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Conflits intercommunautaires : Au-delà de l’indignation, il faut agir

Notre pays n’est décidément pas sorti de difficultés. Malgré toutes les mesures sécuritaires prises depuis l’auto proclamation de l’indépendance du Nord du Mali en 2012, par le mouvement touareg MNLA, ce pays vit encore des situations de plus en plus alarmantes. La barbarie exercée sur la communauté peulh, le 23 mars, n’est qu’une de plus sur la longue série d’exactions dont le peuple malien est victime. Au-delà de leurs auteurs, il faut condamner les différents régimes pur avoir été plus spectateur qu’acteur.

 

Le Mali ne connaît plus de guerre à proprement parler. Ce qui s’y passe aujourd’hui relève du banditisme et de de la lâcheté dans le sens littéral du terme. Les auteurs de ces barbaries ne sont généralement mus par aucune revendication idéologique comme c’était le cas avec le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ce que le peuple malien vit actuellement n’est que les conséquences de la guerre entre l’Etat du Mali et le groupe armé touareg, le MNLA, qui exigeait l’indépendance ou l’autodétermination du Nord.

Si le défi principal de l’armée malienne était de restaurer l’Etat dans le nord (ce qu’il a réussi partiellement), il n’en demeure pas moins que le pourrissement de la situation avait déplacé l’intérêt de la lutte. D’origine indépendantiste, les mouvements qui allaient naître de l’absence de l’Etat dans le Nord exigent l’instauration d’un Etat islamique et les principaux groupes armés qui portaient ce combat furent sans doute l’AQMI, le MUJAO et Ansar Dine.

Depuis l’accord d’Alger signé en 2015, les violences qui sévissent au Mali sont assimilables plus à de l’insécurité qu’à de la guerre. En effet, même si la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ne regroupe pas tous les groupuscules qui profitaient de l’absence de sécurité au Mali, le simple fait qu’il ait signé l’accord a pu restaurer l’espoir de revoir notre pays unifié et pacifié.

Pour autant, malgré l’implication de la communauté internationale, la rébellion a laissé place aux enlèvements, prises d’otages et attaques qui redessinent le visage de la confrontation, laquelle s’apparente plus au terrorisme qu’autre chose. La contribution des forces étrangères telles que les opérations Serval et Barkhane (pour la France), la MINUSMA (pour l’ONU) et même le G5 Sahel n’a eu d’effet que sur le terrorisme à visage découvert et non sur les activités sporadiques de groupuscules armés en quête de « légitimation » et de reconnaissance.

S’il est vrai que le Mali est venue à bout de la rébellion et du terrorisme à proprement parler, il est aussi réel que la sécurisation du pays demeure un vrai luxe. L’horrible massacre de 160 personnes appartenant à une même ethnie change complètement la lecture de l’insécurité qui sévit au pays d’Ibrahima Boubakar Keita.

Il ne s’agit pas là d’un acte terroriste, ou d’un acte isolé, il faut plutôt parler de barbarie comme certains en savent faire. Essayer d’en chercher les raisons serait aussi une perte de temps car il n’y en aurait pas de valable. Qu’un tel massacre provienne de groupes rebelles ou terroristes se comprend aisément, mais que cela revête un caractère ethnique (jusqu’à la preuve du contraire) semble inhumain en plus d’être attentatoire à la liberté d’appartenance. Cette tuerie fait suite à l’attaque de la base militaire de Dioura qui avait fait 21 morts il y a juste une semaine.

Où est l’Etat malien censé assurer la sécurité ?

 Si la situation sécuritaire du pays s’est détériorée de cette façon, il faut accuser le gouvernement qui n’a rien fait contre la prolifération des milices. L’Etat du Mali est doublement responsable de ce mal qui a fini par ronger tout le pays : d’abord parce qu’il n’a pas su prendre les devants pour éviter la rébellion en 2012, ensuite parce qu’il n’a pas su prendre les fortes mesures qu’il fallait mettre en œuvre pour dissoudre et désarmer les milices.

Malgré le processus de « désarmement, de démobilisation, de réintégration et d’intégration » (DDR), les autorités maliennes n’ont pas toujours réussi à restaurer la stabilité et la sécurité.

La série d’attaques qui prend en otage la population malienne ne s’arrêtera que si les autorités du pays prennent les vraies décisions. Il n’aurait pas fallu attendre ce massacre qui menace la cohésion entre ethnies pour dissoudre la milice incriminée. Dans une République digne de ce nom, l’existence de milices ne saurait être tolérée car l’Etat est appelé à assurer ses prérogatives régaliennes dont la libre circulation ainsi que la sécurisation des biens et des personnes.

Certains de ces dogons qu’on accuse d’être à l’origine de cette attaque ne sont pas sortis de la brousse pour faire l’Ange de la mort. Ils ont toujours existé dans la société malienne et exercent leurs activités au nez et à la barbe des autorités. Voilà pourquoi le limogeage de certains chefs militaires dont le chef d’état-major général des armées du Mali n’est qu’une mesure bouche-trou.

Il ne doit pas s’agir de calmer la colère des victimes et laisser le temps faire son travail afin qu’on arrive à oublier ces exactions. Il doit plutôt être question de pourchasser ces chasseurs de vies innocentes et de leur appliquer toute la rigueur des lois nationales et internationales. 160 morts, nom de Dieu ! Si ce massacre avait été noté ailleurs, le tollé aurait été plus retentissant et l’indignation plus large.

C’est pourquoi les Maliens doivent exiger d’IBK, pour son dernier mandat, qu’il fasse de la pacification du pays sa principale priorité.

 

Paul N’GUESSAN

Mali Horizon

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