Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a appelé, lundi, ses compatriotes à boycotter les produits français tandis que Paris a engrangé le soutien diplomatique de l’Allemagne et des Pays-Bas dans la guerre des mots qui l’oppose depuis ce week-end à Ankara.
La tension continue à monter entre la France et la Turquie après l’appel d’Ankara, lundi 26 octobre, à boycotter les produits français suite aux mesures mises en place en France pour lutter contre l’islamisme. Cette escalade intervient après des soutiens diplomatiques allemand et néerlandais au président français, Emmanuel Macron, traité entre les lignes de malade mental par le leader turc.
“Tout comme en France certains disent ‘n’achetez pas les marques turques’, je m’adresse d’ici à ma nation : surtout ne prêtez pas attention aux marques françaises, ne les achetez pas”, a déclaré le président turc, Recep Tayyip Erdogan, lors d’un discours à Ankara.
“Une campagne de lynchage semblable à celle contre les juifs d’Europe avant la Seconde Guerre mondiale est en train d’être menée contre les musulmans”, a-t-il ajouté, accusant certains dirigeants européens de “fascisme” et de “nazisme”.
Cet appel turc boycott intervient dans un contexte marqué par la mobilisation de musulmans dans plusieurs pays du Moyen-Orient pour cesser d’acheter des produits français, en réponse à la volonté affichée de Paris de soutenir la publication de caricatures du prophète Mahomet au nom de la liberté d’expression.
Erdogan a estimé que son homologue français devrait se soumettre à “des examens de santé mentale”, ce qui a conduit Paris à rappeler son ambassadeur en Turquie.
Emmanuel Macron a depuis réitéré que la France continuerait de défendre les caricatures du prophète Mahomet, promesse prononcée lors de l’hommage national au professeur Samuel Paty, professeur décapité dans un attentat islamiste pour avoir montré ces dessins en classe.
Les propos du président français ont suscité un flot de critiques dans le monde musulman, de la part de dirigeants politiques et religieux, d’élus mais aussi de simples citoyens sur les réseaux sociaux et ont provoqué manifestations et appels au boycott des produits français.
Emmanuel Macron a toutefois enregistré une série de soutiens en Europe, dont celui de la chancelière allemande Angela Merkel, qui a condamné des propos “diffamatoires” contre lui.
De son côté, le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, a qualifié les propos de M. Erdogan d'”inacceptables”. “Les Pays-Bas défendent résolument aux côtés de la France les valeurs communes de l’UE. Pour la liberté d’expression et contre l’extrémisme et le radicalisme”, a-t-il tweeté.
“Résister au chantage”
Au Qatar, des produits français ont été retirés dès samedi soir des rayons de certains supermarchés à Doha.
Sur les réseaux sociaux, les Jordaniens ont lancé une campagne utilisant les hashtags “#Our Prophet is a red line” (Le prophète est notre ligne rouge), ou “#France Boycott”, et publient des vidéos de restaurants et supermarchés où les produits français ont été remplacés par des articles provenant d’autres pays.
Plusieurs dizaines de petits sites internet français ont, par ailleurs, été touchés par une vague de piratages informatiques consistant à leur faire afficher des messages de propagande islamiste, a constaté lundi l’AFP.
Les entreprises de l’agroalimentaire, du luxe et des cosmétiques pourraient être particulièrement touchées dans les pays du Maghreb et du Proche et Moyen-Orient.
En direction du marché turc, ce sont 6 milliards d’euros de biens français qui ont été exportés en 2018, secteurs des matériels de transport et des produits chimiques, parfums et cosmétiques en tête.
Le patron des patrons français, Geoffroy Roux de Bézieux, avait appelé plus tôt dans la journée les entreprises à “résister au chantage et malheureusement à subir ce boycott” et à faire passer leurs “principes” avant les affaires.
Le Quai d’Orsay dit avoir mobilisé le réseau diplomatique français “pour rappeler et expliquer (aux autres pays) les positions de la France en matière de libertés fondamentales et refus de la haine”.
AFP, Reuters
Source: France 24