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Comment IBK peut s’en sortir

Réélu il y a à peine sept mois, Ibrahim Boubacar Keïta n’a bénéficié d’aucun état de grâce. Il est contesté de toutes parts. Enseignants, étudiants, fonctionnaires, cheminots, gardes pénitentiaires, médecins, tout le monde y va de sa petite grève. Il n’y a pas jusqu’aux directeurs financiers des services publics, censés pourtant constituer une belle caste de privilégiés, qui n’aient déclenché un mouvement de débrayage.

Au même moment, l’État n’exerce aucun contrôle sur le Nord, livré aux rebelles et à leurs alliés terroristes, alors qu’au Centre, les affrontements intercommunautaires font des hécatombes et les milices armées prolifèrent comme moustiques en hivernage. Sans égard pour les dizaines de civils et de soldats qui tombent chaque jour, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) foule allègrement aux pieds l’Accord de paix tandis que la milice centriste Da Na Amassagou défie ouvertement l’État.

Ce tableau apocalyptique apparaît encore plus terrifiant quand on se souvient que les caisses de l’État sont littéralement vides et que, les uns à la suite des autres, les investisseurs se détournent du Mali. Ce qui compromet durablement toute possibilité pour le gouvernement de répondre favorablement aux revendications catégorielles, voire d’exécuter les dépenses courantes du pays.

Point n’est donc besoin d’être grand clerc pour constater l’inefficacité de la politique suivie jusque-là par les pouvoirs publics. Prétendre le contraire revient à user de propagande ou à jouer les masseurs de pieds aux dépens de l’intérêt national. D’autant que depuis quelques semaines, les fidèles musulmans ont rejoint les partisans de l’opposition dans les rues, rendant le climat encore plus délétère.

Alors, que faire ? Comment IBK pourrait-il se dépêtrer de ce bourbier ?

Certains, comme les opposants politiques et les groupes religieux, exigent la démission du Premier ministre. Certes, ce départ pourrait dégonfler d’un cran les muscles de ses adversaires et rassurer ceux qui soupçonnent Soumeylou Boubeye Maiga d’utiliser l’État pour préparer ses plans présidentiels; mais selon nous, les problèmes de fond qui minent le pays subsisteraient car ils sont tributaires d’une politique et non d’un homme, soit-il chef du gouvernement. En effet, le Premier ministre n’agit pas seul: membre d’une alliance politique, il forme une équipe solidaire avec le gouvernement et obéit aux directives du chef de l’État…

En conséquence, pour remédier à la ribambelle de problèmes de fond, nous réitérons notre vieille proposition de conférence nationale. Une proposition aujourd’hui partagée par la plupart des acteurs politiques. L’intérêt d’une telle assise, souveraine ou non, est multiple :

• la conférence tirera le bilan de 28 ans d’une démocratie mal adaptée à nos réalités, mal comprise par nos compatriotes, mal appliquée par nos institutions et, au bout du compte, inapte à faire notre bonheur; les conférenciers redéfiniront la démocratie, lui donneront de nouveaux habits et lui assigneront de nouveaux objectifs, très éloignés du gouffre de corruption et de laxisme où elle patauge depuis 1991;

• la conférence rassemblera les Maliens dans toutes leurs diversités, recueillira leurs critiques et suggestions et, surtout, donnera à IBK un nouveau cahier de charges qui lui permettrait de corriger les lacunes de sa politique et d’affronter, au nom et avec l’appui de toute la nation, les périls de l’heure;

• la conférence relira les textes de la République, y compris la Constitution, en précisant notamment les sacrifices que les Maliens sont réellement prêts à consentir pour renouer avec leurs frères du Nord: cette relecture corrigerait et légitimerait l’Accord de paix signé avec les groupes armés tout en offrant aux opposants de meilleures garanties pour les futures élections;

• la conférence se prononcera enfin sur les missions des forces étrangères perçues aujourd’hui par la majorité des Maliens comme poursuivant d’autres intérêts que ceux du Mali.

Si cette conférence réussit, un gouvernement d’union nationale sera chargé d’organiser des élections référendaires, législatives et locales. Le nouvel État issu de ce processus balayerait tout obstacle qui se dresserait devant lui car il incarnerait la nation entière, et non un parti ou un homme.

Maître Cheick Oumar Konaré

Source: Bamada.net

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