La majorité des élus présents a entériné le document
116 voix pour, 21 contre et 0 abstention. Les députés ont adopté jeudi, tard dans la soirée, la Déclaration de politique générale du gouvernement, trois jours après sa présentation par le Premier ministre, Modibo Kéïta. Au terme de plus de 9 heures de débats, parfois houleux et donnant lieu à de véritables empoignades entre les députés du camp présidentiel et ceux de l’opposition, la majorité des élus présents se sont prononcés en faveur du document dont le chef du gouvernement va maintenant coordonner l’application.
Les députés de l’opposition ont voté contre avec pour argument principal le manque de précision dans la mise en œuvre des stratégies et la mobilisation des moyens pour atteindre les objectifs escomptés.
Le chef de gouvernement a expliqué que la DPG donne une vision globale de l’action gouvernementale. A ce titre, il serait fastidieux d’y afficher tous les détails, tel que voulu par certains élus, a-t-il indiqué. La Déclaration de politique générale du gouvernement est bâtie sur de grands axes comme la sécurité des personnes et la protection de leurs biens dans un environnement de paix, l’amélioration les conditions de vie des populations et la promotion de la justice et de l’équité.
Avant l’ouverture des débats, le Premier ministre a rappelé que le socle sur lequel se fonde la DPG demeure le projet de société édicté par le président de la République, en ce qui concerne le développement économique, social et culturel de notre pays, ainsi que le Programme d’actions du gouvernement 2013-2018.
SOUTIEN TOTAL. Tout au long des débats, les députés de la majorité ont loué les efforts du gouvernement de Modibo Keïta, avant de l’assurer de leur soutien total. Ils ont cependant invité le gouvernement à accorder une attention particulière à la sécurité des personnes et de leurs biens. En effet, des élus ont relevé que la recrudescence de la violence, malgré l’Accord de paix, impose un redéploiement des forces de sécurité dans des endroits stratégiques encore oubliés dans le dispositif actuel. Ils ont insisté sur la préservation de l’environnement et de la qualité des intrants vendus à nos paysans (en référence à la polémique en cours sur la qualité des engrais) qui ont par ailleurs besoin de plus de périmètres aménagés.
La question de la sécurité et de la justice dans notre pays a été au centre des préoccupations des députés aussi bien de la majorité que de l’opposition. L’inquiétude des élus a été exacerbée par la récente attaque de la localité de Misséni dans l’extrême sud du pays jusque là épargné par les bandits armés et les narcotrafiquants.
Les députés Aly Niangado, Idrissa Sangaré, Lassana Traoré ou encore Oumar Mariko, ont ainsi développé un plaidoyer pour la mise en œuvre d’actions concrètes susceptibles de faire revenir la quiétude au sein des populations aussi bien des régions du nord que dans le reste du pays.
« Tous les jours nous enregistrons des morts. C’est une situation que nous vivons au quotidien. Ce qui s’est passé à Misséni est une alerte », a réagi le Premier ministre qui a eu une pensée pour tous les victimes et leurs familles. Il a préconisé un sursaut national pour appuyer les actions du gouvernement qui met tout en œuvre pour doter l’armée de moyens conséquents dans le cadre de la Loi de programmation militaire. Plus de 90 milliards Fcfa vont être mobilisés pendant l’année 2015 afin de répondre au défi de l’insécurité.
Répondant à une question sur l’école, le chef du gouvernement a souligné l’intérêt qu’il accorde à cette question. Pour lui, l’école n’est pas un champ politique, mais le fruit d’une politique. Il a annoncé le recrutement de plus 5000 enseignants, toutes catégories confondues, des actions pour maîtriser le flux et des mesures pour moraliser les écoles privées. Modibo Kéïta a déploré le cas des enfants de Kidal qui depuis trois ans ne vont pas l’école.
AFFAIRE CLOSE. Les députés ont également mis l’accent sur la nécessité de renforcer des actions de désenclavement de notre pays à travers, notamment, la construction de routes nationales, régionales et locales pour faciliter l’approvisionnement et permettre la mobilité les personnes et des biens. Le Premier ministre a indiqué que le document prenait en compte la construction de nouvelles routes et l’entretien du réseau routier qui connaît une densification depuis quelques années.
La lutte contre la corruption a également été au centre des débats, surtout de l’opposition, avec notamment l’honorable Mamadou Hawa Gassama qui a demandé que suite soit donnée à l’affaire de l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires. Le chef de gouvernement, appuyé par certains députés de la majorité, a jugé que cette affaire était close et qu’il revenait à la justice de faire son travail dans le cadre de la séparation des pouvoirs et des missions de chaque institution. Les bonnes relations entre le FMI, la Banque mondiale et notre pays ont été rétablies, a fait remarquer Modibo Kéïta.
La justice, un sujet sensible dans le contexte actuel de notre pays, connaîtra des reformes et l’accent sera mis sur la justice transitionnelle, la formation au niveau de l’Institut national de formation judiciaire ainsi que la formation continue.
La politique nationale de sports permettra le rayonnement dans ce domaine. Les actions en faveur des régions du nord seront fonction du climat sécuritaire.
La question de la migration a également retenu l’attention des députés. Modibo Keita a regretté les nombreuses victimes, notamment celles originaires de notre pays qui a une longue tradition de migration. Il a indiqué que le département en charge des cette question est en train de prendre des mesures pour attaquer le mal à la racine en créant les conditions pour retenir « les jeunes qui veulent échapper à une certaine forme de précarité ». Plus généralement, un plan d’actions d’urgence pour la relance de l’économie est en cours pour soutenir le secteur de l’économie et des finances.
La promotion, l’autonomisation de la femme se traduiront par la mise en place d’un fonds doté de 500 millions de Fcfa pour promouvoir le leadership féminin et s’occuper des enfants en situation difficile, notamment les enfants mendiants, a confirmé Modibo Kéïta.
21.000 LOGEMENTS SOCIAUX. S’agissant du foncier, le chef du gouvernement a indiqué que les reformes envisagées permettront de réduire la spéculation foncière, devenue un fléau.
Concernant l’approvisionnement de notre pays en denrées alimentaires de première nécessité, il a rassuré ses interlocuteurs. Le marché est suffisamment fourni et les prix sont meilleurs à ceux des cinq dernières années.
Sur les questions concernant les industries, la production et les logements sociaux, le Premier ministre s’est félicité des progrès réalisés par nos unités industrielles. Des subventions importantes sont prévues pour soutenir la production agricole et la mécanisation de l’agriculture. A ce propos, l’affaire des engrais frelatés, n’a pas été éludée. Modibo Kéïta a confirmé que les échantillons envoyés à des laboratoires pour vérification ont confirmé leur caractère nocif. Cependant, les enquêtes continues. Il a annoncé que l’affaire ne restera pas impunie.
Concernant l’habitat, Modibo Kéïta a souligné que la construction de 50 000 logements sociaux était une réalité. Le protocole d’accord pour la réalisation de 21 000 logements a ainsi été signé dans le cadre d’un partenariat public-privé. Le caractère social des logements tient au fait que le coût de la parcelle et de la viabilisation est pris en charge par l’Etat. Les bénéficiaires payent uniquement le coût du bâtiment sur 25 ans.
Evoquant l’accès aux services sociaux de base, le Premier ministre a indiqué qu’à ce jour plus 579 000 personnes ont adhéré à l’Assurance maladie obligatoire (AMO). Une attention particulière sera accordée à la gestion des ressources humaines de la Fonction publique.
Le président de l’Assemblée nationale, Issiaka Sidibé, a salué l’exercice démocratique que constitue la présentation de la DPG. Il exhorté le gouvernement à veiller sur l’intérêt général. Le Premier ministre Modibo Kéïta s’est félicité du climat démocratique qui a caractérisé les débats.
Be COULIBALY
source : L ‘ Essor