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ÉDUCATION AU MALI : L’année scolaire sauvée au détriment de l’école !

L’année scolaire 2018-2019, secouée par la longue grève des syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016, a été sauvée de justesse avec la signature d’un accord entre le gouvernement et les enseignants.

Un ouf de soulagement pour bon nombre de parents d’élèves qui craignaient une année «blanche» et son lot de dégâts financiers. Ce dénouement de la situation laisse certains esprits sceptiques sur le fond de la question. Et ce, surtout que les dates des différents examens de fin d’année sont désormais connues de tous.

Depuis le lundi 20 mai, les cours ont partiellement repris après cinq mois d’arrêt de travaux dû à la longue grève des enseignants. Une reprise partielle du fait que bon nombre d’écoles à l’intérieur du pays n’ont pas pu prendre en marche le train de la résurrection de l’année scolaire 2018-2019. Peu importe, il faut sauver l’année scolaire au détriment de l’école malienne dont les produits ne sont plus, depuis une décennie, consommables. En tout cas, le ministère de l’Education, dans son empressement, a publié les dates des examens de fin d’année.

Les compositions de DEF sont prévues du 26 au 28 juin. Celles du CAP, du 08 au 12 juillet. Le BT du 15 au 19 juillet. Le BAC du 22 au 25 juillet. Des dates qui conduisent certains esprits à un petit jeu de calcul. En effet, de la date de reprise des cours (20 mai) à la date du premier examen (26 au 28 juin), selon le calendrier, les élèves auront un peu plus d’un mois pour rattraper un retard de cinq mois. Ce qui est utopique.

«Effectivement, à notre niveau, on a repris les cours depuis le lundi 20 mai. Les élèves sont présents, mais il faut noter que certains ne sont pas revenus depuis la reprise. La seule inquiétude cette année, c’est des élèves en classes d’examen qui n’ont pratiquement rien fait cette année. Et même les séances de rattrapage ne pourront pas combler le retard de cinq mois. Ça, il faut le direPour ceux qui sont dans les classes ordinaires, la situation est jouable» explique, I. S, enseignant à l’école publique de Sogoniko.

Aussi, selon l’Unesco, pour qu’une année scolaire soit validée, elle doit durer 24 semaines sans interruption majeure. Des conditions auxquelles l’année scolaire 2018-2019 ne répondrait pas. Donc pas possible techniquement et pédagogiquement de sortir des ruines une année déjà perdue.

«Le gouvernement vient de nous éviter une année blanche. Mais pour celui qui connaît le fond du problème, l’école malienne n’a pas été sauvée. Pour la simple raison qu’à l’image des années passées, cette année, les élèves seront plus médiocres. Raison pour laquelle, le gouvernement devait selon tout bon sens penser à sauver l’école malienne et non se plier en quatre pour sauver l’année scolaire 2018-2019», estime un enseignant à la retraite.

En tout cas, l’arrivée du nouveau gouvernement a permis d’apaiser le front social avec la fin des grèves des cheminots et des enseignants signataires du 15 octobre 2016. Une victoire politique dont peuvent désormais se vanter les membres du gouvernement Boubou Cissé.

En effet, la question de l’école malienne, fragilisée depuis des années, avec pour conséquences, le bas niveau de l’élève malien et des enseignants sans aucune formation pédagogique, doit constituer une priorité à laquelle les autorités doivent trouver des réponses concrètes.

«Notre école  est une usine de fabrique de produits de mauvaise qualité. Je ne suis pas en train de saboter notre école. Nous le savons tous, mais cela nous préoccupe peu. Sauver l’année scolaire 2018-2019 est politiquement une réussite pour les nouveaux membres du gouvernement. Mais dans le fond, c’est contribuer à la baisse du niveau de l’élève malien que nous connaissons et savons déjà médiocre. Pensons à sauver notre école et non à ressusciter une année qui techniquement et pédagogiquement n’est pas à sauver.

Pédagogiquement, une année scolaire, c’est neuf mois d’apprentissage sans grande interruption. Cette année, les enfants ont passé plus de cinq mois à la maison avec les grèves auxquelles le gouvernement d’alors n’a pas voulu trouver des solutions. Nous sommes en mai. Certains enfants se disent déjà en vacances. Et un simple prolongement de deux mois sera impossible pour rattraper le retard. Les enfants qui auront le BAC cette année seront-ils au niveau de ceux de la sous-région ? Moi, en tant que parent d’élèves, je préfère une année blanche cette année. Dans tous les cas, les enfants n’ont rien appris cette année. Et personne ne nous dira le contraire», s’indigne notre interlocuteur.

Et Ibrahim Soumahoro, enseignant en fonction, d’ajouter : «Logiquement, il est préférable de décréter une année blanche au titre de l’année scolaire 2018-2019. Pour la simple raison que certains élèves dans la région de Kayes ont eu du début de la rentrée jusqu’au 20 mai dernier, 21 jours d’études. Dans ces conditions, pour quelles raisons l’Etat voudrait éviter l’année blanche ?»

De passage à l’Académie de la Rive Droite, les responsables ont déclaré ne pas avoir d’opinion concernant la couleur qu’il faut donner à l’année scolaire 2018-2019.

F. Doza

Source : Nouvelle Libération

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