Dans son adresse à la Nation, consécutive à la mobilisation historique du 5 avril, suite à l’appel de l’imam Mahmoud Dicko, le président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, a annoncé la tenue des assises nationales qui étaient initialement prévues, du 22 au 29 avril 2019. Pour donner corps à ce projet, une commission d’organisation présidée par Cheick Sidi Diarra et un comité de pilotage composé par le triumvirat Baba Hakib Haidara, Ousmane Issoufi Maïga et Aminata Dramane Traoré ont été mis en place.
Ainsi, cette annonce corrobore la justesse des positions du Mouvement Populaire du 22 mars 2012 (MP22), qui avait eu le courage de réclamer à visage découvert la tenue d’une concertation nationale souveraine, depuis le début de la crise sécuritaire et socio politique qui sévit notre pays.
A l’instar de la conférence nationale du Mali tenue, le 29 juillet au 12 août1991, au Palais de la Culture Amadou Hampâté Ba de Bamako, cette conférence vise à passer au crible la gouvernance démocratique, économique, institutionnelle, sociale et culturelle de notre pays. Elle mobilisera toutes les composantes de notre nation (partis politiques, organisations de la Société civile, syndicats, maliens de la diaspora, leaders religieux, personnalités indépendantes etc. …) qui dans un diagnostic sans complaisance, passeront au peigne fin l’état de la nation afin de dégager des pistes de sortie de crise.
Au cours de cette grande messe nationale de haute portée politique seront discutées la situation sécuritaire du pays, la crise de l’éducation nationale, la restructuration de l’armée, la refondation de l’Etat et de notre architecture institutionnelle, la question du nord et du centre et les reformes politiques et institutionnelles (révision de la Constitution du 25 février 1992, de la Loi électorale, de la Charte des partis politiques, le redécoupage territorial) pour consolider notre système démocratique et notre pratique institutionnelle.
Aussi, cette consultation populaire se penchera sur la promotion du dialogue social face à la montée en puissance des revendications catégorielles des syndicats dans les secteurs régaliens de la vie nationale (Santé, Education, Administration).
Catharsis collective, ces assises nationales permettront à notre peuple de dessiner dans un sursaut national les contours d’un projet collectif nouveau pour construire les bases d’un véritable développement économique et social durable.
Au regard de la complexité de la situation nationale (marquée par la résurgence d’attentats terroristes, les conflits inter communautaires, les exécutions sommaires et extra judiciaires au nord et au centre du pays) et des défis immenses auxquels notre pays fait face, ces assises constituent la seule porte de sortie de crise.
En effet, la nomination unilatérale par les autorités en charge de la nation des membres de la commission d’organisation et du comité de pilotage n’est pas de nature à faciliter une participation collective autour de cette rencontre déterminante pour l’avenir de notre pays. Cette situation est un coup de massue à l’inclusivité nécessaire pour la réussite de ce projet qui incarne un immense espoir au sein de la classe politique et de l’opinion nationale. Ces personnalités sont accusées à tord ou à raison par les regroupements politiques notamment le Front pour la sauvegarde la démocratie (FSD) et la Coalition des forces patriotiques (CoFoP) de partialité.
Pour notre part, nous pensons que l’objectivité scientifique aurait du pousser le Gouvernement à confier l’organisation de ce forum national éminemment politique aux religieux.
En effet, compte tenu des enjeux stratégiques de la rencontre, le pouvoir politique ne peut faire l’économie d’impliquer les organisations démocratiques et sociales qui constituent les forces vives de la nation dans tout le processus de préparation et de coordination de la conférence nationale (Validation du choix des membres de la commission d’organisation et de pilotage, élaboration des termes de références, choix des participants, organisations matérielles et logistiques de la conférence).
En prélude au dialogue national, des concertations nationales doivent être organisées dans les chefs lieux de région, ce qui nécessite des dispositions sécuritaires pour sécuriser la rencontre.
Ainsi, ce dialogue politique national refondateur jettera sans nul doute les bases d’un nouvel Etat plus protecteur, d’une nouvelle architecture institutionnelle mieux adaptée à notre réalité culturelle et d’un développement économique national solidaire à la condition que l’Etat s’engage à mettre en œuvre ses recommandations.
Alpha Sidiki SANGARE
Inter De Bamako