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« Démission du Président IBK » : Quelle analyse sociopolitique ?

Le Mali traverse l’une des périodes les plus néfastes de son histoire, et ce, unanimement dans un régime népotiste. Outre les crises scolaire, sanitaire, et sécuritaire, viennent s’ajouter la crise politique ou institutionnelle.

 

En effet, nonobstant les dangers liés au Covid-19, une maladie pandémique et bougrement contagieuse qui sévit partout dans le monde, nonobstant l’insécurité dans certaines localités du pays notamment au centre, nonobstant les menaces des populations à boycotter le premier tour des élections législatives, l’autorité publique a quand même décidé de tenir lesdites élections et cela, malgré les contextes difficiles précédemment cités. Et force était de reconnaitre le faible taux de participation qui était en dessous des 36%, avec en plus la non – ouverture de certains bureaux de vote au centre du pays à cause de l’insécurité d’où l’enlèvement du chef de file de l’opposition, M. Soumaïla CISSE, à MOPTI tout juste avant le début des élections législatives.

Toutefois, on se demande pourquoi le gouvernement a autant insisté sur le maintien des élections ? N’y avait – il pas là un intérêt particulier d’ordre politique ? Autant de questions qui méritent réponse !

S’en suivra alors le second tour, qui a d’ailleurs irrité les populations et a plongé le pays dans une déception totale, puisqu’au moment où les populations commençaient à croire aux miracles avec la transparence des résultats provisoires du second tour des élections législatives divulgués par le biais du Ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, M. Boubacar Alpha BAH, synonyme de transition avec les élections virtuelles des candidats légitimement plébiscités, la Cour constitutionnelle comportant neuf conseillers avec en sa tête Manassa DANIOKO, en a disposé autrement à travers son arrêt et son pouvoir indéboulonnable à trancher en dernier ressort en matière élective comme les disposent l’article 6 de son propre règlement intérieur : « Les décisions de la Cour constitutionnelle se présentent sous forme d’arrêt… »; l’article 155 de la loi électorale : « La Cour constitutionnelle procède au recensement général des votes. Elle contrôle la régularité du scrutin et en proclame les résultats définitifs… » ; l’article 94 de la constitution : « Les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours… ».

Elle en a donc profité de ces pouvoirs juridiques et indéfectibles conférés par les lois maliennes, pour annihiler injustement la victoire péremptoire de certains modestes partis politique à défaut de régularité comme motif, et léguer la majorité au parti présidentiel.

Dans ce cas précis, peut – on dire que la Cour constitutionnelle, compétente pour la défense des droits du peuple, est à la Merci du Président de la République sachant que les conditions d’éligibilités des membres de ladite Cour à savoir trois nommés par le Chef de l’Etat, trois par le Président de l’Assemblée Nationale (majorité présidentiel à l’hémicycle), et trois nommés par le conseil supérieur de la magistrature, nous précise l’article 91 de la constitution ? La Cour constitutionnelle censée être impartiale, n’est – elle pas une Cour politique ? Ne possède t – elle pas trop de pouvoir ? Autant d’interrogation !

Par ailleurs, les différentes alliances contre nature des partis politiques qui étaient supposés être entre autre de la gauche ou de la droite, de l’opposition ou de la majorité, furent une insulte vis-à-vis du peuple, même si l’article 41 de la charte des partis politique au Mali en leur donne ce droit : « Les partis peuvent, dans le cadre des élections, contracter librement des alliances… »

Qu’en est – il alors de l’obligation morale vis-à-vis du peuple ? N’est-ce pas là une autre raison pour le peuple de boycotter les élections au Mali ?

  • Que s’est-il passé le 05 Juin ?

Dixit Me Mamadou I. KONATE, ancien Ministre de la Justice, sur son compte Twitter : « La rue est le lieu d’expression du ras-le-bol et la colère des gens mal en point. Leurs complaintes doivent être entendues par des oreilles attentives, même pour s’entendre dire le mal d’un régime qui ne peut plus se prévaloir de sa propre turpitude ».

En effet, s’est tenue, le vendredi 05 Juin 2020, une marche « pacifique », organisée par la Coordination des Mouvements, Amis et Sympathisants de l’Imam Mahmoud DICKO (CMAS), le Front pour la Sauvegarde de la Démocratie (FSD) et l’Espoir Mali Koura (EMK). L’objectif principal était de demander démocratiquement et pacifiquement « la démission du Président de la République ».

La marche devrait démarrer à 14 heures mais depuis 09 heures, certains manifestants ont commencé à venir petit à petit. Vers 11 heures, le nombre de manifestants commençait à se multiplier.

A l’occasion de cette marche les fidèles présents ont effectué sur place, la prière du vendredi.

Mais à partir de 14 heures, cela trouvait que des dizaines de milliers de personnes étaient présents dans tous les quatre côtés du Boulevard pour répondre à l’appel du Rassemblement des Forces Patriotiques du Mali.

Comme toute autre marche, des manifestants aux obédiences religieuses différentes. Certains n’ont aucune coloration politique. Mais une chose demeure claire comme l’eau de roche, ils avaient en commun des revendications et réclamations communes pour le Salut de la patrie.

Des manifestants en ire tenaient les autorités « responsables » de la recrudescence de l’insécurité et de la mauvaise gouvernance. Sur des pancartes, des slogans hostiles à IBK et à son gouvernement mais également la libération de Soumaïla CISSE, Chef de file de l’opposition.

Dans la perspective de la manifestation, acceptée par le gouverneur du district, les autorités avaient déployé très tôt le matin, un dispositif sécuritaire important sur place afin de bien coordonner la manifestation.

S’adressant aux manifestants, le très respecté et éclairé l’Imam Mahmoud DICKO (CMAS), s’exprimait en ces termes : « Ce que vous lui avez dit, est suffisant, mais je reviens là-dessus. Comme il n’aime pas l’ultimatum. Quand tu lui demandes de mettre fin à une situation, c’est pour qu’il la refasse le lendemain. Pour nous montrer qu’il s’en fout, mais je jure par Allah, s’il ose nous défier cette fois-ci, sa manière de laisser le pouvoir va rentrer dans l’histoire… »

Cette phrase a tout son sens, cela veut dire qu’ils sont résolus et vont s’insister avec opiniâtreté et pugnace détermination pour faire dégager le Président de la République, démocratiquement.

Nous pensons que l’exécutif ne doit point être indifférent, face aux revendications de ces manifestants qui ont paisiblement exprimé la souveraineté du peuple.

Indiscutablement, la gestion du Président IBK est désastreuse et son bilan est catastrophique parmi celui de tous ses prédécesseurs.

Avec autant de changement de poste du Premier ministre qui n’a abouti en aucun résultat concret. Cependant, tout porte à croire que le Président et son gouvernement ne peuvent pas sortir le pays du statu quo.

Démocratiquement, il est vrai qu’en cas d’une éventuelle démission du Chef de l’Etat, c’est le Président de l’Assemblée nationale qui assurera l’intérim illico presto. Malheureusement, ce dernier souffre d’un grand déficit de légitimité et de compétences au sein de l’opinion nationale ; les initiateurs de ladite marche n’ont point manquer de demander également à mettre fin au régime.

Un dialogue est possible mais

« On est prêt à toute négociation, mais à condition que celle-ci puisse aboutir au départ du Président de la République » répète Issa K. N’Djim, porte-parole de la CMAS, sur un ton catégorique en réaction à l’offre de dialogue du gouvernement qui se dit favorable à l’aboutissement des aspirations légitimes des manifestants, dans un communiqué publié le lendemain du grand rassemblement du vendredi passé.

Pour le président du FSD, Choguel Kokala Maïga, l’objectif ne change pas. « Nous voulons une nouvelle ère pour le Mali, il faut que le peuple malien donne une leçon au monde entier que l’on peut obtenir le changement de ce régime pacifiquement ».

Et après une éventuelle démission du Président de la République ?

  • Juridiquement, après la démission du Président de la République, il incombe au président de l’Assemblée Nationale de le substituer pendant la période de transition. Il lui incombe également d’organiser une nouvelle élection. Et vu que l’actuel président de l’hémicycle ne fait pas l’unanimité au sein de la population, vu que la nouvelle assemblée est contestée, sa démission et la dissolution de la sixième législature n’est pas à exclure, tout comme celle de la Cour constitutionnelle qui a perdue toute sa crédibilité. Pouvons-nous comprendre alors, que les trois grandes institutions de la République sont contestées. Une révision constitutionnelle est plus que d’actualité pour renforcer davantage l’intérêt du peuple malien. Un changement de régime sera plus que nécessaire, et la tâche ne sera pas du tout aisée pour le nouveau venant, car comme le disait Barack Obama : « L’Afrique n’a pas besoin des hommes forts, mais des institutions fortes ».
  • Aussi, pour lutter contre la mauvaise gouvernance, il est clair que le peuple doit apprendre à sanctionner ses leaders politiques par un « vote sanction », le peuple doit sortir manifester contre toutes les politiques politiciennes menées par les gouvernements. Il faudrait qu’ils sentent une menace pour changer les choses, on doit se doter d’un mécanisme de contrôle de l’action gouvernementale autre que celui du parlement car au parlement c’est toujours la même majorité entre gouvernement et l’Assemblée nationale et de ce fait les élus d’un même parti politique ne sanctionneront jamais leurs camarades au gouvernement, c’est ce qu’on appelle souvent la dictature des partis politiques qui sont des acteurs de la mauvaise gouvernance. Il faudrait aussi que le peuple exige de ses autorités un code de bonne gouvernance contrôlé par les acteurs de la société civile, par des associations indépendantes et des institutions internationales.
  • Ensuite pour lutter contre la corruption, au niveau des autorités il faut renforcer les mesures de sanction contre le corrompu et le corrupteur, donner les moyens matériels et financiers nécessaires aux agents du pouvoir exécutif, législatif, et judiciaire de telle sorte qu’ils ne soient pas corruptibles pour de l’argent, sensibiliser le peuple sur ces mauvaises pratiques qui nuisent à la société, mettre en place un mécanisme de dénonciation de tous cas de corruption ou tentative de corruption.

Auteurs : Abdrahamane TRAORE, Publiciste et Gestionnaire en Formation à INTEC-SUP

                 Oumar CISSE, Economiste et Informaticien à INTEC-SUP.

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