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Crise au Soudan : LES RAISONS DE LA COLÈRE

Les évènements récents au Soudan sont les conséquences de l’échec des politiques gouvernementales, des guerres civiles et de la mauvaise gestion du pays. En 2018, les difficultés économiques se sont accrues avec une inflation de près de 70% et une livre soudanaise qui a plongé face au dollar américain.

Pour beaucoup de Soudanais, le président Omar el-Béchir, son gouvernement et le Parlement ne répondent plus aux besoins urgents du pays, au niveau économique comme au niveau politique. Le chef de l’Etat a fait des concessions le 31 décembre. Il a formé une « commission vérité » après 45 morts en 13 jours de contestation. Il a également annoncé des élections libres en 2020. Il a enfin libéré les détenus arrêtés après les manifestations de ces derniers jours.

Mais l’opposition demande la démission du gouvernement, du Parlement et la formation d’un gouvernement ou un conseil transitoire, qui se chargera d’organiser des élections anticipées. Sans cela, les contestations vont continuer et prendront d’autres formes, promet-elle. Ceux qui sont sortis pour réclamer liberté et démocratie ne croient plus aux promesses du président. Ils sont frustrés par le pouvoir décrit comme « stérile ». Depuis 2011, la perte du Soudan du Sud et des trois-quarts des revenus générés par le pétrole a affaibli le pays. Le pouvoir a promis des solutions mais plus de huit ans après, le constat est très grave. Même les exportations d’or, qui allaient, selon le gouvernement, compenser la perte des revenus du pétrole, n’ont pas rempli les caisses.

L’exportation de l’or était monopolisée par l’Etat jusqu’au début du mois de décembre dernier. Le pouvoir misait sur ce projet pour avoir des devises, mais l’opposition dénonce le détournement de sommes importantes qui seraient allés dans les poches de membres de l’entourage du président. D’où l’un des principaux slogans répétés ces derniers jours par les manifestants : « le pouvoir corrompu et le gouvernement voleur ». S’y ajoute le manque de confiance dans le secteur bancaire. Les capitaux des hommes d’affaires indépendants fuient le pays.

Le régime soudanais, installé il y a 29 ans, souffre également de l’usure. Le ras-le-bol des Soudanais est nourri par des récents développements politiques. Le parti du Congrès, au pouvoir, n’a pas hésité à désigner Omar el-Béchir comme « l’unique candidat du parti » pour l’élection présidentielle de 2020. Une désignation contestée au Soudan, d’autant plus que le colonel el-Béchir avait promis, à plusieurs reprises, qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat en 2020. En réalité, il se dirigeait, avant ce mouvement, vers un changement de la Constitution qui lui permettrait de se présenter aux élections une fois de plus. Cette vague de contestation s’ajoute à d’autres. Omar el-Béchir n’a pas mené le pays vers la transition démocratique comme il avait promis après son coup d’Etat. Bien au contraire, il a dirigé le Soudan d’une main de fer. Même le dialogue national qu’il avait lui-même initié, il y a quelques années, avec l’opposition, a été vidé de son contenu. La déception a été grande. Les partis politiques ont mis beaucoup d’espoir en ce dialogue. Face à cette situation, les choses sont revenues à la case départ. La situation économique, politique et sociale, n’a cessé de se détériorer.

En plus des réclamations de la liberté et la démocratie, les Soudanais de la rue veulent qu’on les respecte. Pour eux, le régime est arrogant, alors qu’il devrait subvenir à leurs besoins en nourriture, santé et éducation. Au lieu de cela, les manifestants estiment qu’Omar el-Béchir est entouré d’une classe politique islamiste corrompue et favorisée par le régime ainsi que d’une armée et une police qui le défend en dépit de leurs luttes internes. La garde rapprochée d’Omar el-Béchir a la mainmise aujourd’hui sur tous les secteurs de l’économie. Elle dirige les institutions et contrôle l’argent public. Elle va jusqu’à dominer l’appareil de l’Etat et même l’exécutif. Cette catégorie sociale, aussi petite qu’elle soit, « hypothèque le Soudan » pour reprendre l’expression d’un observateur. Selon l’opposition, l’entourage d’Omar el-Béchir a réduit l’Etat à une coquille vide que le peuple veut récupérer et réactiver.

L’Essor

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