En août dernier, la découverte réfutée de deux fosses communes au centre du Mali avait donné lieu à un vif échange entre Human Rights Watch et Kassoum Tapo, le ministre des droits de l’Homme.
Pendant que l’ONG américaine dénonçait l’existence de charniers, le ministre qui s’était rendu en visite expresse avait rejeté l’existence des fosses communes. La visite de Fatou Bensouda, Procureure de la CPI pourrait avoir comme conséquence l’ouverture d’une enquête qui trancherait définitivement la question.
Lorsqu’elle donnera sa conférence de presse ce mercredi 18 octobre à 18 heures, l’on guettera sans doute l’annonce d’une enquête sur ces charniers présumés découverts en août dernier dans le centre du Mali. A l’Invitation du ministère de la Justice, la Procureure de la Cour pénale internationale (CPI) se rend au Mali pour une visite de travail de deux jours.
Fatou Bensouda pour un “check-up” des droits de l’homme au Mali
Officiellement, la Gambienne devrait y rencontrer les autorités judiciaires maliennes, des cadres de l’armée mais aussi des membres de la société civile. Elle devrait également avoir un tête-à-tête, ce mercredi 18 octobre au Palais de Koulouba, avec le président Ibrahim Boubacar Keïta. Point d’orgue de cette première visite, prévue en septembre puis reportée, la robe noire va donner une conférence de presse très attendue.
Du côté des autorités maliennes, la visite de la Procureure de la CPI est un simple « check-up » de la situation des droits humains au Mali. Aurait-elle quitté La Haye pour Bamako pour un simple contrôle de routine dont auraient pu se charger ses experts-éclaireurs ?
L’enjeu de cette visite, c’est peut-être cette découverte de fosses communes annoncée en août dernier et dont on a du mal à avoir la confirmation. Début août dernier, la Minusma, la force des Nations Unies au Mali, avait envoyé ses enquêteurs à Anéfis, dans la région de Kidal.
Charniers “sous enquête”, éteindre les feux de la polémique
Dans cette région, véritable champ de bataille entre les groupes armés pro-gouvernementaux et les combattants de la Coordination des mouvements de l’Azawad, censés constitués les patrouilles mixtes pour la sécurisation du pays, les enquêteurs de la Minusma avaient révélé l’existence d’au moins deux fosses communes suite à des exactions sur les civils. Une existence appuyée par des témoignages de civils recueillis par des ONG sur place.
Kassoum Tapo, le ministre des droits de l’homme qui s’est rendu dans la région en septembre avait nié l’existence de ces fosses communes. Une sortie qui lui avait attiré les foudres de Human Rights Watch qui situaeint ces charniers dans les villages Yirima, Isseye et Mougnoukana. Dans son sillage l’ONU avait estimé qu’« une visite sur le terrain n’est pas considérée comme une enquête sur les droits de l’homme ».
L’accord de paix signé à Alger en juin 2015 n’a pas fait cesser les combats souvent accompagnés d’exactions entre les groupes armés. « Les crimes abominables qui se déroulent dans le Nord sont des crimes insupportables. Souvent ces crimes impliquent des groupes armés signataires de l’Accord, mais qui violent le cessez-le-feu sur le terrain », a indiqué Mamadou Ismael Konaté, le ministre de la Justice.
Fatou Bensouda pourrait bien s’intéresser à ces exactions qui relèvent de sa compétence universelle de procureur de la CPI en ouvrant des situations sur les violations des droits de l’Homme. Toute la question est maintenant de savoir si l’institution basée à La Haye va mettre « cette situation sous enquête » ou la placer sous « enquête préliminaire », selon son propre jargon.
Dans l’un ou l’autre des cas, l’action de Fatou Bensouda, scrutée à la loupe, devrait éteindre (ou alimenter) cette vive polémique sur les charniers. Sur cette question, le Mali s’en remet à l’arbitrage de Fatou Bensouda .