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Commission d’enquête internationale: manœuvres dilatoires de la CMA

Suite à la nomination des membres de la Commission d’Enquête Internationale prévue par l’Accord pour la Paix et la Réconciliation (APR) au Mali issu du Processus d’Alger, la Coordination des mouvements armés (CMA), sentant l’étau se resserrer sur elle, joue la carte de l’extrapolation.

L’entame de son communiqué du lundi 5 février dernier est trompeuse, comme toujours. En effet, prenant acte de la décision du Secrétaire général des Nations unies relative à la nomination des membres de la Commission d’enquête internationale, elle s’en réjouit également.

Les termes de l’Accord

Mais là s’arrête la mascarade. Avec cette Commission d’enquête prévue par l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, l’étau se resserre sur la Coordination des mouvements armés. En effet, l’article 46 dudit Accord stipule : ‘’Les Parties conviennent de promouvoir :
Une véritable réconciliation nationale fondée sur les éléments ci‐après :
– création d’une Commission d’enquête internationale chargée de faire la lumière sur tous les crimes de guerre, les crimes contre l’Humanité, les crimes de génocide, les crimes sexuels et les autres violations graves du Droit international, des Droits de l’homme et du Droit international humanitaire sur tout le territoire malien;
– réaffirmation du caractère imprescriptible des crimes de guerre et crimes contre l’humanité et engagement des Parties à coopérer avec la Commission d’enquête internationale;
– non-amnistie pour les auteurs des crimes de guerre et crimes contre l’Humanité et violations graves des
Droits de l’homme, y compris des violences sur les femmes, les filles et les enfants, liés au conflit (…)’’.

Une menace précise

La menace est d’autant plus précise qu’à la conclusion de l’Accord pour la paix et la réconciliation, il a été convenu que la période ouverte par l’enquête internationale s’étend de 2012 à nos jours. Sur cette base, la CMA est mal barrée, dès lors que ladite période renferme les atrocités commises à Aguel’hoc, un certain 24 janvier 2012. Le ministre français de la Coopération, Henri de Raincourt, déclare le 13 février 2012 sur Radio France internationale : « des violences absolument atroces et inadmissibles » ont été commises à Aguel’hoc, avec des « exécutions sommaires, des soldats, des personnes – on parle d’une centaine – qui ont été capturées et ont été froidement exécutées ». Selon une source française proche du dossier interrogée par l’Agence France-Presse, « au total, il y a eu 82 morts exactement, pas de civils ».

Grave infraction

Il faut souligner que ces personnes capturées ont été froidement exécutées. Or, en temps de guerre, s’il faut se mettre dans cette dimension, un soldat capturé est un prisonnier de guerre et doit être traité comme tel. À cet effet, voici ce que dit la Convention III de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, 12 août 1949 :
Article 4 : ‘’sont prisonniers de guerre, au sens de la présente Convention, les personnes qui, appartenant à l’une des catégories suivantes, sont tombées au pouvoir de l’ennemi’’.
Article 12 : ‘’Les prisonniers de guerre sont au pouvoir de la Puissance ennemie, mais non des individus ou des corps de troupe qui les ont fait prisonniers. Indépendamment des responsabilités individuelles qui peuvent exister, la Puissance détentrice est responsable du traitement qui leur est appliqué’’.
Article 13 : ‘’Les prisonniers de guerre doivent être traités en tout temps avec humanité. Tout acte ou omission illicite de la part de la Puissance détentrice entraînant la mort ou mettant gravement en danger la santé d’un prisonnier de guerre en son pouvoir est interdit et sera considéré comme une grave infraction à la présente Convention. En particulier, aucun prisonnier de guerre ne pourra être soumis à une mutilation physique ou à une expérience médicale ou scientifique de quelque nature qu’elle soit qui ne serait pas justifiée par le traitement médical du prisonnier intéressé et qui ne serait pas dans son intérêt.
Les prisonniers de guerre doivent de même être protégés en tout temps, notamment contre tout acte de violence ou d’intimidation, contre les insultes et la curiosité publique.
Les mesures de représailles à leur égard sont interdites’’.
Au regard de ces dispositions, et de bien d’autres, la CMA et ses alliés jihadistes sont coupables d’infraction grave à la Convention de Genève, après avoir froidement égorgé des soldats en rupture de munitions et pris en otage des Élèves maîtres pour servir de bouclier humain. La Commission d’enquête internationale ne devrait éprouver aucune peine à établir ces faits. D’où, la fébrilité de la CMA qui joue la carte de l’extrapolation ; question d’incriminer également les FAMa victimes, depuis des décennies, d’une véritable campagne de diffamation.

La contre-attaque

C’est tout le sens de ce passage de sa déclaration : ‘’de ce fait, pour la CMA, le mandat de cette Commission d’Enquête Internationale (CEI) devrait couvrir toute la période où des crimes et graves violations de droits humains ont été commis (de 1963 à nos jours) dont les événements de 2012 ne constituent qu’un des cycles de complication de ce conflit’’.
Contrairement au cas des atrocités commises en 2012, il serait difficile à la Commission d’enquête internationale d’établir de présumés crimes de guerre, des crimes contre l’humanité remontant aux années de l’indépendance.
Qu’à cela ne tienne, la CMA sait ce qu’elle fait. Convaincue du traitement présentiel dont elle bénéficie, elle ne doute pas que sa manœuvre fera tomber la plus grande partie du tort sur l’État malien. Ce qui passerait quasiment sous silence sa cruauté de 2012.
C’est donc pour des raisons évidentes qu’elle donne des gages : ‘’la CMA exprime toute sa disponibilité et usera de tous les moyens pour la manifestation de la vérité afin que les parents des victimes de crimes et graves violations des droits humains aspirent enfin à une véritable justice’’.
In fine, face à des manœuvres dilatoires de la CMA, la vigilance doit être de mise.

Par Bertin DAKOUO

SourceInfo Matin

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