Des centaines de personnes ont marché, le vendredi dernier, à Bandiagara pour non seulement dénoncer l’insécurité grandissante dans la région mais aussi interpeller les autorités de la transition. Bankass, Koro et Douentza aussi sont sur le projet. L’État qui, jusque-là a opté pour l’inaction, est interpellé par les populations.
« L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir. Seule la lutte libère » disait l’ancien président du Burkina Faso, Thomas Sankara. Les populations de la région de Bandiagara, victimes de l’insécurité grandissante et de la faillite de l’État, ont compris cette réalité. Elles ont décidé ainsi de briser le silence et de réclamer ce que l’État leur doit : la sécurité. Elles ont dit non à l’insécurité grandissante dans la région ; non aux enlèvements répétitifs des cars ; non au mutisme de l’État ; oui à la sécurité, à la paix et au vivre ensemble.
Selon les manifestants, la situation sécuritaire se dégrade dans la région de Bandiagara ces derniers temps. Les populations sont victimes d’attaques terroristes, de pillages de biens, d’enlèvements et de séquestrations, de menaces de morts, d’assassinats ciblés, d’impositions de signatures des accords locaux de « soumission » aux terro-djihadistes… Face à cette situation bien que très grave, l’État opte pour le mutisme, l’inaction. C’est d’ailleurs ce qui a suscité la colère de populations de Bandiagara. « Ce jour vendredi 12 novembre 2021, une marche Pacifique pour demander plus de sécurité dans le centre du Mali en l’occurrence la région de Bandiagara qui est en proie à une recrudescence des violences. Menace de mort, enlèvements, assassinats le quotidien des populations reste pris en otage par l’extrémisme violent », a-t-on lu la page du conseil local de la jeunesse de Bandiagara.
Selon un des leaders du conseil local de la jeunesse de Bandiagara, l’objectif de la marche était non seulement de dénoncer le calvaire des populations victimes de l’absence de l’État, mais aussi réclamer la paix et le vivre ensemble.
Les revendications des manifestants
Même si à Bamako, on ne parle que des sanctions de la CEDEAO à l’encontre des autorités de la transition au Mali et du respect de la durée de la transition ou même de la tenue des Assises nationales de la Refondation, les populations de Bandiagara, elles, ne réclament que la sécurité des personnes et de leurs biens. Dans le mémorandum lu à la fin de la marche, les manifestants ont réclamé, entre autres, le déploiement rapide des FAMa pour sécuriser tous les axes routiers du centre ; la réponse rapide des FAMa face aux attaques ; la patrouille des FAMa en accord avec les autodéfenses Dana Ambassagou ; la sécurisation des personnes et leurs biens ; la levée des embargo sur certains villages ; le réengagement rapide du centre d’un processus de dialogue pour la sortie entre protagonistes et de la réconciliation. « Nous sommes tout à fait disposés à soutenir la transition dans tous les aspects du règlement du Mali, mais ce sont les autorités de la transition même qui doivent soutenir la sécurisation du centre pour réussir le soutien à la transition », a-t-on précisé dans le mémorandum. Selon les manifestants, la marche de ce matin est un nouveau départ dans les réactions des populations face à la dramatique situation qui « ne s’améliore guère ».
La marche de ce 12 novembre 2021 ne sera pas la dernière dans la région de Bandiagara si la situation sécuritaire ne s’améliore pas. « Toutes les prochaines fois, nous serons dans les rues tant que nous n’avons pas droit à la vie, à la paix et à la sécurité », ont affirmé les manifestants.
Des dizaines des personnes enlevées depuis mercredi sur l’axe Bandiagara-Bankass
Le mercredi dernier, des cars en provenance des cercles de Bankass et Koro ont été enlevés entre Bankass et Bandiagara. Il s’agit de : Ogoyara Transport et Air Bankass. Même si les femmes et les enfants qui étaient dans les deux cars ont été relâchés, des dizaines d’autres passagers ont été conduits à des destinations inconnues par leurs ravisseurs. Ces otages, viennent majoritairement de la commune centrale de Bankass et d’autres communes du cercle n’ayant pas encore signé l’accord de « soumission » aux djihadistes. Au moment où nous mettions cette information sous presse, ces paisibles citoyens n’étaient encore libres même si les négociations locales étaient en cours.
Après les deux cars, les djihadistes ont enlevé, le vendredi, le second car de Ogoyara. Tous les passagers sont, selon nos sources, pris en otage.
Ce qui est déplorable, l’État n’avait pas encore réagi à ce drame. Aucun communiqué officiel n’a été produit sur la situation, en tout cas au moment où nous mettions cette information sous presse.
Boureima Guindo
Source: LE PAYS