Dans les différents points de vente que nous avons sillonnés à Bamako, c’est encore le suspens à une semaine de la fête de Tabaski. Pas assez de moutons, les prix « excessivement élevés », et l’absence de la clientèle, « quasiment invisible », selon certains vendeurs de moutons.
« Les moutons sont chers, je dirais même trop chers cette année » a laissé entendre Yaya Koné, un client rencontré au niveau du « Garabale » de Faladié. M. Koné nous a confié que c’est son cinquième lieu de visite ce même jour dans le but d’avoir un mouton à un prix abordable.
Ce client craint même ne pas réussir à avoir un seul mouton avec son argent alors que d’habitude, il en achète deux : « Vraiment si ça continu à cette allure, je vais me contenter d’un seul mouton cette année, au lieu de deux que j’achète chaque année. Les moutons sont trop chers cette année », a-t-il désespérément laissé entendre.
À ses dires, les moutons qu’il a l’habitude de payer à moins de 100 000F sont tous au-delà de 125 000f aujourd’hui.
Malgré qu’il avait ses couteaux limés avec lui, lorsqu’on l’a rencontré à Bacodjicoroni, Ablaye Sissouma avait toujours de la peine à avoir un mouton pour la fête. Selon ce dernier, l’histoire de mouton est très compliquée cette année à cause de la cherté.
Si ça continue ajoute-t-il, il craint être obligé d’attendre plus tard en espérant que les prix baissent un peu : « Pour avoir un bon mouton aujourd’hui, il faut plus de 100 000 f, et tout le monde sait que cela n’est pas facile pour un citoyen moyen », a-t-il fait savoir.
Par ailleurs, ce client dit ne pas être d’accord des causes de (Covid-19) avancées par certains commerçants, du fait que les moutons ne quittent pas ailleurs pour le Mali.
De ce fait, M. Sissouma a interpelé les plus hautes autorités à prendre des dispositions pour que les gens aient des moutons à des prix abordables : « Sinon on est tous inquiet ».
Pour cette fête, Ablaye Maïga a amené plus de 100 moutons de la région de Gao. Depuis son arrivée au marché de Sabalibougou, il y’a huit jours, ce commerçant dit n’avoir vendu jusqu’à présent, même une seule tête.
Tout en gardant espoir, M. Maiga n’a pas manqué de manifester sa crainte en cas de non-paiement de ses animaux.
Mamadou Traoré a trouvé un mouton pour la fête, il dit avoir trouvé son mouton à 110 000 après beaucoup de discussions en vue d’obtenir une remise de 15 000F.
Il trouve qu’il n’y a pas trop de différence entre le prix de l’année dernière et cette année, mais selon lui, c’est l’argent qui manque.
M. Traoré a invité les marchands de moutons à tenir compte de la situation difficile du pays pour vendre les moutons, surtout qu’il n’y’a pas de pèlerinage cette année.
À ses dires, beaucoup de pèlerins de retour du Hadji achètent en temps normal, des moutons pour le « Hadiya », mais du fait qu’il n’y’a pas de Hadj cette année, les marchands doivent, selon lui, profiter de cette occasion pour écouler toute leur marchandise, au risque de ne pas se retrouver plus tard avec beaucoup d’animaux à nourrir.
Alpha Konaré, Yacouba Togo, vendeur de moutons depuis plusieurs années au marché de bétail de Faladié et Souleymane Touré, vendeur au marché de Sabalibougou estiment tous qu’il n’y’a pas assez de moutons aux marchés cette année.
Les causes de cette rareté de moutons sont toujours selon eux, la situation sécuritaire au nord et au centre du pays.
Des localités qui ravitaillent Bamako en moutons pendant les fêtes.
Ces commerçants indiquent que beaucoup de villages dans lesquels ils partaient acheter des moutons avant dans la région du centre n’existent plus : « à cause de l’insécurité grandissante, les habitants de ces villages ont tous fui », et d’ajouter que « certains villages n’existent plus ».
Yacouba Togo a précisé, un des commerçants qui achètent dans cette localité indique qu’ils vont cette activité avec beaucoup d’inquiétude : « il n’y’a pas très longtemps, un de nos véhicules a été attaqué par les bandits armés et tous nos bétails ont été emporté, plus de 200 moutons », a-t-il souligné. En plus des enlèvements, Moussa Touré dit qu’il y’a également beaucoup de postes de contrôle des groupes armés sur la route et qu’ils paient de l’argent pour passer au niveau de chacune de ces postes une situation qui impact aussi sur le prix des moutons selon lui.
De son côté, Elhadj Moussa Goro, président de l’association du marché de bétail de Faladié, a rassuré qu’il y’a suffisamment de moutons sur le marché pour servir la population de la capitale. Il a indiqué que le Mali est le deuxième pays en Afrique en matière d’élevage, c’est pourquoi selon lui : « le bétail ne peut pas manquer au Mali », « les moutons sont au marché, ils continuent d’arriver aussi », a-t-il ajouté.
Tout en évoquant les nombreuses difficultés à traverser pour amener les moutons à Bamako, il a rassuré de tout mettre en œuvre pour que Bamako puisse être servi pendant cette fête.
Issa Djiguiba
Source: Journal le Pays-Mali