On a beau accabler le Président IBK de tous les défauts, lui faire chapeauter toutes les difficultés que traverse le pays, le rendre responsable de tous les malheurs et échecs individuels et collectifs, il faut lui reconnaître cependant une qualité : c’est un rassembleur.
Leader dans l’âme et dans la gestion, tribun hors pair et virtuose du verbe, le Président IBK sait apaiser, subjuguer son auditoire face auquel ses mots ne sont jamais choisis au hasard. Ce fut le cas, ce samedi, lors de sa rencontre avec sa Majorité.
À la soixantaine de partis politiques venus répondre à son invitation non sans griefs, le Président IBK, cet ancien condisciple de rhétoriciens, a servi du grand art oratoire. Il connaît le poids des mots. À ces hommes tourmentés qu’il a daigné rencontrer pour la première fois depuis sa réélection, il les a choisis pour un public, son public dont il connaît la sensibilité pour ne pas dire les points faibles… le bouton sur lequel appuyer.
Dans la solennité du Palais de la République, au lieu de son « camarade » habituel, il a préféré « mes amis » et « mes frères », plus forts et perçants. Pour s’en excuser, il exprimé sa joie à «tous ces visages amicaux qui pour certains nous ont manqués au long de ces mois, au long de ces semaines ». Les mots ne bâtissent pas de murs, mais ils peuvent ressembler, selon l’autre, aux rayons X ; si l’on s’en sert convenablement, ils transpercent n’importe quoi, et n’importe qui.
Par-delà sa joie de les rencontrer, en usant de toute l’éloquence qu’on lui connaît pour leur dire qu’il est satisfait d’eux, de leur initiative et de leur accompagnement, le Président IBK a conquis son auditoire qui pourtant était monté à Koulouba avec plein de frustrations et d’interrogations, notamment à son sort dans une gouvernance qu’il estime déléguée.
Quelle ne fut la satisfaction des leaders de l’EPM, partisans boulimiques du fait majoritaire d’entendre le Président IBK dire : «je crois que l’EPM a été mis en place à la faveur de l’élection présidentielle on se surprend même à regretter qu’elle n’ait pas été mise en place plus tôt. (Applaudissements dans la salle) C’est vrai !
Parce qu’aucune action gouvernementale ne peut prospérer s’il n’y a pas le socle du soutien populaire qui ne peut être animé que par vous, les partis de la majorité présidentielle ! »
Et ce n’est pas tout. En exprimant sa gratitude à sa Majorité et s’obligeant envers elle, le Président IBK l’a fortement secoué. En faisant rimer éloquence et élégance politiques avec notre rhétorique culturelle que d’émotions n’a-t-il pas suscité : « Alhamdoulilayi ! Aujourd’hui (en bambara : vous ne m’avez pas fait monter sur l’arbre et me laisser tout seul). Quand je regarde en bas là, c’est plein.
Donc mes frères, je suis dans un bonheur, je l’ai dit au départ, que je ne peux pas cacher qui est physique, qui est intellectuel, spirituel et réel.
À chacune et à chacun, sachez que je n’oublie personne. J’ai mon rythme, j’ai mon style, mais je n’oublie personne, aucun camarade sur le bord de la route. Le geste et le mot souvent, même anodins, peuvent faire la différence. On en a besoin, chacun de nous a besoin de sentir cet amour-là et je vous le porte cet amour à chacune et chacun d’entre vous. Je ne suis pas isolé ici hein. Je suis tout, absolument tout, le moindre détail, je suis. »
Depuis la Rome antique, l’art du bien-dire s’incarne dans le mythe des hommes politiques. L’éloquence concerne les hommes instruits. Le Président IBK en est un. Dans notre culture, c’est un atout indéniable. Pas seulement dans la langue de Molière, mais dans son expression sincère, comme l’a ressenti la Majorité présidentielle et comme le ressentent les Maliens qui prennent la peine de l’écouter.
Se sachant écouter par tous ceux qui partagent son grand amour pour le Mali, le Président IBK a choisi à travers les représentants de l’EPM de parler de patrie (le Mali est un pays béni, un pays singulier, à l’histoire singulière, au passé brillant, fabuleux), d’amour et fraternité : «je ne considère aucun de mes frères comme un ennemi. Aucun ! Nous pouvons avoir des divergences sur la même manière de conduire les affaires, sur la Vision à terme, mais s’il est vrai que nous avons le même amour de ce pays, nous ne pouvons que nous retrouver en un pont de convergence pour le bonheur du Mali et des Maliens »… Mais aussi de paix et de stabilité qui pour lui « supposent qu’au-dedans les enfants du même pays, d’un pays paternel, d’un pays qui a connu une situation brillante faite de respect réciproque, de considération de l’autre, de fraternité » se parlent et s’écoutent.
Pour un responsable de la Majorité qui a assisté à la rencontre, « IBK est un médecin. Il nous a soignés ». Selon lui, « il a dit des mots qui apaisent, des mots qui valent plus que tous les honneurs. Nous sommes satisfaits, revigorés et requinqués. IBK est un vrai chef… Et c’est à lui que revient le dernier mot. Unité et entente désormais au sein de la majorité, c’est son dernier mot. »
Des mots pour guérir les maux qui minent une grosse Majorité de 60 partis où les divergences et querelles mesquines jusqu’à ce samedi ne concernaient pas que les postes à occuper. En effet, les mots ne sont pas de simples particules de phrases. Loin d’être de simples syllabes entremêlées, ils ont un réel pouvoir. Ils nous gouvernent, nous blessent, nous réchauffent. Mais en aucun cas, ils ne laissent insensibles.
Au résultat, visiblement les responsables de la majorité ont été sensibles, satisfaits et reconquis par l’éloquence de leur Chef.
PAR Christelle KONE
Source: info-matin