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EMPRISONNEMENT DE MAHAMADOU CAMARA : Malick Coulibaly, attaqué par IBK, propose sa démission à Boubou Cissé !

De toute évidence, IBK n’a pas du tout digéré l’emprisonnement de son ancien chef de cabinet, Mahamadou Camara, interpellé par le Procureur Kassogué dans les affaires dites de l’avion présidentiel et de marché de fournitures et d’équipements de l’armée. Et Malick Coulibaly, le Garde des Sceaux, tutelle du parquet, donc du Procureur Mahamadou Kassogué, en a fait les frais la semaine dernière. Au point, paraît-il, de déposer sa lettre démission sur le bureau du Premier ministre Boubou Cissé ! Qui l’a refusée.

Dire qu’IBK en a gros sur le cœur serait un doux euphémisme : le président de la République est littéralement estomaqué qu’en dépit de sa volonté exprimée, son ancien ministre de la communication soit, toujours, sous mandat de dépôt.

Et le moins que l’on puisse dire est que le chef de l’Etat n’y serait pas allé avec le dos de la cuillère qui a réprimandé avec des mots et sur un ton à peine acceptables à l’endroit d’un collaborateur. Les faits seraient survenus en début de semaine dernière, visiblement peu avant le conseil des ministres.

En effet, rapportent nos sources, lors d’un échange téléphonique avec le ministre de la Justice, IBK aurait vitupéré voire éructé des propos peu amènes à l’endroit de l’ancien défenseur des Droits de l’Homme, au point de porter atteinte sinon remettre en cause sa loyauté. En clair, pour IBK, depuis l’avènement de Malick Coulibaly à la tête du département de la Justice, sa «croisade contre la corruption» n’aurait été dirigée que contre les personnalités proches du Palais, ceux-là qui auraient servi loyalement le président de la République. D’où l’accusation de desseins inavoués de déstabilisation.

Les propos étaient graves, car pour IBK, la nomination de Malick procédait de sa stratégie de reconquête d’une opinion pour qui il avait perdu son aura de Kankélétigui. Avant que Malick ne renoue avec le portefeuille qu’il avait occupé pendant la transition, le président IBK passait aux yeux de l’opinion nationale malienne comme ayant abjuré de tous ses engagements, en particulier d’éthique dans la gestion et la protection du bien public.

Pour le Malien lambda, le pillage des ressources publiques n’a jamais été aussi exacerbé qu’avec l’avènement du règne actuel. C’est un signe que le slogan, tout de patriotisme du candidat élu en 2013, «Le Mali d’abord» soit vite devenu «Ma Famille d’abord» et, depuis 7 ans maintenant que gouverne IBK, les faits ont plutôt confirmé ce glissement sémantique.

L’ancien Procureur démissionnaire de Kati, jouissant d’une certaine renommée d’intégrité, était donc la caution dont le régime aux abois, entendait se servir pour redorer un blason passablement terni, voire littéralement flétri ! Pour IBK, et il l’aurait signifié à son interlocuteur au bout du téléphone, Malick aura été une grosse déception et si le président de la République n’a pas employé expressément les mots fatidiques de «trahison» et «d’ingratitude» à l’endroit du Garde des Sceaux, celui-ci l’aurait certainement sous-entendu entre les propos. D’où sa démission, rédigée et déposée sur le bureau du Premier ministre qui, avec peine, aurait pour l’heure dissuadé l’ancien défenseur des droits de rendre le tablier.

 

SAM et SYLIMA mettent IBK au pied du mur

À la lecture de cette vive réaction présidentielle, on comprend donc que la démarche des deux syndicats de magistrats, le Syndicat autonome de la magistrature et le Syndicat libre de la magistrature, le 1er avril dernier, auprès de leur camarade syndicaliste et collègue du Pôle économique et financier de Bamako, ne relève pas du hasard.

Dans son «compte-rendu de mission», la délégation syndicale conjointe soulignait venir s’enquérir des «rumeurs persistantes faisant croire à des pressions qui s’exerceraient sur» le Procureur Kassogué et le juge d’instruction en charge de la procédure enclenchée. Dans les faits, si le Procureur Kassogué a bien reconnu que «la détention de (l’ancien ministre) a fortement déplu au haut sommet de l’État (en l’occurrence le chef de l’Etat en personne)», il n’a cependant pas mis en cause la chancellerie, le département de tutelle dont on sait qu’il est la hiérarchie du parquet qui n’en est pas indépendant comme le juge du siège.

Mais, selon ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que cette initiative syndicale conjointe avait bien été organisée, après ouï-dire des vifs échanges entre le président de la République et le Garde des Sceaux. Moins en réalité que pour s’enquérir seulement de la situation des magistrats du Pôle économique et financier, la délégation syndicale conjointe de la magistrature entendait plutôt prendre date. Et du coup, mettre en garde l’exécutif contre toute pression dans ce sulfureux dossier, dont on dit que s’il était poussé aussi loin, avec le grappin mis sur les principaux protagonistes, nul doute que le chef de l’Etat pourrait être lui-même gravement compromis du fait de son implication personnelle dans certains volets déterminants de ces affaires.

Toujours est-il, rapportent les sources, que cette visite, et la publicité que les syndicats de la magistrature en ont faite en publiant leur compte rendu, n’ont pas laissé IBK indifférent. Bien que toujours déterminé à voir extraire son ancien chef de cabinet des griffes judiciaires, IBK n’en a pas moins mis suffisamment d’eau dans son… vin, au point de soutenir devant qui de droit qu’en réalité, ses propos étaient destinés à obtenir plus de célérité et de prise de responsabilité et non à blesser.

Une façon maladroite d’amorcer une retraite stratégique sur un dossier à propos duquel, en employant une autre méthode plus convaincante, parce que trébuchante, il avait réussi à obtenir un premier classement sans suite. En tout cas, ce coup-ci, IBK a senti passer le vent du boulet !

 

Mohamed Ag Aliou

 Nouvelle Libération 

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