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IBK-MARA : Chronique d’une rupture annoncée

Démission ou limogeage ? Qu’est-ce qui attend dans les prochains jours le Premier ministre Moussa Mara ? De folles rumeurs circulent à Bamako, depuis le conseil des ministres du 5 novembre dernier sur un clash entre le président de la République et son premier ministre. Les deux patrons de l’exécutif auraient pris conscience de l’ampleur de la fuite et tentent chacun de son côté d’apaiser, de démentir voire même de colmater les brèches.  Sauf, dit-on, « qu’il n’y a jamais de fumée sans feu ».

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Certaines sources sont formelles. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, serait bel et bien, dans une logique de se séparer du Premier ministre Moussa Mara. Il l’aurait déjà annoncé la nouvelle. Sauf que selon certaines indiscrétions, Mara ne l’entend pas de cette oreille. Et entendrait se prévaloir de l’article 38 de la constitution du 25 février 1992 : «  Le président de la République nomme le  premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du gouvernement… ». Mara voudrait partir quand ça lui plaira. C’est une thèse balayée d’un revers de la main par les proches du président de la République. Ceux-ci estiment, dans les coulisses, que le Premier ministre n’osera jamais pousser le bouchon à ce niveau. Ce qui semble vrai, dans la mesure où d’autres sources évoquaient, hier mercredi, que le président IBK aurait affirmé qu’il n’y a rien entre lui et Mara. Est-ce une manière de taire les rumeurs ou de conforter le PM dans son poste ? Difficile d’y  répondre. Mais la certitude, c’est que Moussa Mara est bel et bien dans des mouvais draps. Ni l’opposition, ni  les « durs » du RPM n’auraient pas encore baissé la garde pour contraindre Mara à rendre le tablier.

Depuis sa nomination, le 5 avril 2014, Moussa Mara est, à tort ou à raison, l’objet de critiques des opposants et souvent même du camp présidentiel. Sa visite hasardeuse à Kidal (avec les conséquences que l’on sait) et la gestion catastrophique du dossier du Boeing d’IBK, sont, entre autres les motivations de cette forte demande du départ de Moussa Mara. Ajoutez-y les coups bas et autres prises de positions pour se démarquer  du président de la République et jouer sa propre carte politique. Dans ce chapitre, l’on évoque ses nombreuses tournées à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Mais aussi dans l’affaire des surfacturations  où Moussa Mara tente de prouver sa bonne foi en s’écartant de tous ceux qui y sont impliqués. Une façon de dire au Président de la République : « En tout cas, moi je n’ai rien avoir avec la bande mafieuse ». De sources concordantes révèlent à ce sujet des divergences profondes entre le chef de l’Etat et le Premier ministre dont le départ de la primature ne serait plus un EVENEMENT. C’est tout simplement l’épilogue d’une rupture annoncée.

 

Kidal : la grande humiliation

Depuis, le 21 mai 2014, Moussa Mara est sur la sellette à cause de son empressement à jouer le populiste dans la crise de Kidal. Sa visite au mois de mai dernier avait précipité les forces armées maliennes dans une guerre aux conséquences désastreuses. Humiliation, perte de positions stratégiques et de crédibilité, prise d’otages, mort d’homme… Au bout, une cinglante défaite. La « guerre » de Mara a pratiquement remis en cause tous les acquis dans la gestion de cette crise de Kidal, de 2013 à nos jours. La décision de Mara d’aller à Kidal n’a pas été réfléchie. Rien ne pourra justifier la débandade des forces armées face à des groupes armés dans la petite bourgade de Kidal. Le Premier ministre savait que sa visite à Kidal présentait beaucoup de risques. C’est ce qui avait été dit à son prédécesseur Oumar Tatam Ly, qui avait pris la sage décision de renoncer, à la dernière minute, à une visite dans cette localité. C’est la preuve aujourd’hui qu’Oumar Tatam Ly a sauvé des vies.

Quant à Mara, il en a décidé d’y aller quand même. Le résultat est connu : d’innocentes personnes ont perdu la vie. S’en est suivi une vive tension entre nos partenaires (Minusma et Serval) et les Maliens ; une défaite de notre armée contre le Mnla et ses alliés djihadistes, des morts et des blessés ; des prisonniers. Bref, ce fut la grande humiliation.

Ensuite, contre Mara et son gouvernement, il y a eu la motion de censure de l’opposition qui a vu dans cette défaite de l’armée malienne, la responsabilité de Moussa Mara, dont le gouvernement est « incapable », de régler les problèmes du pays dont la rébellion dans le Nord.

Selon l’opposition, le « pays s’enfonce dans une crise économique, sociale et sécuritaire profonde marquée notamment par la mal gouvernance et la quasi absence de dialogue politique ». D’après elle, le Mali « se trouve dans l’impasse sur plusieurs questions ». Ses responsables citent notamment « la gestion calamiteuse des finances publiques », une « école qui va mal » et « le peu de lisibilité dans les négociations de Kidal ». C’est la motion de censure a été déposée « pour réclamer la démission du gouvernement, avec à sa tête le Premier ministre Moussa Mara, qui est incapable de résoudre les problèmes urgents de l’heure »

Enfin, c’est au tour des caciques du RPM de mettre à prix la « tête de Mara ». Les dinosaures du parti présidentiel ne rêvent que de son éviction. Ils ne le cachent plus. C’est ainsi que l’honorable Magassouba a revendiqué le poste de Premier ministre pour son parti. Les conditions sont presque réunies pour que la primature revienne à un militant bon teint du RPM. Le parti détient la majorité à l’Assemblée nationale et dirige actuellement la mouvance présidentielle. Reste à savoir si les tenants sont dans la même logique que le Président IBK et qu’ils détiennent un candidat apte à occuper le poste.

Et au moment où l’on spécule sur le départ de Mara, le Mali est bloqué. Il donne l’image d’un pays dont tous les signaux sont au rouge.

Idrissa Maïga

SOURCE: L’Aube  du   13 nov 2014.
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