Les Maliens n’en démordent pas ! Contre les résultats des législatives, les coupures intempestives de l’électricité, le couvre-feu (dont le premier ministre a finalement a annoncé la levée), les manifestations se multiplient un peu partout à travers la ville de Bamako. Les Régions de Kayes, Sikasso, Koutiala, Bougouni ont, à leur tour, aussi enregistré des manifestations. Cette colère exprime avant tout un ras-le-bol généralisé. La situation actuelle est le résultat d’un pilotage à vue. Rien d’étonnant, lorsqu’on arrive au pouvoir sans programme de gouvernement bien ficelé, sans une grande ambition pour son pays et sans vision claire des réalités du pays. Faut-il s’attendre à des miracles ? La réponse est Non. Voilà une triste réalité : celle du Mali d’aujourd’hui.
Cela fait près d’une semaine que, presque quotidiennement, des manifestations essentiellement nocturnes se déroulent à Bamako et dans certaines villes de l’Intérieur. Les manifestants entendent exprimer leur colère contre, entre autres, le couvre-feu, les résultats des législatives, les coupures intempestives de l’électricité…
Une colère populaire
Cette fois-ci encore, les Maliens scandent qu’ils en ont assez. Ils sont, une nouvelle fois, dans la rue pour exprimer leur colère. Mais, comme les fois précédentes, les manifestations ont été ponctuées des actes de violences. Gaz lacrymogènes, jets de pierres, pneus enflammés sur les voies goudronnées, blocage et barricade des routes, face à face avec la police, sont autant d’actes posés par les citoyens pour dire non au couvre-feu. Des contestataires mobilisés un peu partout à travers la ville scandaient : «On en a marre du couvre-feu !», «On meurt de faim ou on meurt de coronavirus !». «À bas le couvre-feu, on sort pian !». Drissa, un jeune homme d’une vingtaine d’années révolues, se plaignait du couvre-feu et des incessants délestages du courant électrique. Selon lui, les coupures intempestives de l’électricité auraient failli lui pousser avec ses camarades à se révolter et à braver l’interdiction.
La tension était palpable entre manifestants et forces de l’ordre. «Les Policiers ne devraient pas nous museler comme ça : ils ne peuvent pas utiliser l’argent de nos taxes pour acheter des armes et nous tirer dessus», déplore un manifestant. En guise de représailles, plusieurs symboles de l’Erat ont été attaqués à plusieurs endroits.
Sur les réseaux sociaux, dans des vidéos partagées largement, on peut voir des manifestants scander des slogans dénonçant les délestages de l’EDM-SA en cette période de canicules. En plus de la capitale, les Régions de Kayes, Sikasso, Bougouni et Koutiala ont aussi enregistré des manifestations.
La proclamation des résultats définitifs des élections législatives par la Cour Constitutionnelle est l’autre facteur déclencheur de l’ire des manifestants. Ainsi, plusieurs partis politiques qui avaient été donnés pour gagnants par les résultats provisoires, proclamés, il y a quelques jours, par le Ministère de l’Administration Territoriale se sont vus retirer leur victoire par la Cour Constitutionnelle au profit des proches du pouvoir. Ce qui a attisé la colère de leurs partisans qui sont aussitôt sortit contester ces résultats réclamant la vérité des urnes. Ainsi, de Bamako à Kayes, en passant par Sikasso et Sévaré (Région de mai), les manifestants dénoncent les différences entre les résultats provisoires annoncés par le Ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, un des trois organes en charge de l’organisation du scrutin et ceux publiés par la Cour constitutionnelle ».
A Sikasso, la situation a dégénéré avec des affrontements très violents entre manifestants et forces de l’ordre faisant plusieurs blessés…
Une économie à vau-l’eau
Le Mali est cristallisé dans une situation économique désastreuse. La majorité de la population est plongée toujours dans plus de précarité et le coût de la vie y devient de plus en plus cher. «Il faut que nous ayons la possibilité de travailler comme dans tous les autres pays ; il faut que nous ayons la possibilité de manger […]. Mais aujourd’hui, c’est chaotique », déplore Modibo Traoré, un opérateur économique de la place.
Même le citoyen lambda, qui n’a rien à voir avec ce secteur, chacun se plaint à son niveau à cause de l’argent qui se raréfie. Le Boutiquier du coin ou la vendeuse des condiments au marché se plaignent tous de la mévente par manque d’une clientèle introuvable.
Beaucoup d’opérateurs économiques maliens disent tirer le diable par la queue, à ses jours. Plusieurs entreprises, des PME-PMI, ont mis la clé sous le paillasson. Parmi elles, il y a des Boutiques d’alimentations, Boulangeries ou Sociétés de négoce et de distribution.
Les conséquences de cette situation de paupérisation générale sont notoires: conflits sociaux, déstabilisation des foyers, banditisme, déperdition des enfants ». Sans commentaire !
Au même moment, beaucoup d’entreprises ont été obligées de mettre leurs Agents au chômage technique ainsi des populations sont privées de leurs revenus. Pour tous, les difficultés s’accumulent. Et, pourtant, le gouvernement a toujours vanté les performances de notre économie, qui est la 3e de la zone UEMOA, avec son corollaire de 5% de croissance. Donc, la crise de trésorerie, qui est une réalité indéniable, ne pourrait résulter que de la mal gouvernance et non d’un manque de ressources financières.
La corruption en ligne de mire
Outre ses promesses non-tenues, Ibrahim Boubacar Kéïta est soupçonné de corruption, un problème qui gangrène le pays.
En effet, en matière de Gouvernance, le Régime d’IBK présente un visage peu réjouissant. Aussi, les scandales financiers se sont multipliés et sont restés impunis très loin des promesses du candidat IBK. Ces manifestations sont ainsi l’occasion idoine saisie [par les manifestants de « Crier Haro sur le bodet ! »… Cela pour marquer leur extrême indignation face à la gestion désastreuse d’un Régime et d’une Administration malienne abonnés aux scandales financiers, aux détournements des deniers publics, à la surfacturation et autres pratiques corruptives… le tout se déroule sous le mandat d’un chef d’Etat qui est aujourd’hui rattrapé par sa parole, ses promesses et ses engagements non tenus. C’est, notamment, dans le domaine de la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Et IBK ne semble pas être un modèle de « lutteur» contre la corruption et la délinquance financière. La preuve : les Maliens attendent toujours les poursuites contre les Ministres, Cadres et autres Agents et Fonctionnaires accusés ou soupçonnés de fraude et de détournement dans les scandales de l’avion présidentiel et du contrat d’armements, avec l’affaire d’engrais frelatés…
Par sa gestion calamiteuse, le Président IBK et ses Gouvernements successifs ont conduit le pays au désastre. Conséquence : les injustices flagrantes, les détournements des Biens publics au vu et au su de tout le monde, l’extension de la pauvreté, le chômage des jeunes, ont créé un profond mécontentement du Peuple malien. Mécontentement qui finit par exploser par ses manifestations spontanées qui ébranlent fortement la stabilité du pays.
Mémé Sanogo
L’Aube