54 ans après le départ du dernier soldat colonial de notre sol, nous ne pouvons pas revendiquer la moindre indépendance. Ni politique, ni économique.
Le Mali vit aujourd’hui sous la tutelle militaro-politique franco-onusienne. Il n’a pas, malgré les milliards dépensés au fil des ans, d’armée capable de défaire la petite poignée de bandits qui menace de lui retirer deux tiers de son ancestral territoire. Il ne peut pas payer les salaires de ses fonctionnaires sans aide internationale. Quant aux investissements (routes, écoles, dispensaires, etc.), ils sont financés à 90% par la charité internationale. Légué par le colonisateur, le million d’hectares de l’Office du Niger, notre principale richesse agricole, n’est, 54 ans plus tard, exploité qu’à hauteur de 10% ! Ces constats poignants transforment le 22 septembre, que nous célébrons chaque année avec faste, en un gigantesque folklore juste bon à gaspiller nos fonds de caisses.
Dans les milieux d’affaires maliens, un mort court: « Si tu veux réussir dans ce pays, contente-toi d’acheter et de revendre des marchandises; mais si tu investis dans le moyen ou le long terme, tu es foutu! ». De fait, l’Etat malien, faute de stratégie et de volonté, n’accompagne les grosses entreprises et les industries ni en termes financiers, ni par de bonnes lois. Contrebandiers et marchands ambulants trouvent en notre pays un paradis terrestre. La corruption des fonctionnaires et le recouvrement anarchique des impôts et taxes douanières achèvent de liquider les entrepreneurs les plus obstinés.
Tout se passe comme si nos gouvernants, dépourvus de programme, se font élire pour venir appliquer au doigt et à l’oeil les ordres du FMI et de la Banque Mondiale. C’est pourquoi ils regardent, sans réagir, couler les fleurons industriels nationaux au nom d’un principe éculé qui veut que l’Etat, en libéralisme, ne soit pas un acteur économique. Faut-il rappeler aux dirigeants maliens que les Etats-Unis, temple de l’ultra-libéralisme, ont, en 2008-2009, mis sous l’éteignoir les sacro-saints principes capitalistes pour investir massivement l’argent public dans le sauvetage de leur industrie automobile et de leur secteur bancaire sinistrés par la crise économique ? La France, le Royaume Uni et le Japon n’ont-ils pas fait de même pour sauver de la crise leurs grandes entreprises ? Ces exemples devraient inciter le gouvernement malien à mettre en place une véritable politique de financement et de protection des secteurs vitaux de l’économie. L’inaction des autorités maliennes ne peut, dès lors, se justifier. Elle attente même à l’ordre public comme le prouve le cas de « Jemeni » dont les 50 000 clients, privés de leur épargne par la chute de l’entreprise, ont pris d’assaut les bureaux du liquidateur judiciaire, le contraignant à démissionner.
Le plus drôle, c’est qu’au moment où se meurent les grandes entreprises, le gouvernement, telle la cigale de la fable, s’abîme dans de beaux discours, des chansons. Ainsi, dans un document-bilan célébrant l’An I du pouvoir IBK, le Ministère de l’Industrie et de la Promotion des Investissements se gargarise des réalisations suivantes :
– pose de la première pierre de l’unité de production de Chaux de Karanga en février 2014 ;
-remise de 273 certificats d’origine pour une valeur d’exportation des produits industriels agréés de 27, 2 milliards FCFA;
– réalisation de 25% de la zone industrielle de Dialakôrobougou, de 7% de celle de Ségou et de 5% de celle de Kayes;
– travaux d’aménagement des zones industrielles de Sikasso, de Fana, de Ouéléssébougou, de Sanankoroba et du Mandé.
– enregistrement au CEMAPI de 8 brevets d’invention, 24 marques, 20 noms commerciaux et 8 dessins industriels visant à protéger les inventions et les résultats de recherche;
– élaboration d’un répertoire des inventions primées aux salons de l’innovation technologique;
– élaboration d’un répertoire de 234 Normes Nationales diffusé auprès de 16 organisations socioprofessionnelles;
– mise à disposition de la Cellule d’Appui à l’Aménagement et la Gestion des Marchés d’une liste des références normatives sur les installations électriques, équipements de prévention et de lutte contre les incendies;
-mise à disposition du Laboratoire National de la Santé de 7 normes ISO sur la microbiologie alimentaire;
– accompagnement de 2 entreprises industrielles à la certification ISO 9001 version 2008: Toguna Agro-Industries et le Moulin Moderne du Mali;
– formation diplômante aux métiers du textile de 145 jeunes dont 25 jeunes déplacés du nord;
– projet d’adoption de politiques de promotion des investissements, de développement de la propriété intellectuelle et de promotion de la qualité de nos produits…
Rien que des paperasseries et de la littérature !
Tiékorobani
SOURCE: Procès Verbal