La Plateforme ‘’Anw Ko Mali Dron’’ regroupant des partis politiques, des syndicats et des organisations de la société civile, a opposé un niet catégorique à la sollicitation des autorités traditionnelles de Bamako visant à les amener à la table du Dialogue National Inclusif. Camouflet pour les pompiers de service du flop gouvernemental incapables d’arrêter la spirale négative ? Revers pour le Gouvernement à court d’arguments ? Présage d’un DNI raté ? C’est probablement d’un peu de tout cela qu’il s’agit.
La révélation a été faite par la Présidente du Bureau de coordination de la Plateforme ‘’Anw Ko Mali Dron’’, Mme SY Kadiatou SOW. Après l’annonce de sa non-participation au DNI, la Plateforme a reçu une invitation des autorités traditionnelles de Bamako. Objectif : convaincre l’organisation de reconsidérer sa position au nom de l’intérêt supérieur du Mali qui a besoin, en ces moments critiques, de l’union de tous ses fils.
Léger comme argument pour la Plateforme dont la décision a été prise à la suite d’interpellations successives sur des dérives évidentes (pour elle) qu’elle formule ainsi : ‘’dialogue administré’’, ‘’caractère non participatif et non inclusif’’, ‘’manque d’autonomie des citoyens’’, ‘’absence de caractère contraignant des recommandations issues du DNI’’, ‘’flou entre les niveaux local et régional en ce qui est de la synthèse des recommandations’’.
Pour la Plateforme, le souci de l’intérêt supérieur commande d’assouplir certaines raideurs du pouvoir, corriger l’image d’arrogance du chef de l’État qui devrait porter le DNI et non le Premier ministre comme c’est le cas, et arrondir les angles avec le corps social. Aussi a-t-elle commis les médiateurs, à s’assurer que le Gouvernement accepte de revoir le format, le contenu et le processus de DNI qui est loin de faire l’unanimité. Une situation qui est parfaitement résumée par ce constat de Konimba SIDIBE : « le DNI est devenu un dialogue de la Majorité avec elle-même ».
Sur ce coup, en tout cas, à ce stade, les médiateurs font figure de freluquets. Pourtant, les sages ayant plus d’une corde à leur arc, la quête du compromis s’avèrerait salutaire pour un DNI passablement laminé par le désaveu il est frappé par une frange importante de la population. Il s’agira d’amener les parties à sortir des positions tranchées, que chacun lâche une partie de ce qui lui est cher, pour se retrouver autour de l’essentiel. Sosthène de La Rochefoucauld-Doudeauville disait : ‘’le talent de l’homme d’État est de savoir sacrifier à propos les petits incidents aux grands intérêts’’. Et celui de la Plateforme ‘’Anw Ko Mali Dron’’ serait d’intégrer pleinement cette citation de Louis Aragon : ‘’l’avenir, c’est ce qui dépasse la main tendue’’.
Mais, au-delà des formalismes et convenances, pèse sur le Grenelle la menace de sur deux pièges.
Il y a, d’une part la Plateforme qui s’est fait sa religion depuis la signature de l’Accord Politique de Gouvernance (APG), le jeudi 2 mai, entre le Gouvernement et certains partis politiques : le DNI, pour le Président IBK, est un ‘’alibi’’ pour un passage en douceur du Projet de réforme constitutionnelle qui a été buté à de fortes résistances contraignant le Président IBK à le mettre entre parenthèses dans un Discours à la Nation, le 18 août 2017. Une position certainement sous-tendue par l’article 7 de l’APG qui stipule : ‘’les parties signataires conviennent de la nécessité d’engager des réformes profondes de la gouvernance en vue de créer une société plus démocratique, juste et prospère. A cet effet, elles conviennent d’examiner toutes les propositions de réformes majeures lors du dialogue politique national inclusif avec notamment l’adoption d’un projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992’’. Ce tableau n’ouvre objectivement aucune la perspective à ce que la Plateforme fasse machine arrière. Son message à l’endroit du Premier ministre, à travers ses émissaires, est de ce fait suffisamment allusif.
D’autre part, il y a un Gouvernement qui peine à réduire la voilure de sa fatuité, obsédé par l’objectif qu’il s’est fixé, à moins que ce ne soit le deadline à lui imposé par le Commanditaire (à qui le PM est allé faire allégeance et recevoir ses instructions, au cours d’une ‘’visite de travail’’, du 9 au 11 septembre) à qui le Secrétaire général de l’ONU a emboîté le pas. Au cours de cette visite de travail, rapporte un confrère, Boubou Cissé a indiqué que le référendum portant sur la révision de la Constitution serait organisé d’ici la fin de l’année et que les législatives, prévues en octobre 2018, mais plusieurs fois reportées depuis, se tiendraient en 2020. Pourtant, le projet de loi n’avait pas encore été adopté par le DNI. Ce n’est d’ailleurs toujours pas le cas puisque le DNI est toujours à la phase préparatoire.
In fine, l’option de snober ceux qui ont pris leur distance avec le DNI dans son format actuel est avérée et irréversible comme l’illustre cette sortie dédaigneuse de Aminata Dramane TRAORE du Triumvirat : « ce n’est pas parce qu’une minorité refuse de participer au dialogue qu’il n’est pas inclusif ». Le FSD dont la présidence du Directoire est occupée par le Chef de file de l’Opposition, SADI, la Plateforme ‘’Anw Ko Mali Dron’’… C’est une minorité ça aujourd’hui au Mali ?
PAR BERTIN DAKOUO