Au Mali, la crise économique, les difficultés agricoles, l’accroissement de la pauvreté ont accru l’exode rurale. Le phénomène ne concernait jadis que les hommes mais il s’universalise de façon exponentielle.
Des jeunes filles quittent ainsi leurs villages très enthousiastes à l’idée de pouvoir monnayer dans les grandes villes leurs aptitudes aux tâches ménagères contre de quoi constituer leurs trousseaux de mariage. Une chimère car à la pénibilité de leur corvée se greffent dans la plupart des cas d’énormes difficultés liées à la sous-rémunération et à l’irrégularité des mensualités, les harcèlements et abus sexuels de l’époux ou des enfants de la patronne. Ce n’est pas tout. En plus des mensualités toujours déduites de la valeur de chaque objet endommagé pendant les tâches, les jeunes filles sont traitées avec mépris et dégout, injuriées au quotidien par des patronnes qui n’approuve presque jamais ce qu’elles abattent comme travail. Malades, elles sont soignées à leur propre compte et ne sont guère épargnées pendant les convalescences souvent dues aux piqûres des moustiques auxquels elles sont constamment exposées.
Les grossesses sont également monnaies courante dans ces milieux. Et lorsqu’elles tombent enceintes, la crainte d’affronter la malédiction du village les conduit parfois à risquer leur vie par l’avortement clandestin, à défaut de porter la grossesse neuf mois durant pour ensuite abandonner le nouveau-né dans les ruelles.
Ainsi donc, en dépit de l’abolition de l’esclavage, du combat des femmes pour leur droit à l’émancipation, nous assistons quotidiennement aux violations flagrantes de certaines conventions internationales ratifiées par le Mali – notamment en matière de droits humains des femmes et des enfants – ainsi que des pertinentes dispositions constitutionnelles en rapport avec le caractère sacré et l’inviolabilité de la personne humaine : «Tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité et à l’intégration de sa personne… » ou encore que « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des services ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants. Tout individu, tout individu se rendant coupable de tels actes, soit de sa propre initiative, soit sur instruction sera puni conformément à la loi »
De quoi s’interroger sur l’utilité de nos lois mais également sur la sincérité du combat que mènent les femmes au nom de la femme, quand on sait que dans le cas des aide-ménagères c’est bien la femme qui est une louve pour la femme.
Zeina Diarra
Source: Le Témoin