Déjà aux couleurs de la célébration, avec  la décoration de certaines avenues, la capitale malienne s’apprête à vivre les fêtes de fin d’année.  Pour plusieurs hôtels de la capitale, impossible de déroger à la règle pour ce moment spécial destiné finir en beauté l’année qui s’achève tout en accueillant la nouvelle. Avec des tarifs jugés attractifs par les organisateurs, ces fêtes, qui ne sont pas toujours « rentables » pour certains, visent à maintenir les liens entre ces établissements et leur public.

« Fête destinée aux générations nées en 60, 70 et 80, c’est une occasion de se retrouver entre anciens du lycée ou de l’université », explique l’acteur culturel Alioune Ifra N’Diaye, lui-même appartenant à cette génération. Cette fête, plutôt « réservée »,  se tient régulièrement depuis 7 ans à l’espace culturel Blonba et regroupe des habitués. « Les nouveaux » qui veulent y participer doivent se faire parrainer. Et, contre une contribution de 30 000 francs CFA, les participants peuvent profiter d’un barbecue, danser sur les musiques de leur jeunesse, sans occulter celles du jour, et surtout partager leurs souvenirs, ajoute M. N’Diaye.

Ces festivités sont en tout cas une tradition bien ancrée que se prépare à perpétuer le groupe hôtelier Azalaï cette année encore avec la commémoration de la nuit de Noël et de celle de la Saint sylvestre, respectivement à Azalaï Grand Hôtel et Azalaï Bamako, ancien Azalaï Salam.

Ces « soirées classiques », qui constituent pour le groupe une occasion de permettre à ses clients de passer de joyeuses fêtes de fin d’année, sont aussi ouvertes au   public  pour s’approprier ses établissements. Entre animations particulières et prestations d’orchestres, les organisateurs prévoient un « mini marché de Noël » avec des objets d’art fabriqués par des artistes locaux. Une façon « d’offrir à ces talents locaux une vitrine pour s’exprimer », explique la responsable marketing et commercial du groupe, Madame Madjiè Zonvidé.

Pour permettre au plus grand nombre de célébrer ces fêtes et de découvrir le « nouvel Azalaï Bamako » rénové, « les tarifs sont abordables pour attirer tout le monde », assure Madame Zonvidé. À partir de 9 000 francs CFA pour les enfants de moins de 12 ans jusqu’à 25 000 francs pour un couple ou 18 000 francs par personne pour la nuit de Noël. Et, pour le réveillon du 31 décembre, ces prix vont de 32 000 francs CFA par personne à 60 000 francs le couple.

Rentabilité

« On ne perd pas de l’argent, mais ce n’est pas totalement rentable », répond Alioune Ifra N’Diaye lorsque se pose la question de la rentabilité de ces manifestations. S’il n’est pas l’élément le plus important, le coût de l’organisation reste déterminant pour bon nombre de structures. Car il s’agit « d’un gros effort en termes de communication ou de menus », explique M. Diallo, responsable commercial de l’hôtel Laïco El Farouk. Si l’établissement a l’habitude de célébrer les fêtes de fin d’année, il hésite encore à mettre en place une organisation en cette fin 2018. « C’est compliqué à mettre en place, seul », ajoute le responsable commercial. Pour le moment, il se contente d’enregistrer les « sollicitations à dîner » et met en place les menus en conséquence. Cependant, si ces demandes se confirment et atteignent un certain seuil, « nous serons obligés de le faire sous forme de fête », avoue tout de même M. Diallo.

Face à une faible demande, certains ont simplement fait le choix de renoncer à la fête. « Cette année est particulière, les gens n’ont pas d’argent. Et, lorsque nous faisons un sondage auprès de nos partenaires, ils préfèrent fêter en famille. Cela ne sert à rien de gaspiller de l’argent si ce n’est pas rentable », déclare, non sans amertume, Madame Kéita Rose, responsable de l’hôtel Mandé, qui a pourtant l’habitude d’organiser ces festivités.

Joindre l’utile à l’agréable

Fidèle à ce rendez de fin d’année, qui constitue une occasion de collecte de fonds majeure, le Lions club de Bamako perpétue depuis environ une vingtaine d’années le rituel. « Cela nous permet d’inviter nos sponsors, de nous retrouver en famille et de fêter ensemble », explique M. Baba Séid Bally, président du Lions club Bamako région 12. Ce dîner de gala, « soutenu » en musique par le mythique orchestre Taras, se tient encore cette année à l’hôtel Laïco Amitié de Bamako.

Si l’engouement pour ce rendez vous ne se dément pas, il varie cependant en fonction de l’année, confirme M. Bally. Et, pour s’adapter à ce contexte changeant, les organisateurs ont prévu, à côté de la carte de participation à la soirée, fixée à 40 000 francs CFA par personne, des « cartes de soutien », pour permettre même à ceux qui ne participent pas à la soirée de contribuer en fonction de leurs possibilités, précise le président du club.

Car ces fonds sont les moyens d’action de cette organisation, dont les piliers sont l’amitié et le social, selon son président. En effet, « ce club service d’environ 1 500 000 membres à travers le monde » apporte un soutien annuel à l’Institut d’ophtalmologie tropicale de l’Afrique de l’Ouest (IOTA), estimé entre 500 000 et 3 000 000 millions d’euros, selon les années. Rappelant que c’est le Lions club qui a mis en place le Centre diabétique de Bamako et le président du club Bamako exprime le souhait de l’organisation de faire de ce centre un plus grand espace, capable de prendre en charge toutes les maladies opportunistes liées au diabète.

Dynamique positive

« Accueillir la nouvelle année dans la joie », c’est aussi contribuer à la décrispation de la situation, à en croire certains organisateurs.  « Passer vers la nouvelle année dans la joie », c’est presqu’un devoir pour M. Stéphane Oumayo, directeur commercial de l’hôtel Radisson. Il s’agit en effet pour lui de perpétuer « une tradition » et  de remercier ceux qui les ont accompagnés tout au long de l’année.

Si la situation du pays a failli les faire renoncer, les responsables de l’espace culturel Blonba estiment nécessaire leur contribution à la rendre plus positive. « Il y a deux ans, on se demandait si on devait vraiment l’organiser. Mais cette année on ne s’est pas posé de questions. On pense que le pays émerge, même si on aurait souhaité que le rythme soit plus prononcé. On y participe. Il faut qu’on continue à entretenir la confiance. La défiance a pris trop de place », justifie le directeur de Blonba.

À l’instar de plusieurs chaînes de télévision, Africable Télévision ne veut pas rester en marge de la fête. La chaîne envisage « une programmation spéciale pour le 31 décembre », explique M. Sékou Tangara, le directeur de l’information de la chaîne. Un programme qui doit se dérouler sur 2 sites, selon les responsables. Une soirée en studio se tiendra donc parallèlement à un « show » organisé au Monument de l’Obélisque, à Hamdallaye ACI, avec des prestations d’artistes et d’humoristes. Le programme en studio aura en plus une particularité cette année, en relayant les  « vœux des Présidents » des pays africains, surtout ceux prononcés sur « les chaînes partenaires », précise M. Tangara.

En attendant d’obtenir les autorisations nécessaires, à cause du contexte sécuritaire, les responsables estiment que ne pas céder à la peur est la meilleure façon de répondre au terrorisme, même s’ils disent comprendre les mesures de prudence.

Les artistes aussi, qui seront un peu partout sur les différentes manifestations, honoreront les rendez-vous avec leurs fans. Comme Oumou Sangaré, qui, avant sa traditionnelle soirée à son hôtel le 31 décembre, offrira un concert gratuit au monument de la Tour de l’Afrique le 29 décembre, dans le cadre de la célébration de ses 30 ans de carrière.

Journal Du Mali