Le meeting de ce vendredi 5 avril 2019 à l’appel du président du Haut conseil islamique, l’Imam Mahmoud DICKO, et du Chérif de Nioro, est un signal fort quant au niveau de mécontentement général des Maliens vis-à-vis de la gouvernance du pays par le Président Ibrahim Boubacar KEITA, en ce début de second quinquennat. En plus de cette farouche contestation qui s’est manifestée, l’Opposition politique et des ténors de la Majorité présidentielle étaient déjà en embuscade. Jusqu’où le duo IBK-SBM peut-il ignorer la colère de la rue ?
Le Président de la République a été réélu en 2018 dans un contexte de crise plus difficile que celui de 2013. Au front de la contestation de sa légitimité est venu rapidement se greffer un front social en ébullition auquel le gouvernement a du mal à faire face. Les grèves des enseignants et des travailleurs des collectivités territoriales en sont des illustrations parfaites.
Le meeting de ce vendredi est donc la manifestation achevée d’un malaise social qu’il urge de solutionner pour épargner au pays l’explosion sociale. En plus de l’ampleur de la mobilisation que nul ne peut contester, la rue s’est manifestée ce vendredi, à travers des messages clairs et précis : « trop c’est trop », « Boubèye dégage », « IBK dégage », « IBK et Boubèye ont échoué », « non à la mauvaise gouvernance », « MINUSMA a échoué. Barkhane a échoué ».
S’il est indiscutable que le Président de la République a un mandat bien déterminé à lui accordé par le peuple, à travers les urnes, rester indifférent à tous ces messages est aussi un manque de respect pour ces électeurs qui ont cru à son projet pour le Mali. Tout porte à croire aujourd’hui que c’est une crise de gouvernance et/ou de confiance qui s’est installée entre les Maliens. Toute la question aujourd’hui est comment dissiper une telle crise ?
Les espoirs étaient portés, en un moment, sur le dialogue politique entamé par la classe politique et poursuivi par le Président de la république, à travers ses rencontres successives avec le chef de file de l’Opposition et avec plusieurs autres responsables politiques de la place.
Cependant, les derniers événements survenus au centre du pays, les massacres de Dioura et surtout d’Ogossagou ont semble-t-il vite scellé le sort de ce dialogue politique pourtant apprécié tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de notre pays. Depuis bientôt deux semaines, la situation semble stagner. Ni du côté du chef de file de l’opposition encore moins de Koulouba, l’on ne pipe mot sur les résultats de ces rencontres. De sources proches de Koulouba, l’on estime que le chef de l’État n’a pas beaucoup apprécié les termes utilisés par les opposants suite aux attaques meurtrières de Dioura et d’Ogossagou. Aussi, les appels à la mobilisation dans certains états-majors politiques pour le meeting de ce vendredi, initié par deux chefs religieux qui n’ont jamais caché le désamour pour le président IBK pour un second quinquennat, ont également été mal appréciés par Koulouba, selon les mêmes sources. Ainsi, plus la rupture du dialogue traine en longueur, mieux l’on s’éloigne du consensus national indispensable pour relever le défi de la paix dans notre pays.
Au regard des défis auxquels nous faisons face, il est évident que le gouvernement SBM s’enlise. Ces défis sont : sécuritaires, de paix, de dialogue politique, de cohésion sociale, scolaire… À ce titre, l’ancien Premier ministre disait Ahmed Mohamed Ag HAMANI disait : « l’ennemi, ce n’est ni le gouvernement ni l’opposition ni la société civile, l’ennemi a un seul nom : notre propre désunion ».
En plus d’une Opposition qui réclame sa tête, depuis belle lurette, la Majorité présidentielle a aussi donné de la voix à l’occasion de la session d’avril en cours à l’Assemblée nationale. Selon Mamadou DIARRASSOUBA du RPM, ce gouvernement n’est pas capable d’opérer le changement souhaité.
La crise de notre pays est si profonde que le dialogue doit être mené de la « base la plus décentralisée au sommet », conseille le secrétaire général adjoint du Parti FARE – An Ka wuli. En effet, si les Partis ont leur rôle à jouer dans l’animation de la vie politique, tous les citoyens n’appartiennent pas à ces regroupements. Or, ce sont eux qui doivent être les principaux acteurs de la situation. Ce dialogue, s’il était mené avec objectivité pourrait être une lumière et un facteur d’adoucissement des cœurs, afin de baisser la tension. En effet, le gouvernement est accusé à tous les coups et à tous les niveaux.
De ce fait, ce gouvernement a le devoir ‘’d’écouter la société civile et l’opposition qui, à leur tour, ont l’obligation de ne pas se dérober à l’appel de la nation et de l’histoire’’.
Le préalable à tout dialogue est la restauration de la confiance entre la classe dirigeante et la population. C’est pourquoi, l’insuffisance de légitimité populaire qui caractérise la gouvernance actuelle doit être corrigée en prenant en compte les différentes sensibilités et mettre en confiance ceux qui ne se reconnaissent pas dans celle-ci. À cet effet, les plus hautes autorités devraient tirer les leçons de la mobilisation du vendredi pour la transformer en atout en vue d’une sortie rapide crise.
Par Sidi DAO
Source: info-matin