Dieu est-il à la mosquée uniquement ou partout ? Les érudits n’iraient pas chercher loin pour soutenir, avec verve et fougue, la seconde affirmation. En effet, les textes religieux nous ont appris, au long des sermons et au prix de lecture sérieuse des livres saints, que Dieu sait tout, Dieu est Tout-Puissant et que Dieu est partout.
Ce prédicat a le rôle d’une introduction à la ridicule polémique qui met dos-à-dos les autorités politiques et religieuses et les populations soucieuses de leur santé et de leur bien-être. La crise du Covid 19 tend, en effet, à devenir une crise entre religieux et politiques. Faut-il fermer les mosquées pour stopper la propagation du coronavirus au Mali ? Les sous-entendus, de part et d’autre, laissent croire que les deux camps sont unanimes sur la nécessité de lutter efficacement contre le Covid 19 et que, s’il est avéré que l’ouverture des mosquées (nous n’évoquons pas les religions chrétiennes qui ont fait le choix de fermer leurs lieux de culte) participe de la propagation de ce virus, il faudrait les fermer. La vraie question est de savoir qui doit prendre cette responsabilité de décider de la fermeture des mosquées.
S’il nous faut utiliser un doigt accusateur, il s’orienterait facilement vers l’Etat et donc vers les plus hautes autorités du pays. Ces dernières, par la voie du Premier d’entre eux, Ibrahim Boubacar KEITA, a, dans différentes sorties, appelé les religieux à prendre exemple sur la Mecque et d’autres lieux saints de l’Islam. La position ambiguë des chefs religieux renvoie l’Etat dans les cordes. Pendant ce temps, la pandémie croît avec vigueur.
Ce bras de fer, qui ne dit pas son nom, s’installe par la peur de la réaction des fidèles musulmans, qui pourraient s’irriter de la fermeture des mosquées, quel qu’en soit le décideur, en cette période de pitié qu’est le ramadan. Ces fidèles, par habitude sans doute, ne peuvent se convaincre d’être en contact avec Dieu ailleurs qu’au sein de la mosquée, quitte à prendre le risque inconsidéré de s’exposer au Covid 19.
Cette polémique, en plein milieu de la crise pandémique, prouve à suffisance que le Mali a un véritable problème avec ses religieux. « Tous les régimes qui se sont succédés au Mali ont affirmé, sans exception, le principe de laïcité qui visait à établir l’autonomie de la sphère politique par rapport à la sphère religieuse et la soumission de la sphère religieuse à l’autorité politique. Tous ont tenté de contrôler ou d’institutionnaliser ces acteurs religieux, avec plus ou moins de succès ».
Dans le cas présent, il ne s’agira pas, pour la grande majorité des maliens, de savoir qui sortira vainqueur de ce bras de fer silencieux, qui fonctionne par une pression invisible et soft, mais bien quelle décision pour sauver des vies sera rapidement, prise à propos des mosquées ?
Une certitude tout de même, dans cette polémique stérile au regard de l’urgence du moment, c’est que « Allah n’est pas obligé » d’être présent uniquement dans les mosquées pour recueillir notre demande de pardon pendant ce mois béni de ramadan.
Y.Kébé
Source: Bamakonews