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Gestion de l’Etat: des révélations explosives sur Mahmoud Dicko

Aliou Badara Dembélé est le président de l’Association Badenya Ton mis sur les fonts baptismaux au nom et pour le compte de l’Imam Mahmoud Dicko qui en était le parrain. Celui-ci, après avoir perdu le contrôle d’une précédente association Sabati 2012 qui avait choisi d’accompagner IBK en 2013 quand l’imam Dicko s’en était écarté, avait besoin d’une nouvelle vitrine politique. En bon soldat de l’imam Dicko Aliou Badara Dembélé s’est dévoué corps et âme à la tâche. Jusqu’à son éloignement de son mentor quand celui-ci, après lui avoir ordonné d’aller au FSD, lui a donné un premier contre-ordre de retrait en faveur de la COFOP.

Puis le même « homme de Dieu » l’a instruit de se mettre au service de Boubou Cissé, « son fils qu’il a fait nommer » avant de lui demander de le combattre sans raison convaincante pour lui. Assimilant un tel revirement à une trahison, il a refusé d’obtempérer.
Il livre à Malikilé quelques pans de sa collaboration avec l’Imam Dicko, qui, espère-t-il « se ressaisira ». Il se prononce aussi sur la Transition.

Malikilé : Bonjour Monsieur Aliou Badara Dembélé, vous êtes le président du Mouvement BADENYA TON. Que pouvez-vous nous dire sur l’Imam Mahmoud Dicko qui a été le parrain de votre mouvement à sa création. Quels sont vos rapports avec lui aujourd’hui ?

Mahmoud Dicko nous a demandé d’aller au FSD, puis de le quitter pour la COFOP.
Nous avons été utilisés.

Quant à l’Imam, c’est normal, tout homme a ses qualités et ses défauts. Mais, à un moment donné, je n’ai pas accepté de le suivre en raison de mes principes. C’est lui, l’Imam, qui nous a instruits d’aller à la création du FSD avec l’opposition et quelques mois plus tard, il nous demande de quitter FSD parce que ce mouvement avait atteint ses limites et de créer Coalition des Forces Patriotiques COFOP avec les Poulo (Husseini Amion Guindo Ndlr). Nous avons obéi sans comprendre en nous disant que vu sa sagesse, il a dû voir quelque chose venir. Malheureusement, il n’en était rien et heureusement pour moi que ces hommes politiques avertis ont compris que je n’avais pas le choix. D’ailleurs, au retour de Soumaïla Cissé du Burkina Faso, il m’a appelé pour me demander ce qui se passait, qu’on lui a dit que j’ai quitté le FSD. Je lui ai dit que c’est parce que je travaille pour quelqu’un et que s’il décide, je ne pouvais que suivre. Avec le recul, on se rend compte que nous avons été utilisés. A la COFOP aussi, nous avons travaillé conformément aux recommandations de l’Imam Dicko bien que j’ai compris, en tant qu’homme avisé, que c’est Kaou N’DJIM qui lui a soufflé l’idée de la création de la COFOP. Kaou N’DJIM fait beaucoup de choses à l’insu de l’Imam et d’ailleurs je l’ai prévenu. J’ai dit à l’Imam que Kaou N’DJIM est très dangereux, mais il ne m’a pas écouté.

Kaou N’DJIM sait qu’il peut manipuler l’imam. Même à la CMAS, les gens ne sont pas d’accord avec lui. L’imam doit choisir entre eux et Kaou N’DJIM.

C’est après tout cela que Kaou N’DJIM est allé voir l’Imam pour lui dire qu’il veut créer une Coordination des Mouvements, Association et Sympathisants de l’Imam. Quand il est venu me voir, je lui ai dit que je ne voyais pas d’inconvénient à cela. Mais je savais qu’il préparait quelque chose. C’est ce qui fait que je me suis réservé. Comme Kaou N’DJIM sait qu’il pouvait manipuler l’Imam, il en profite pour faire toutes ses gaffes. Ayant compris tout cela, et étant donné que Kaou N’DJIM a épousé la fille de l’Imam, il utilise ce lien de famille pour s’imposer et imposer ses désirs personnels. Bon c’est vrai que c’est compliqué que l’Imam ait accepté de donner sa fille à un homme de caste, je comprends qu’il ne voulait pas voir sa fille divorcer et retourner à la maison vu son rang social. Malheureusement, en Afrique ici, les gens confondent familles et activités professionnelles et politiques.

J’ai dit aux responsables du M5-RFP que Issa Kaou N’DJIM allait les trahir. Dicko était d’accord avec IBK pour un gouvernement d’union nationale. Ils avaient proposé Mohamed Salia Touré.
Même au niveau de la CMAS, les gens ne sont pas d’accord avec Kaou N’DJIM. Ils se préparent d’ailleurs à rencontrer l’Imam pour lui dire que si c’est Kaou N’DJIM son choix, ils vont se retirer de la CMAS. Ils ne peuvent rester dans la CMAS avec Kaou N’DJIM à sa tête. D’ailleurs j’ai prévenu les hommes politiques membres du M5-RFP. Ce sont mes grands frères pour la plupart. Je leur ai dit que Issa Kaou N’DJIM allait les trahir. Actuellement, toutes les décisions qu’il prend, c’est unilatéralement décidé sans consulter son bureau. C’est pour cela même qu’à la CMAS, ils sont à la recherche d’un nouveau coordinateur.

Kaou N’DJIM n’a pas de diplôme. L’imam le laisse faire parce que c’est son gendre. Sinon pour Kaou N’DJIM, il a atteint son but, il a fait proposer le jeune Salia Touré au gouvernement. Même à la proposition de IBK de former un gouvernement d’union nationale, l’Imam et Kaou N’DJIM étaient d’accord, mais c’est la détermination du Comité stratégique du M5-RFP et du peuple qui les ont fait plier.
Sinon depuis cette proposition, c’est Mohamed Salia Touré, l’actuel ministre de l’Emploi qui avait été choisi par l’Imam et Kaou N’DJIM. Alors que notre mouvement regorge d’intellectuels et d’hommes d’expérience pour être proposés à des postes ministériels mieux que Salia. Mais comme Kaou N’DJIM n’était pas ministrable parce qu’il n’a pas de diplôme, il tenait mordicus à la nomination de Mohamed Salia Touré, parce que ce dernier était un de ses jeunes dévoués. A ce niveau, l’Imam est au courant des actes de Kaou N’DJIM mais, comme je l’ai dit, Kaou N’DJIM est son gendre. Donc, aussi mal intentionné soit-il, l’Imam le laisse faire.

L’imam Dicko m’a mis en relation avec Boubou Cissé, son fils qu’il a choisi comme PM. Six mois après, il m’a dit de le quitter. J’ai refusé pour ne pas passer pour un traître.
Moi, je n’ai pas suivi l’Imam dans ses actions au M5-RFP parce qu’après le FSD, la COFOP et le FSD-SAP, l’Imam m’a mis en relation avec l’ancien premier ministre Boubou Cissé. Ce jour-là, il lui a dit que je suis son bras droit et sa branche politique. Et à moi, il a dit que Boubou est son fils et que c’est lui qui l’a choisi. Seulement six mois après, il m’a dit qu’il faut laisser Boubou. Moi, j’ai pris mes responsabilités en lui disant que non pour des raisons de principe, je ne peux pas laisser Boubou en ce moment. Je l’ai accompagné plusieurs fois voir IBK pour discuter des projets qui sont conformes aux objectifs de BADENYA TON et si je quittais Boubou en si bon chemin, je passerais pour un traitre.
Actuellement, à part la sécurité de l’Imam que BADENYA TON fait assurer, nous ne faisons plus rien pour l’Imam. Nous attendons que Kaou N’DJIM détruise la CMAS et voir si l’Imam va nous revenir.
Franchement, avec tout ce qui se passe, Issa Kaou N’DJIM est en train d’exposer l’Imam. Moi, j’assumais tout ce qu’il fallait faire pour protéger son image, mais Kaou N’DJIM, lui, il l’expose. Comme je l’ai dit plus haut, j’ai prévenu l’Imam mais il ne m’a pas écouté.

Malikilé : Avez-vous alors pris des mesures pour protéger Badenya Ton ?
Aliou Badara Dembélé : non même pas. Moi, je vais paraphraser Kaou N’DJIM en disant que la CMAS « va mourir de sa belle mort ». Je ne vais pas assumer la destruction de la CMAS alors que je n’ai eu aucun rôle dedans. Surtout que je suis déjà accusé de la destruction de SABATI.

Malikilé : Que pensez-vous de ce qui se dit sur le rôle de l’Imam Dicko dans le choix du Président et du premier ministre de transition ? L’imam était au courant du choix du Premier ministre.

Aliou Badara Dembélé : Bon, l’Imam a été invité à siéger au collège comme personne ressource, pour mieux comprendre il faut lire le communiqué du M5-RFP, qui dit n’avoir pas été représenté au collège. Quant au choix du premier ministre, je sais quand-même qu’il était au courant mais je ne sais pas jusqu’à quel niveau il était impliqué.
Comme je l’ai dit, je n’ai pas suivi l’Imam dans le mouvement M5, pour la simple raison que je ne pouvais pas trahir Boubou Cissé, bien qu’il m’ait demandé de laisser Boubou pour aller avec lui dans la contestation.
Aujourd’hui, il faut reconnaitre que la demande démesurée de démission de IBK allait créer le chaos. Nous voici dans le chaos. La gestion de IBK valait mieux que ce que nous vivons en ce moment. Aujourd’hui la situation du Mali est pire que sous IBK.

Malikilé : Au regard de tout ce que vous venez de dire, vous sentez-vous trahi par l’Imam Mahmoud Dicko ?

Aliou Badara Dembélé : En réalité, je n’ai jamais rien demandé à l’Imam. Donc, je ne peux pas dire que j’ai été trahi. Il y a des choses qu’il m’a fait faire, mais si je n’étais pas d’accord, je n’allais pas le faire. Je ne suis pas un enfant. Tout acte que je pose c’est normal que j’assume.
Par contre si les membres du M5-RFP eux ont cru qu’ils pouvaient se servir de l’Imam, c’est mal le connaitre.

Malikilé : Donc c’est le contraire qui s’est passé ?
Président BADEYNA TON : Ce n’est pas à moi de le dire. Je ne suis ni au M5 ni dans la contestation du régime, donc je ne suis pas au courant.
Moi, je suis membre du bureau de la CMAS, j’en suis le secrétaire politique, mais je le dis rarement aux gens. J’ai même convié une réunion pour dire à mes camardes que la CMAS a été créée pour détruire BADENYA TON. Beaucoup ne m’avaient pas cru, mais finalement tous sont venus me donner raison. D’ailleurs, j’ai été candidat en Commune IV, mais la CMAS a préféré soutenir des candidats adversaires.
Bouyé a pris ses distances avec l’Imam Mahmoud Dicko. Un très grand mouvement islamique des sunnites a sursis à sa présidence en raison de ses incohérences.

Malikilé : L’Imam vous a-t-il soutenu ?

Aliou Badara Dembélé : Est-ce que j’avais besoin de son soutien ?

Malikilé : Mais vous êtes président d’un mouvement qui se réclame de lui et la CMAS compte BADENYA TON en son sein
Aliou Badara Dembélé : Bon s’il a préféré ne pas me soutenir, moi, je ne m’en plains pas.
Même quand en 2019, on avait enclenché une lutte d’une très grande envergure contre IBK et Soumeylou Boubeye Maiga, le chérif de Nioro était pour débarquer IBK en ce moment. A ma grande surprise, l’Imam m’a convoqué pour me dire qu’il avait échangé avec IBK et que Boubeye allait démissionner et que lui-même allait choisir un premier ministre. Et son choix a porté sur Boubou Cissé. Ce jour-là d’ailleurs, je lui ai dit que cette décision était très grave parce que Bouyé voulait le départ de IBK et lui il venait faire un accord avec lui sans au préalable en parler avec le chérif. Il m’a répondu « il faut régler ça et après on va voir le chérif ensemble ». C’est ainsi que les choses se sont passées. Et finalement, il a réussi à convaincre Bouyé. Mais le jour où Bouyé a pris sa distance, en termes de collaboration avec l’Imam, c’est quand il a repris les hostilités contre Boubou Cissé et IBK, sans informer au préalable Bouyé. Malgré tout ça, quand il a été convoqué au Tribunal de la Commune 5, le Chérif de Nioro a personnellement appelé le ministre de la justice pour dire que si Dicko est envoyé en prison, de faire de la place, parce qu’il allait l’y rejoindre. C’est ainsi que la justice s’est rétractée et a annulé la convocation. Tiébilé Dramé est même allé lui dire de ne plus aller au Tribunal. Mais il y est quand-même allé et le lendemain, Issa Kaou N’DJIM, son porte-parole, a fait un point de presse pour annoncer la sortie prochaine pour demander la démission de IBK. Quand le Chérif de Nioro a appris cela, il était dans tous ses états et depuis ce jour, Bouyé a pris ses distances avec l’Imam. Pire, il y avait même un très grand mouvement islamique des sunnites que l’Imam Dicko était choisi pour présider. Cela était préparé pour voir le jour après sa présidence du Haut Conseil Islamique. Mais quand ces gens-là ont remarqué des incohérences, ils ont sursis à la mise en œuvre. Jusqu’à présent ils n’en parlent même plus.

Kaou N’DJIM partait prendre de l’argent avec des ministres à l’insu de l’Imam. Kaou N’DJIM n’avait rien, il n’avait qu’une petite association « ALLAH KAMA TON » et il vendait des boubous au marché.

Je sais que l’Imam a des défauts, c’est un homme, cela est normal. Mais Kaou N’DJIM fait certaines choses à son insu. Même quand Kaou N’DJIM partait prendre de l’argent avec des ministres, c’était à l’insu de l’Imam. Le jour que je l’ai su, je suis allé le dire à l’Imam. Il en a même pleuré ce jour-là. Kaou N’DJIM n’avait rien, il n’avait qu’une petite association « ALLAH KAMA TON » et il vendait des boubous au marché, du jour au lendemain, l’Imam le parachute politique. A cause des bavures de Kaou N’DJIM, Dicko a perdu ses relations avec Bouyé, BADENYA TON et même avec les sunnites. Son image est ternie. Mais à ma grande surprise, il ne fait rien pour que ça s’arrête. Mais il se ressaisira.

Malikilé : Que pensez-vous de l’actualité politique du pays ?
Aliou Badara Dembélé : Vous savez, IBK était pris en otage par Moussa Diawara et sa famille. Boubou même était pris en otage. Boubou Cissé avait même fait une feuille de route en proposant sa propre démission. Et cette feuille de route, il l’avait proposée à l’Imam. Mais l’Imam l’a rejetée. Donc, la responsabilité de l’Imam est bien engagée.
A mon avis, le M5-RFP aurait dû accepter la main tendue de IBK et les bras armés de ces militaires. Selon moi, ils se sont partagés les postes du gouvernement et maintenant ils vont partager le Conseil National de Transition (CNT) aussi entre les membres du « grin » qui n’ont pas eu de place dans le gouvernement. A ce moment-là, nous allons faire une coalition avec le M5-RFP pour créer un autre vaste mouvement pour combattre les militaires. Malheureusement, le MALI KURA tant souhaité par les Maliens, ce n’est pas pour maintenant. D’ailleurs, je suis sûr que ce gouvernement ne dépassera pas 2 mois.
On va les garder à l’œil. On espère que ça va aller. Sinon ils nous trouveront sur leur chemin.

Malikilé : Monsieur le président, Merci.
Aliou Badara Dembélé : C’est moi qui vous remercie et vraiment courage. Malikilé est l’un des meilleurs journaux de la place.

Entretien réalisé par Moctar SOW Source Malikilé numéro 711 du 19 octobre 2020

Source : INFO-MATIN

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