Au regard de l’importance du secteur de l’élevage et du cheptel national, au Mali, on ne doit plus se contenter de la consommation ou de l’exportation du bétail sur pieds vers les pays voisins. En effet, il est temps d’amorcer « la révolution » de la filière viande, à travers une transformation plus moderne et large de la production nationale, afin non seulement de limiter l’importation des produits dérivés à base de viande, mais aussi exporter plus, ainsi que diversifier la consommation locale. Ce qui permettra une conservation durable, et aura sans doute des impacts positifs sur l’économie nationale.
C’est ce qui semble être bien compris certains jeunes entrepreneurs qui ont commencé à s’investir dans le domaine de la transformation de la viande à l’instar de Mouhamed Ahmed Sidibé, jeune entrepreneur du Mali. Détenteur d’un MBA2 en gestion des projets, Ahmed Sidibé est aujourd’hui promoteur de MASARAKA Entreprise, évoluant dans l’agrobusiness, le conditionnement et la transformation de la viande locale.
Pendant longtemps, la viande a été et continue d’être conservée de manière traditionnelle au Mali, mais avec les initiatives jeunes, il y a de l’espoir. Tout compte fait à ce jour, le manque à gagner demeure très important, malgré cette production conséquente. Notre pays est le premier producteur d’animaux, dans l’espace UEMOA et deuxième de la CEDEAO après le Nigeria, selon l’API (Agence pour la Promotion des Investissements).
Face à ce constat le jeune entrepreneur Ahmed Sidibé déplore : « nous avons une grande potentialité qui n’est pas exploitée comme il se doit, malheureusement depuis des années, nous n’arrivons pas à transformer la viande en produits dérivés. Ce sont nos voisins qui en bénéficient. Plus de la moitié de notre production d’animaux est exportée vers les pays voisins de la région comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Burkina Faso, le Togo, le Ghana ».
Aussi, a-t-il rappelé, la filière bétail viande au Mali est structurée autour de deux circuits : le circuit vif qui concerne le bétail sur pied et le circuit mort qui est la viande proprement dite. Le circuit de la viande est limité, malgré la volonté affichée par les autorités d’exporter de la viande plus que du bétail sur pied afin de bénéficier de la valeur ajoutée.
Le processus de transformation au niveau des deux filières est très limité à cause de l’insuffisance des équipements. Pire, elles sont confrontées à un certain nombre de barrières sanitaires que nous constatons dans le transport de ce produit phare de notre alimentation. En camion, sur des motos, avec des tricycles, la viande est acheminée dans nos assiettes sans réelle prise en compte des règles d’hygiène, et ce depuis l’aire d’abattage.
Pour révolutionner et valoriser le secteur viande, en priorisant le made in Mali, les défis sont énormes, et ont pour noms : le manque d’intérêt, de financement, et de projets porteurs.
« Les grands défis en ce moment pour les consommateurs et l’État sont et demeurent la transformation et la revalorisation du produit made in Mali. Parce que c’est impensable de voir dans un pays comme le nôtre, qui peut couvrir toute l’Afrique de l’Ouest en viande, soit à ce niveau. Les difficultés résident dans le fait que les banques et les établissements financiers ne donnent pas assez de crédits aux start-ups et aux petites entreprises qui essayent d’innover et valoriser le savoir-faire malien en finançant eux-mêmes leurs projets. De même, les investisseurs étrangers et programmes d’aide ne veulent pas investir au Mali à cause de la situation politico-sécuritaire », explique le promoteur de MASARAKA Entreprise.
Miser sur la transformation de la viande pourra être une mine d’or. Elle pourrait être non seulement une solution d’employabilité pour bon nombre de jeunes sans emplois au Mali. Mais aussi permettre au pays de répondre à plus de demandes en matière de viande des pays voisins comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, la Guinée pour ne citer que ceux-là. Enfin, elle permettra à la population malienne de consommer ses propres produits et non ceux importés dont elle ne connaît pas la provenance ou les composantes.
ADAM DIALLO
Source: Bamakonews