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Comment Ebola a volé Noël en Afrique de l’Ouest

Affalée derrière une table dans le marché de Waterside, à Monrovia, Massa Gborlie fixe désespérément du regard les rares acheteurs qui passent, indifférents à ses produits. Au Liberia comme en Sierra Leone, Ebola ruine la fête commerciale de Noël.

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«Habituellement, les affaires sont bonnes pour nous entre le 1er et le 31 décembre, mais cette année, Ebola a tout gâché», soupire-t-elle.

Malgré une population chrétienne combinée de plus d’un million de personnes à Monrovia et Freetown, capitales des deux pays les plus touchés, avec la Guinée, les guirlandes et les décorations de Noël ont du mal à se faire une place dans les rues, entre les affiches sur les dangers d’Ebola.

La Banque mondiale a annoncé début décembre que l’épidémie allait faire chuter la croissance de ces pays sous la barre des 4% cette année, avant d’entraîner la Sierra Leone et la Guinée dans la récession en 2015.

Le 5 décembre, les ministres de l’Économie du Liberia, de Sierra Leone et de Guinée ont plaidé à l’ONU pour le lancement immédiat d’un plan de relance.

Le ministre guinéen de l’Économie Mohamed Diaré a rappelé les séquelles de l’épidémie sur tous les secteurs: commerce, agriculture, mines, transports ou tourisme appelant à «un appui supplémentaire pour que les trois pays puissent se tenir debout après l’épidémie».

Le secteur minier, un pilier de ces économies grâce aux gisements de fer, diamant et autres minerais parmi les plus riches au monde que recèlent ces pays, est touché. Deux exploitants importants, London Mining et Africa Minerals, sont en difficulté en Sierra Leone, selon le gouvernement, alors que la plupart des travailleurs expatriés ont quitté le Liberia.

L’activité minière était interrompue mercredi dans la province diamantifère de Kono, dans l’est de la Sierra Leone, placée pour deux semaines en quarantaine en raison de l’augmentation du nombre de cas confirmés d’Ebola, ont indiqué à l’AFP les autorités locales et des témoins.

Les boutiques étaient ouvertes, mais vides d’acheteurs et seuls circulaient les véhicules utilitaires, médicaux ou des forces de sécurité.

Faute de préavis, «hier (mardi), quand la nouvelle s’est répandue, c’était la ruée sur les denrées de base comme le manioc, le poivre, et le poisson qui ont été vendus à des prix exorbitants», a déploré Thomas Lahai, un mécanicien au chômage.

Baisse des transferts de l’étranger

Une crise agricole et alimentaire se profile également. Selon l’Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), en Sierra Leone au moins 40% des agriculteurs ont abandonné leur exploitation ou sont morts et 90% des lopins des zones agricoles les plus productives n’ont pas été cultivés.

Depuis le début de la crise, le pouvoir d’achat a diminué de 20% en Sierra Leone et de plus d’un quart au Liberia, selon l’ONU.

Dans la province de Lofa, «grenier» du Liberia, et la première du pays atteinte par le virus, les prix des produits de base avaient augmenté de 30 à 75% dès le mois d’août.

À travers Freetown, une ville de 1,2 million d’habitants, les boîtes de nuit et les bars sont fermés à cause de l’état d’urgence.

Isatu Kanu, 36 ans, secrétaire dans une société d’assurance, s’estime «chanceuse de ne pas avoir été licenciée comme plusieurs amis parce que les affaires vont mal partout».

La Sierra Leone pâtit en outre du tarissement d’une source de revenus essentielle pour un pays en développement: les transferts d’argent des citoyens à l’étranger, d’un volume annuel d’environ 50 millions de dollars (environ 40 millions d’euros) par an, selon la Banque Mondiale.

Car les Sierra-Léonais préfèrent à la voie bancaire la méthode officieuse et moins chère du convoyage de fonds de la main à la main.

Jacob Smith, un habitant de Freetown, a trois enfants installés aux États-Unis. «Ils ne connaissent personne d’assez courageux pour venir, donc ils vont utiliser un service de coursiers qui vous donne de la monnaie locale à taux très réduit», explique-t-il.

Les plus pauvres souffrent particulièrement de ne pouvoir compter sur la charité habituelle en cette période de Noël.

«En ce moment, les aumônes devraient augmenter, mais ce n’est pas le cas. En voyant l’expression morose des gens, on ose à peine leur tendre la sébile», affirme un mendiant de Freetown. «Ils s’accrochent à ce qu’ils ont, ne sachant pas de pas de quoi demain sera fait».

Source: lapresse.ca

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