Depuis un certain temps le maire du District fait l’objet d’un acharnement politico-judiciaire de la part des autorités du pays. Agacé par ses démarches haineuses contre ce paisible citoyen, le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de la commune III, Mohamed Sidda Dicko a rendu le tablier la semaine dernière.
Devenu célèbre de part son flair politique, Adama Sangaré fait des jaloux et suscite la crainte chez plusieurs responsables du Mali d’où la cabale contre lui. Avec des ambitions démesurées pour lui faire la peau, la justice malienne a fini par être agitée. Les magistrats qui ont encore le sens de l’éthique et la déontologie du métier commencent à quitter le navire d’un cercle vicieux que certains justiciers ont établi. C’est le cas de Mohamed Sidda Dicko.
En effet, des arguments sont montés de toute pièce en complicité avec certains hommes de droit pour abattre le maire du District. Dans cette logique, l’actuel ministre de la justice Mohamed Bathily, tellement pressé à accomplir l’une de ses missions mélange les pédales. Ses nombreux ordres dérangent les magistrats. Un mois environ après sa nomination au Département de la justice, il a adressé une série de correspondances au ministère de l’Administration territoriale pour suspendre Adama Sangaré de ses fonctions.
Sa lettre confidentielle sous le N° 0110/MJ-SG du 14 novembre 2013, adressée au ministre de l’Administration territoriale était libellé ainsi : « Il m’a été donné de constater que Monsieur Adama Sangaré, Maire du district de Bamako, fait l’objet de plusieurs plaintes pour faux en écriture, dispositions de biens d’autrui et d’autres infractions assimilées. Le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de la Commune III du District de Bamako, saisi desdites plaintes, a fait ouvrir des enquêtes contre lui.
Je vous signale que Monsieur Adama Sangaré fait déjà l’objet d’une information judiciaire et répond du chef d’inculpation de faux en écriture, de disposition de biens d’autrui. Placé sous mandat, il a bénéficié d’une mesure de remise en liberté ordonnée par le- juge d’instruction en charge de son dossier.
L’information judiciaire ouverte contre lui par le juge d’instruction du Tribunal de Première Instance de Koulikoro suit, tout de même, son cours normal.
La pluralité des plaintes et des poursuites subséquentes ainsi que la corrélation entre les faits infractionnels et l’exercice de sa fonction m’inclinent à vous demander la suspension de Monsieur Sangaré de ses fonctions de Maire du District de Bamako.
Certes Monsieur Adama Sangaré jouit d’une mesure de liberté, et qu’il bénéficie d’une présomption d’innocence, mais il n’en demeure pas moins que les faits, qui lui sont reprochés, ont été commis dans l’exercice des fonctions de maire.
Cette mesure, à la fois conservatoire et provisoire, qui ne préjudicie, en rien, la présomption d’innocence dont il bénéficie, permet d’éviter le renouvellement de l’infraction et le dépérissement des éléments probatoires, supports matériels de faits infractionnels à lui reprochés.
Je puis vous donner l’assurance que les autorités judiciaires compétentes traiteront, en toute indépendance, avec toute la rigueur intellectuelle et morale requise les procédures dont s’agit et ce, dans le strict respect des droits de défense.
Je vous saurai gré des dispositions que vous ferez prendre aux fins de la suspension Monsieur le Maire du District de Bamako ». Malheureusement pour lui, le ministre de l’Administration territorial a déclaré irrecevable sa requête. Le 03 décembre, le Ministre Moussa Sinko Coulibaly n’a pas donné une suite favorable à la demande de son homologue de la justice, Mahamed Aly Bathily. Il a attiré l’attention du ministre de la justice sur le fait que les pouvoirs de sanctions disciplinaires de l’Etat sur les élus des collectivités territoriales et leurs organes s’exercent exclusivement dans le cadre de la tutelle administrative dont les règles et les procédures sont fixées par la loi n°2012-007 du 07 février 2012 portant Code (les Collectivités Territoriales et ses textes connexes.
Il convient à cet effet de rappeler que les règles de la tutelle administrative sont d’ordre strict. A la différence du pouvoir hiérarchique, le pouvoir de tutelle est un pouvoir conditionné qui n’existe qu’autant qu’il a été expressément prévu et organisé par la loi, a rappelé le ministre Coulibaly. Certes poursuivra-t-il, la suspension du Maire est prévue par le Code des Collectivités Territoriales, notamment en son article 55 dans les formes et conditions prévues par ce code ; mais seule l’autorité de tutelle est habilitée à demander au Ministre chargé des Collectivités Territoriales, la suspension d’un Maire, motivée par une faute administrative, à l’exclusion de toute invocation d’infractions à la loi pénale (Arrêt n°100 du 26 octobre 1999). Partant, il a pris l’exemple sur le cas de la Section Administrative de la Cour Suprême concernant le maire Abdel Kader Sidibé de la Commune III contre Arrêté n° 99-2188/MATS du 23 septembre 1999 qui a suspendu le Maire ses fonctions. La suspension du Maire est prononcée par Arrêté motivé du Ministre chargé des Collectivités Territoriales pour une durée ne pouvant excéder 3 mois. Passé ce délai, il reprend ses fonctions.
La jurisprudence de la Section Administrative de la Cour Suprême n’admet point l’infliction de la sanction de suspension d’un Maire par l’Administration, reposant sur la sanction administrative d’une infraction pénale.
«En vertu des textes de la décentralisation et de la jurisprudence de la
Cour Suprême, il ne m’est pas possible de donner une suite favorable à votre demande car le Maire ne peut être légalement écarté de l’exercice de ses fonctions au plan pénal, qu’en vertu d’une décision de condamnation judiciaire devenue définitive », a répondu le Ministre Moussa Sinko Coulibaly.
signalons que le garde des sceaux avait également saisi le 14 octobre le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako pour engager des poursuites judiciaires dans un bref délai contre Adama Sangaré au titre de l’infraction de disposition de bien d’autrui. Mais cette requête sans fondement n’a pas eu de suite.
Comme si cela ne suffisait pas, il a, à nouveau écrit au Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako le 5 décembre passé en ces termes : « selon les renseignements qui nous sont parvenus, de graves suspicions de faux et usage pèseraenit sur le sieur Adama Sangaré, Maire du district de Bamako dans l’attribution des terres dans sa circonscription se traduisant par l’extorsion de biens d’autrui, des attributions de parcelles sur des titres fonciers d’autrui etc.
C’est pourquoi, je vous instruis de faire procéder par le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de la commune III : à l’ouverture d’une enquête sur ces faits pour en établir la vérité, en rassembler les preuves et en chercher les auteurs ou complices ; a l’arrestation effective de M. Adama Sangaré pour les besoins de ladite enquête ; et à la présentation d’une requête, conformément aux dispositions de l’article 623 du code de Procédure Pénale, à la Chambre Criminelle de la Cour Suprême pour la désignation de la juridiction en raison de sa qualité d’Officier de police judiciaire»
Décidemment, le Ministre Bathily qui veut brûler toutes les étapes d’une procédure judicaire normale est devenu finalement insupportable. Ce qui a poussé le Procureur anti corruption Mohamed Sidda Dicko à démissionner. Pour la circonstance, il a écrit ceci au ministre de la justice : « j’ai l’honneur de vous communiquer à toutes fins utiles, le rapport du chef de Brigade Economique et financière de Bamako, relatif à l’affaire Adama Sangaré, ainsi que le compte rendu fait par le Commandant adjoint, le Capitaine Samba Yaro, Officier de Police Judiciaire, concernant l’instruction du Colonel à la retraite Nianan Dembélé, chargé de mission au Cabinet.
La lecture de ces deux documents, m’amène à faire les constats suivants :
Malgré les professions de foi, mainte fois affirmées et répétées, je suis au regret de constater que mes fonctions légales sont vidées de leur contenu. Une enquête ouverte par le Procureur de la République à la demande de Monsieur le Ministre de la justice, est dirigée par le Cabinet du Ministre et ce, en violation de toutes les dispositions légales.
Le Procureur se trouve ainsi assisté (à son insu) par des personnes habilitées légalement ;
L’affaire, objet du présent rapport est traitée en fonction de paramètre extérieurs que l’enquête n’a pas établis ;
Je crois savoir que, dans l’exercice de sa fonction, le magistrat, fusse-t-il le Procureur, n’obéit qu’à la loi et à sa conscience. Cela est et reste toujours ma conviction. Je préfère un poste que de perdre mon âme
Au regard de ces constats, l’honneur et les principes m’obligent à en tirer les conséquences de droit.
C’est pourquoi, je vous informe que je ne suis plus en mesure d’exercer moralement et légalement les fonctions que vous m’avez confiées. Je vous prie de bien vouloir reconsidérer votre position prise hier soir en accédant favorablement à ma requête et ce dans l’intérêt de la justice ». Précisons que cette déclaration du Procureur anti corruption a été précédée d’une déclaration similaire du Procureur Général près la Cour d’Appel à une des lettres du Département. Il disait également ceci : « je vous fais retour du pli objet du bordereau d’envoi dont référence, car m’ayant été demandé d’ouvrir une enquête, il me semble, au vu des pièces, qu’il s’agit de procédures devant les juridictions administratives et qu’il n’y a en l’état des choses, aucune poursuite possible
Sauf à relater des faits susceptibles de saisir un officier de police judiciaire, le parquet n’a aucun élément pouvant l’amener à instruire une enquête.
Suite à ses aveux des magistrats de haut rang, la question que les citoyens se posent est : pourquoi autant d’acharnement contre le Maire du District par le Ministre Bathily ?
Oumar KONATE