François Hollande réunit jeudi un conseil de défense à l’Elysée, alors que s’amplifie l’émotion suscitée par l’annonce, la veille, de la décapitation en Algérie de l’otage français Hervé Gourdel par ses ravisseurs jihadistes.
A Nice, où vivait ce guide de haute montagne de 55 ans, les drapeaux ont été mis en berne. Et dans le village de Saint-Martin-Vésubie (Alpes-maritimes), où Hervé Gourdel avait créé un bureau des guides, les habitants ont prévu un hommage jeudi en fin d’après-midi. Le maire, Henri Giuge, s’est dit “choqué, abattu”.
Ses proches insistent sur les passions de cet homme “ouvert” et “curieux des gens” pour l’escalade, la montagne et le Maghreb, qui l’ont conduit dans le parc national du Djurdjura en Kabylie (est de l’Algérie), devenu sanctuaire de groupes islamistes.
Dans une vidéo mise en ligne mercredi, Jund al-Khilafa, groupe lié à l’organisation Etat islamique (EI), a annoncé et montré la décapitation d’Hervé Gourdel, qui avait été enlevé dimanche en Kabylie. La vidéo, postée sur des sites jihadistes, était intitulée “Message de sang pour le gouvernement français”.
Hervé Gourdel a été “lâchement, cruellement, honteusement” exécuté, a dénoncé François Hollande depuis New York, où il assistait à l’Assemblée générale des Nations unies. Le chef de l’Etat a réaffirmé que Paris ne “(céd)ait jamais devant le chantage”.
Le chef de l’Etat, qui avait rejeté l’ultimatum des ravisseurs exigeant la fin des frappes françaises visant l’EI en Irak, a souligné que cet assassinat renforçait sa “détermination”. Ces frappes se poursuivront “le temps nécessaire”, a fait savoir François Hollande.
“Nous sommes en Irak à la demande des autorités irakiennes”, a dit jeudi son ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. “L’objectif est de reconquérir leur territoire, faire en sorte que l’intégrité de l’Irak soit retrouvée”, a-t-il expliqué. “Il faudra poursuivre. Avec force et détermination, sans aucun arrêt pour aboutir au résultat”.
Le ministre de la Défense a également déclaré que la “question” d’une intervention en Syrie, autre bastion de l’EI, était “posée”, même si “c’est une opportunité qui ne se présente pas aujourd’hui”.
L’ancien Premier ministre, François Fillon (UMP), a estimé pour sa part que pour “détruire l’Etat islamique”, la coalition ne pourrait pas “s’arrêter à la frontière” syrienne et qu’il fallait donc “mettre pour le moment de côté la question de Bachar al-Assad”.
A Bordeaux, dont Alain Juppé est le maire, les drapeaux français ont été mis en berne en hommage à Hervé Gourdel.
Le Conseil de défense doit débuter à 12h00 à l’Elysée. Y participeront, autour de François Hollande et du Premier ministre, Manuel Valls, Jean-Yves Le Drian (Défense) et Bernard Cazeneuve (Intérieur), le directeur général de la sécurité extérieure (DGSE), Bernard Bajolet, le chef d’état-major des armées, Pierre de Villiers, le secrétaire général de la Défense et la Sécurité nationale, Francis Delon, et le directeur général de la sécurité intérieure (DGSI), Patrick Calvar.
– “En guerre” –
Il s’agira de “prendre toutes les dispositions pour assurer la sécurité de nos compatriotes, ici, en France et partout dans le monde”, a précisé le chef de l’Etat mercredi depuis New York.
“Hervé Gourdel est mort parce qu’il était Français, parce que son pays, la France, combat le terrorisme” et qu’il était “le représentant d’un peuple, le nôtre, qui est épris de liberté et qui défend la dignité humaine contre la barbarie”, a-t-il ajouté.
Selon le président Hollande, le Premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, a affirmé que l’Algérie continuerait à mobiliser “toutes les forces possibles” pour retrouver les assassins du guide et récupérer son corps.
L’Algérie, qui a dénoncé mercredi soir “un acte odieux et abject”, avait déployé ces deux derniers jours quelque 1.500 soldats en Kabylie pour tenter de le retrouver.
De son côté, l’Union européenne a condamné un “assassinat barbare”, se disant “plus que jamais unie” pour soutenir la lutte contre les “groupes terroristes”. Le président américain, Barack Obama, a exprimé la solidarité de son pays avec la France.
Dans un tweet, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a témoigné de sa solidarité avec Laurent Fabius. “Condoléances & tristesse pr vous et le peuple français suite à la mort de M. Gourdel. L’Amérique connaît trop cette douleur”, a-t-il écrit.
Le député-maire UMP de Nice, Christian Estrosi, a demandé au président Hollande de décréter une journée de deuil national, estimant que la France était “en guerre”.
Une décision qui relève du Conseil des ministres, a indiqué jeudi le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, sans préciser si la requête allait aboutir.
Le mot “guerre” était, de fait, celui qui revenait le plus souvent jeudi dans les éditoriaux de la presse quotidienne française.
Jeudi matin, Manuel Valls a souligné la nécessité de “rassemblement” et de “vigilance”. “On cherche à semer la terreur”, mais “la France doit être capable de se rassembler”, a-t-il déclaré lors d’une cérémonie d’hommage aux harkis à Paris.
© 2014 AFP