu’il ne faut pas éviter». Et c’est ce qui provoque le desséchement de la bouche, la soif et une pratique pénible du jeûne. Pour lui, ingurgiter sa salive ne rompt pas le jeûne parce qu’on ne peut s’en abstenir. L’imam soutient qu’on peut juste cracher une ou deux seule fois après l’expulsion de l’eau de la bouche. Mais il précise qu’on doit rejeter les autres éléments qui ne sont pas de la salive. L’odeur, les résidus de nourriture et le saignement de la gencive n’ont aucun effet sur le jeûne, précise-t-il.
L’imam Ahamed Diallo ajoutera que le fait de cracher à côté des gens est un acte que l’Islam ne recommande pas parce qu’on peut nuire à son prochain à travers cet acte. «Or nuire à son prochain est considéré comme «haram», un interdit en islam», dit-il. Il soutient que le fait d’absorber sa salive n’entraine pas la rupture du jeûne et cela est valable quelle que soit la quantité de la salive.
Fatoumata NAPHO
Source: Essor