Coup de poignard dans le dos du monde paysan, faux bond, complot, haute trahison, chacun y va de ces épithètes pour qualifier et commenter l’intention ?du gouvernement de réduire à hauteur de 50 % la subvention des engrais pour cette campagne agricole. C’est au nom d’une gestion parcimonieuse des ressources publiques qu’on serait amené à opérer cette coupe drastique se défendent certains thuriféraires.
Pour notre part, l’intention ou la décision marque le recule de l’Etat du Mali par rapport à plusieurs de ses politiques et stratégies de développement.
C’est un recul par rapport à la politique volontariste de faire du secteur rural le moteur de la croissance économique comme on a l’habitude de le clamer haut et fort dans les discours officiels. Pour rappel le Mali a jeté son dévolu sur l’agriculture familiale tout en créant les conditions d’une agriculture de marché. L’objectif était de booster la production locale pour assurer la sécurité /la souveraineté alimentaire et de créer des revenus intérieures en encourageant des gros investissements dans le secteur rural. Les aménagements à coup de milliards financés par le budget national ou par les P T F et exclusivement destinés aux petits producteurs constituent la matérialisation de cette politique pour assurer la sécurité alimentaire. La réponse gouvernementale pour résoudre les difficultés d’accès à l’engrais, un facteur déterminant du rendement fut l’initiative riz lancée en 2008. A l’actif de cette stratégie, l’approvisionnement constant du marché intérieur en céréale de grande consommation (riz, mil, mais) assorti d’une stabilité relative du prix aux consommateurs. Pourrait-on assurer cette stabilité si le producteur n’a pas les moyens d’atteindre les rendements nécessaires pour faute d’engrais ?
La mesure, si elle venait à se matérialiser constituerait un recul par rapport à la politique de lutte contre le chômage en général et de création d’emploi en milieu rural en particulier. L’accès à l’engrais à des conditions favorables est l’une des mesures incitatives de fixations des jeunes sur leurs terroirs par leurs installations sur des exploitations viables. Les exploitations leur donnent l’occasion de s’affirmer économiquement et lutter contre la précarité et par la même occasion éviter de tomber dans le jeu des vendeurs d’illusions.
Au vue de tout ce qui se précède on est en droit de se demander sur les motivations de cette mesure qui expose notre pays à la pénurie céréalière l’an prochain. Aussi, pourquoi avoir attendue les premières pluies pour annoncer une telle mesure qui affecte l’écrasante majorité d’une population peu résiliente.
Une chose est sûre les à défaut d’une production intérieure suffisante, la seule alternative restera l’importation de céréales. Dans ces conditions combien aurions-nous à perdre au cordon douanier avec les exonérations, et combien de sans emplois et de pauvres aurions –nous fabriqués de nouveaux ? Autant de questions qui méritent réflexion. En attendant on recule et dangereusement.
La Rédaction