L’équipe chargée de conduire le dialogue politique inclusif est à pied d’œuvre. Après la cérémonie d’intronisation, elle était face à la presse le 3 juillet dernier au Bureau du Médiateur de la République. Ce dialogue suscite des craintes à plusieurs niveaux.
D’abord, chez le Président de la République. Ibrahim Boubacar Kéita a peur de la remise en cause de son mandat.
Seule cette peur pourrait justifier l’utilisation de certaines phrases dans le projet de termes de références. Il y est clairement indiqué que le dialogue n’est pas une Conférence nationale souveraine comme celle de 1991 et qu’il ne peut pas remettre en cause les institutions actuelles de la République en les remplaçant par un régime de transition. Dans l’interview qu’il a accordée la semaine dernière à «Jeune Afrique », le Président IBK a déclaré que ce « ne sera ni une conférence nationale ni un troisième tour électoral, que cela soit clair».
Ensuite, au niveau de la CMA. Dans un document daté du 3 juillet, la Coordination des Mouvements de l’Azawad (Cma) déclare participer au dialogue à condition qu’il ne remette pas en cause l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.
S’y ajoute une coalition de partis politiques et d’organisations de la société civile qui s’insurge contre le processus d’organisation du dialogue et dénonce les décisions unilatérales du Président IBK et son gouvernement.
Participera ou participera pas ? Le Chef de file de l’opposition, l’honorable Soumaïla Cissé, est dans un véritable dilemme. Plusieurs actes posés récemment par le Chef de l’Etat et son gouvernement semblent avoir isolé les forces de l’opposition qui ont refusé de signer l’Accord politique de gouvernance.
La charge électrique envoyée la semaine dernière au cours de son entretien avec Jeune Afrique par ‘’le grand frère qui a décroché son téléphone en février dernier pour appeler son petit frère’’ a étalé au grand jour les animosités entre les deux hommes. La réplique de Soumaïla Cissé ainsi que la réaction de Me Demba Traoré, chargé à la communication du Bureau politique national de l’Union pour la République et la démocratie (URD) creusent davantage le fossé qui séparent les deux camps.
Selon Pr Issa N’Diaye, homme politique et philosophe, «en définitive, le dialogue projeté n’est qu’une tentative désespérée du régime de se dégager des incendies allumés çà et là par sa gestion hasardeuse du pouvoir et son laisser-aller….
Les Maliennes et les Maliens rêvent avant tout de souveraineté et de dignité. Ils veulent avoir le droit de choisir sans faux fuyants leurs amis. Ils ne confondent pas les gouvernements prédateurs des richesses et des indépendances et leurs peuples.
Dans les conditions qui sont les nôtres, le seul mot d’ordre qui vaille aujourd’hui est la Résistance Nationale. Prenons rapidement langue entre patriotes maliennes et maliens pour mettre en place une dynamique et un organe de coordination pour la résistance nationale ! Traçons sans illusion le cercle de nos amis, les vrais, les peuples et les pays qui respectent notre souveraineté et notre dignité ! Rompons les chaînes de la courbette et de l’aplatissement devant les diktats d’où qu’elles viennent !
Un peuple debout est invincible. Modibo Kéita nous avait ouvert la voie en 1960. Arrêtons de trahir notre pays et notre peuple ! Donnons-nous la main pour bâtir un Mali pluriel, fort et respecté ! Changeons d’alliance à l’échelle internationale et explorons d’autres voies ! Tout est possible à condition d’assumer notre destin », souligne-t-il dans une contribution publiée par certains journaux.
Si le Président de la République, obsédé par les critiques contre sa réélection, a peur pour la remise en cause de son mandat, l’opposition ainsi que d’autres forces de la société civile craignent d’être roulés dans la farine par un régime qui veut se donner du temps. A ce rythme, le dialogue politique inclusif risque d’accoucher d’une souris.
Le Challenger